Comment l’étude des traceurs permet d’analyser la circulation océanique ?

Contenu :

  1. Qu’est-ce que la circulation océanique ?
    1. La circulation thermohaline
    2. Les courants de surface
    3. Les courants de profondeur
  2. Les traceurs océaniques
    1. Qu’est-ce qu’un traceur ?
    2. Les isotopes stables vs isotopes radioactifs
    3. Les traceurs chimiques

Il est bien connu que les eaux marines couvrent 71% de la planète terre. Ces masses d’eaux sont en continuel mouvement et jouent un rôle majeur dans la régulation du climat et dans l’absorption du CO2. C’est dans cette optique, que l’étude de la circulation océanique est d'une importance cruciale. Elle ne cesse de progresser au fil des années. Cependant, pour mieux comprendre cette science, il est important d’avoir recours à ce que l’on appelle communément les « traceurs océaniques ». Il existe ainsi plusieurs types de traceurs : les uns sont dits naturels et se composent de silicate, de nitrate, de phosphate… et les autres sont appelés « chimiques » ou « transitoires », qui ont été inventés chimiquement par l’Homme.

1. Qu’est-ce que la circulation océanique ?

a. La circulation thermohaline

La circulation océanique peut être définie comme l’ensemble des mouvements et des déplacements de l’eau. Seulement, une circulation océanique, également appelée thermohaline, est bien plus complexe que cela et son importance est très déterminante au niveau de la planète. La raison est que la circulation océanique permet non seulement de répartir la chaleur issue de l’énergie solaire mais aussi de réguler les climats dans le monde entier. Ainsi, comprendre ce que signifie une circulation océanique est primordial. La première chose à savoir est qu’il existe deux sortes de courants marins : de surface et de profondeur. Ensemble, ils sont appelés « circulation thermohaline ».

b. Les courants de surface

C’est à cause de ce qu’on appelle les « frictions » que les courants de surface peuvent avoir lieu. En effet, en surface, l’intégralité des océans suivent un cheminement naturel qui repose particulièrement sur la trajectoire des vents. Toutefois la portée et la direction des courants de surface varient selon plusieurs facteurs, dont notamment la force de Coriolis, la présence des continents, l’hémisphère où se trouvent les courants (au nord les courants dévient à droite et au sud à gauche), etc. En prenant en considération l’intégralité de ces facteurs, il serait possible de cerner les courants de surface avec précision.

c. Les courants de profondeur

Quant aux courants de profondeur, également appelés courants de densité, ils sont engendrés par plusieurs éléments. Naturellement, en profondeur, le vent n’influence plus la circulation océanique, du moins lorsqu’on atteint les 700 à 900 mètres de profondeur. Donc, le vent n’a aucun impact sur la circulation de profondeur. Par contre, cette circulation de l’océan provient plutôt de la densité de l’eau. Celle-ci est elle-même dépendante, entre autres, de la température et de la salinité de l’eau. Par conséquent, plus l’eau est salée et plus l’eau sera dense ; et plus elle sera dense plus les courants en profondeur pourraient circuler. On trouve l’eau salée principalement dans les endroits de la planète où il y a de faibles précipitations et où il y a beaucoup d’évaporation. Dans ces endroits, l’eau glisse dans le fond de l’océan justement à cause de la densité. Outre la salinité de l’eau, la température, froide en l’occurrence impacte la densité de l’eau et donc les courants de profondeur. Par conséquent, quand l’eau de surface refroidit elle devient dense et coule au fond de l’eau.

2. Les traceurs océaniques

Alors que les recherches des scientifiques ne font que commencer, l’océan nous révèle d’emblée quelques-uns de ses secrets. Certes, les paramètres hydrologiques utilisés depuis des décennies par les océanographes, telle que la température et salinité, sont très efficaces pour mesurer les courants de surface. Mais en ce qui concerne les courants de profondeurs, les scientifiques ont optent pour l’utilisation des traceurs océaniques. Ces derniers permettent néanmoins d’analyser aussi bien les profondeurs que la surface de la circulation océanique.

a. Qu’est-ce qu’un traceur ?

Catherine Jeandel, océanologue géochimiste française, définit le traceur comme « un élément chimique ou un isotope d’élément qui est bavard, c’est-à-dire que sa présence (ou son absence) en un lieu ou à un moment donné permet de reconstruire un processus, de raconter une histoire ». Cette définition vient approuver la théorie selon laquelle les traceurs est le moyen le plus efficace de nous jours pour analyser la circulation océanique. Comme leur nom l’indique, les traceurs permettent de « tracer » les déplacements de matières. Toutefois, il est important de connaître tous les types de traceurs qui sont utilisés lors d’une analyse de la circulation océaniques, car chacun à un rôle différent. Il existe donc deux grandes familles de traceurs : les uns sont appelés « naturels » et les autres « transitoires ». Les premiers comme leur nom l’indique sont issus de la nature. Ils comprennent notamment les ions silicates, le dioxygène, le phosphate, le nitrate, et bien d’autres encore. Par contre les traceurs chimiques ou transitoires sont plutôt inventés par l’Homme grâce à la chimie. Parmi ce type de traceur on trouve le fréon ou encore tritium. Ces deux familles de traceurs bien que leurs rôles et leurs applications soient différents, ils ont néanmoins un but en commun : l’étude des déplacements des masses d’eaux dans l’océan. Il est à savoir également que bon nombre de traceurs naturels sont également chimiques. En effet, le carbone 14, par exemple, est certes créé par la nature, mais il est également créé par l’Homme. De même, le tritium est à la fois naturel et chimique.

b. Les isotopes stables vs isotopes radioactifs

Tout d’abord, il serait nécessaire de définir ce qu’est un isotope. Ce terme désigne simplement deux atomes dont l’un possède un nombre de neutrons plus grand que le second, mais qui, tous deux, ont le même nombre de protons. L’exemple le plus commun est celui du carbone. Celui-ci possède trois isotopes : le Carbone 12, 13 et 14. Seul le carbone 14 est instable, c’est-à-dire radioactif. C’est d’ailleurs en partie pour cette raison qu’il est utilisé pour la datation en géologie ou encore en paléontologie. Produit en permanence dans la haute atmosphère, le carbone 14 se retrouve partout sur terre. Ainsi, pour analyser la circulation océanique on utilise très souvent le carbone 14 comme traceur. Il présente en effet maints avantages qui éclairent les scientifiques sur de nombreux phénomènes océaniques. Toutefois, le Carbone 14, présente des limites car les scientifiques ne peuvent pas l’utiliser dans des eaux où le temps de résidence est supérieur à 35 000 ans. Par contre, le chlore 36 est un traceur des plus intéressants lorsqu’il s’agit d’estimer l’âge des eaux des grands bassins.

De même, l’oxygène 18 est également un des isotopes naturels les plus importants dans l’analyse de la circulation océanique. Bien qu’il soit peu abondant dans la nature, l’oxygène 18 est un isotope stable qui permet de déterminer avec précision la température des précipitations à travers le temps lorsque cet isotope est relevé dans les glaces de l’arctique ou de l’antarctique. Par ailleurs, il est à savoir qu’il existe des isotopes qui se désintègrent à cause de la radioactivité, tandis que d’autres isotopes (stables) sont issus de la radioactivité elle-même. Ces derniers, appelés radiogéniques, ne peuvent aucunement se désintégrer. D’autre part, on trouve d’autres isotopes qui sont en même temps radioactifs et radiogéniques car ils font partie des isotopes qui se désintègrent de manière naturelle. Les isotopes, stables ou instables, sont tous indispensable dans l’analyse de la circulation océanique. Ils agissent comme étant des indicateurs qui permettent de retracer un processus biologique ou encore chimique. Toutefois, pour les utiliser il faut d’abord avoir des connaissances dans l’analyse des traceurs eux-mêmes. Cela nécessite des outils bien spécifiques mais aussi un savoir qui ne peut être enseigné que durant le cursus universitaire.

c. Les traceurs chimiques

Parmi les traceurs chimiques les importants dans l’analyse de la circulation océanique, le tritium et le fréon sont les plus importants. Le tritium est en réalité, comme beaucoup de traceurs, un isotope aussi bien naturel que chimique. Toutefois, étant présent de manière infime à l’état naturel, le tritium est désormais abandon dans la nature grâce notamment aux essais nucléaires atmosphériques. Dès les années 60, le tritium s’est donc retrouvé dans l’atmosphère, ensuite, il s’est introduit dans les eaux de surface. Dix ans plus tard, le tritium est descendu jusqu’à 5000 mètres de profondeur. Cette forte présence de tritium permet donc de suivre les circulations des océans. En ce qui concerne le fréon, appelé également, CFC (chlorofluorométhanes), il est diffusé dans l'atmosphère, pour se retrouver dans l'eau de mer à la surface de l'océan, exactement comme c’est le cas du tritium. Les fréons sont connus particulièrement comme étant responsables, en partie, du trou dans la couche d’ozone. Cependant, les fréons n’ont pas que des inconvénients.  Heureusement, ils servent aussi à servir la science, notamment en ce qui concerne l’analyse du mouvement océanique. En effet, le CFC est très utile aux chercheurs pour découvrir le déplacement des masses d’eau de l’océan. Il est donc possible, grâce à ce traceur chimique, de connaître avec grande précision le parcours de la circulation profonde  de l’océan. La raison est que le fréon est comme une sorte de colorant qui s’est dispersé sur la quasi intégralité de la surface des eaux. Ainsi, il n’est pas très compliqué pour les scientifiques de suivre simplement le fréon pour percer le mystère de la circulation océanique. Les traceurs sont indéniablement importants pour l’analyse de la circulation océanique. Néanmoins, il est important, pour les utiliser, d’avoir de larges connaissances en plusieurs domaines, notamment en océanographie et en physique. Cela est possible exclusivement dans les universités spécialisées. Par ailleurs, les traceurs, bien qu’ils permettent d’analyser avec une précision plus ou moins importante les mouvements des océans, ils ne fournissent pas encore assez d’informations dans ce domaine. En effet, maintes régions océaniques sont encore très floues et incompréhensibles pour les chercheurs.

Article publié le 22 Avril 2021par Boutaleb El Idrissi Sara