Analyse des coûts – coûts complets
Octobre 2000
ANALYSE DES COUTS - COUTS COMPLETS
1.1 Différence avec la comptabilité générale
La comptabilité permet de connaître l’information financière relative à l’entreprise, à al classer, de manière à pouvoir comparer des entreprises.
La comptabilité générale a donné naissance à :
-l’analyse financière
- la comptabilité analytique (différente de la comptabilité générale qui est globale), elle permet la connaissance des coûts par produit, par unité, par opération
- les coûts partiels qui vont permettre une prévision
La comptabilité analytique présente des difficultés : connaissance des coûts cachés.
1.2 Comptabilité analytique
La comptabilité analytique d’exploitation (CAE) se propose d’obtenir des résultats analytiques par branches, par produit, par service. Sa base se trouve en particulier dans les données de la comptabilité générale et ressort de la confrontation des produits et des charges relatives à chaque production, chaque branche ou chaque service.
Les objectifs sont de calculer les coûts, déterminer les résultats analytiques, connaître en permanence la valeur des stocks.
La CAE permet d’analyser la rentabilité des composants de l’entreprise, de calculer les prix de vente, d’évaluer des actifs immobilisés produits par l’entreprise, de contrôler des mauvais résultats ou des résultats aberrants en analysant les anomalies de gestion de façon à situer la responsabilité et rechercher les modifications indispensables.
C’est un outil d’aide à la décision mais qui représente l’inconvénient de rendre difficile la prévision. Les difficultés principales rencontrées viendront de la connaissance des coûts cachés (absentéisme, non-qualité, conflits sociaux, information) et de la répartition des charges entre les différents coûts, du fait des hypothèses qui seront faites, hypothèses souvent discutables.
Il faudra néanmoins préférer à des calculs trop précis sans signification véritable, la pertinence, c’est-à-dire l’adaptation du calcul au problème posé ou à la décision à prendre.
1.3 Organisation de la CAE
C’est à la fois une méthode de calcul et un système comptable. Elle n’est pas obligatoire mais se révèle souvent indispensable pour aider à la gestion. Elle est souple et adaptable selon la nature des entreprises et offre un éventail important de solution selon le degré d’information souhaité.
Définition:
Un produit désigne un bien ou un service créé par l’entreprise, il peut être fini ou en cours.
Une charge correspond à une prestation reçue en contrepartie d’un décaissement simultané ou non. Les charges engendrées par l’exploitation peuvent être décaissables ou non.
L’accumulation des charges et des produits lui donne une valeur désignée par le terme de coûts. On distingue les coûts complets, coûts qui tiennent compte de toutes les charges se rapportant à un branche, un service. Les coûts partiels sont ceux qui ne tiennent compte que d’une partie des charges ex : coûts directs, coûts indirects, coûts fixes et coûts variables.
Un résultat analytique est la différence entre le prix de vente d’un produit et un coût complet. Une marge est la différence entre un prix de vente et un coût partiel.
Par principe, les charges inscrites dans la comptabilité générale sont à prendre en CAE. Toutefois, certaines charges sont exclues de la CAE, on parle de charges incorporables, ex : charges exceptionnelles, DAP exceptionnelles, dotation aux amortissement si pas liées au processus normal d’exploitation.
Toute charge d’exploitation qui ne présente pas un caractère de récurrence doit être analysé avant d’être transféré en comptabilité analytique, ex : indemnités de licenciement, de départ à la retraite, frais d’études, frais de sous-traitance.
Dans la mesure où il apparaît que la charge peut être non incorporable, il conviendra de réfléchir à la méthode de répartition de cette charge, ex : prise en compte dans la CAE, mais à hauteur de 50%.
En revanche, la CAE peut prendre en compte des charges qui ne sont pas admises en comptabilité générale, on parle d’éléments supplétifs incorporels, ex : volonté de gonfler les charges par prudence, la prévision de charges exceptionnelles, précaution prise contre un dérapage des charges prévues ou provision d’un bénéfice.
Dans le cas où une société travaille avec du matériel complètement amorti, il est normal de prévoir en CAE une dotation fictive correspondant à l’amortissement qui aurait été pratiqué si le bien concerné était en cours d’amortissement. Ainsi l’entreprise travaille dans des conditions d’exploitation normales.
La règle de travail reste la liberté dans la mesure où l’hypothèse est justifiée par rapport à la situation de l’entreprise.
On distingue deux sortes de charges : les charges directes et indirectes.
3.1 Charges directes
On appelle charges directes des charges qui peuvent être directement affectées à un coût sans calcul intermédiaire, ex : les matières premières dans un coût d’achat, les salaires de production d’un atelier au coût de production d’un produit si seulement ce produit est fabriqué dans l’atelier
3.2 Charges indirectes
Les charges indirectes sont celles qui demandent un traitement spécial avant d’être imputées au coût des matières premières. Ce traitement se fait à partir du découpage de l’entreprise en centre d’analyse.
On distingue 2 sortes de centres :
- les centres auxiliaires, qui regroupent des fonctions communes (administration, entretien, transport, GRH
- les centres spécifiques aux activités principales (acheter, produire, vendre), qu’on appelle aussi centres principaux
Un centre d’analyse est un ensemble de moyens, regroupés dans une unité avec un rôle déterminé dont l’activité peut être mesuré par une unité commune, qui est soit une unité physique ou une unité monétaire. Dans le cas de l’unité physique, on parlera d’unité d’œuvre (heure, kg), dans le cas d’une unité monétaire on parlera de taux de frais (100F de CA, 100F d’achat). Pour l’unité de mesure, il convient de trouver l’unité la plus pertinente en se méfiant des évidences, on a recours parfois à des méthodes statistiques (comme l’ajustement linéaire). L’unité de mesure est la base des coûts complets, un mauvais choix entraînera souvent la nullité de l’analyse.
Quels sont les problèmes soulevés par le découpage d’une entreprise en centres ? Il s’agit de :
- de rechercher les services, les personnes ayant la même finalité ou la même activité. Il faut comme dans toutes les analyses se méfier des évidences, il faut aussi se méfier du passé et essayer d’être novateur.
- Séparation entre les centres auxiliaires et centres opérationnels
- Répartition des charges entre les centres, c’est-à-dire l’affectation des charges indirectes à chaque centre auxiliaire et principal.
Méthode:
Les charges indirectes dont l’objet d’un traitement dans les différents centres, ce traitement se fait dans le tableau de répartition des charges indirectes.
exercice:
La société « galeries modernes », fabrique deux sortes de galeries : des galeries normales et des galeries de luxe. La société s’approvisionne en tubes non façonnés qui sont découpés et mis en forme dans l’atelier 1. Les tubes façonnés sont traités par l’atelier 2 qui assure l’assemblage et la finition. La galerie NORMALE nécessite 6 tubes et la galerie LUXE 8 tubes.
On a le tableau de répartition des frais indirects suivant :
Montant | Administration | entretien | Transport | Atelier 1 | Atelier 2 | Distribution |
316.000 | 30.000 | 35.000 | 11.000 | 70.000 | 154.000 | 16.000 |
La section Administration est répartie dans toutes les autres sections proportionnellement aux nombres 1,1,2,2,4
La section Entretien a fourni 15% de son activité à la section Transport, 50% à la section Atelier 1, 35 % à la section Atelier 2.
La section transport a fourni 10% de son activité entretien et 90% à la section distribution.
Les unités d’ouvre retenues sont :
- pour la section Atelier 1, le Kg de matières consommées (tubes non façonnés)
- pour la section Atelier 2, l’heure de main-d’œuvre directe
- pour la Distribution, la galerie vendue
autres renseignements:
stocks au 1erjuin:
tubes façonnés : 48.000 unités pour 139.200 F
galeries NORMALE : 3.000 unités pour 137.000 F
galeries LUXE : 2.500 unités pour 156.500 F
calculé au 30 juin, le coût moyen pondéré du kg de matière premières (tubes non façonné) est de 2F.
production réelle du mois:
atelier 1 :
consommation de tubes non façonnés : 96.000 kg
main d’œuvre directe : 800 h à 24 F l’heure
production de tubes façonnés : 96.000 unités
atelier 2 :
main d’œuvre directe pour une galerie NORMALE 1/5 d’heure et pour une galerie LUXE ¼ d’heure (taux horaire 30F)
coût du lot de pièces détachées : pour une galerie NORMALE 12,4F et pour une galerie LUXE 18,7F
ventes du mois :
5000 galeries NORMALE à 56F l’unité
6.500 galeries LUXe à 66 F l’unité
le tableau de répartition est donc :
Administration | Entretien | Transport | Atelier 1 | Atelier 2 | Distribution | |
Frais indirects | 30.000 | 35.000 | 11.000 | 70.000 | 154.000 | 16.000 |
Administration | -30.000 | +3.000 | +3.000 | +6.000 | +6.000 | +12.000 |
Entretien | -40.000 | +6.000 | +20.000 | +14.000 | ||
Transport | +2.000 | -20.000 | +18.000 | |||
316.000 | 0 | 0 | 0 | 96.000 | 174.000 | 46.000 |
Unité d’œuvre | ||||||
Nombre d’U.O | 96.000 | 2.900 | 11.500 | |||
Coût d’U.O | 1 | 60 | 4 |
Détails des calculs :
A = 30.000
E = 0,1A + 0,1T +35.000 = 38.000 + 0,1T
T = 0,1 A + 11.000 + 0,15A = 14.000 + 0,15 E
On obtient 40.000 pour le poste Entretien et 20.000 pour le Trasport.
Après les 2 premières étapes qui sont la reprise des stocks initiaux et le tableau des charges indirects, on trouve le calcul des coûts successifs.
4.1 Les coûts d’achat
prix d’achat
+ frais directs d’achat
+ frais indirects répartis en fonction de l’unité d’œuvre
coût d’achat
C’est au coût d’achat que les matières premières entrent en stock pour la quantité achetée, on en ressortira la consommation de la période au prix défini par la méthode de valorisation des stocks (FIFO, LIFO, CUMP).
Exemple:
Libellé | Quantité | Prix Unitaire | Prix Total (en F) |
Tubes non façonnés | 96.000 | 2 | 192.000 |
4.2 Les coûts de production
coûts d’achat
+ frais directs
+ frais indirects répartis selon la clé de répartition
coût de production
Chaque coût de production peut générer une entrée en stock dont la sortie pourra être la première ligne d’un coût de production. Ce sera le cas si l’entreprise fabrique des produits semi-finis dont elle se sert pour produire un produit fini.
Exemple:
Libellé | Quantité | Prix Unitaire | Prix total |
Tubes non façonnés | 96.000 | 2 | 192.000 |
Main d’oeuvre directe | 800 | 24 | 19.200 |
Charges indirectes | 96.000 | 1 | 96.000 |
96.000 | 3,2 | 307.200 |
Stock initial 48000 139.200 stock final 54.000 162.400
Entrée 96.000 307.200 sortie 90.000 279.000
446.400 446.400
Galerie NORMALE
Quantité | Prix Unitaire | Prix total | |
Stock | 7000*6 | 3,1 | 130.200 |
Frais directs (M.O) | 0,20 *7.000 | 30 | 4.200 |
Frais directs (pièces) | 7000 | 12,4 | 85.800 |
Frais indirects Atelier 2 | 1400 | 60 | 84.00 |
7.000 | 49 | 343.000 |
Galerie LUXE
Quantité | Prix Unitaire | Prix total | |
Stock | 6.000*8 | 3,1 | 148.800 |
Frais directs (M.O) | 0,25*6.000 | 30 | 45.000 |
Frais directs (pièces) | 6000 | 30 | 112.200 |
Frais indirects Atelier 2 | 1.500 | 60 | 90.000 |
6.000 | 66 | 396.000 |
4.3 Les coûts de revient
stock de produits finis
+ frais directs de distribution
+ frais indirects de distribution
coût de revient
exemple:
stocks de produits finis
galerie NORMALE
stock initial 3.000 137.000 sortie 5.000 48 240.000
entrée 7.000 343.000 stock final 5.000 48 240.000
10.000 480.000 10.000 48 480.000
galerie LUXE
stock initial 2.500 156.500 sortie 6.500 65 422.500
entrée 6.000 396.000 stock final 2.000 65 130.000
8.500 552.500 8.500 65 552.500
coût de revient
galerie NORMALE
Libellé | Quantité | Prix d’unitaire | Prix total |
Stock | 5.000 | 48 | 240.000 |
Charges directes | 5.000 | 4 | 20.000 |
Coût de revient | 5.000 | 52 | 260.000 |
Galerie LUXE
Libellé | Quantité | Prix d’unitaire | Prix total |
Stock | 6.500 | 65 | 422.500 |
Charges directes | 6.500 | 4 | 26.000 |
Coût de revient | 6.500 | 69 | 448.500 |
4.4 Le résultat analytique
Il est égal à différence entre les ventes et les coûts de revient de chaque produit.
Exemple:
Galerie NORMALE
Chiffre d’affaires | 5.000 | 56 | 280.000 |
- coût de revient | 5.000 | 52 | 260.000 |
Résultat analytique | 5.000 | 4 | 20.000 |
Galerie LUXE
Chiffre d’affaires | 6.500 | 66 | 429.000 |
- coût de revient | 6.500 | 69 | 448.500 |
Résultat analytique | 6.500 | -3 | -19.500 |
4.5 Concordance entre le résultat analytique et résultat comptable
On établit conformément aux règles du plan comptable général le compte de résulta analytique et comptable, et on explique la différence par un tableau de concordance qui reprend l’ensemble des distorsions, à savoir : éléments supplétifs incorporés en CAE, différences d’inventaire, différence d’incorporation liée à des arrondis lors des calculs de coûts.
4.6 Analyse des résultats
Le résultat analytique doit être commenté, analysé et cette réflexion doit aboutir à des décisions stratégiques, par exemple : abandon d’un produit, mise en place d’une campagne de promotion sur un produit particulier, modification de la politique de prix, mais aussi la recherche dans les différents ateliers des niveaux de productivité et de gains possibles par des améliorations de la politique de production.
Le calcul du coût de production dans une entreprise industrielle ou de service peut poser le problème de l’évaluation des encours et des déchets.
5.1 Problème des encours
Lorsqu’on détermine des coûts par période, il existe généralement en fin de période des produits en cours de fabrication. Le problème est d’évaluer les frais engendrés : les produits commencés et terminés et les produits commencés et non terminés. Le partage des charges se fait en fonction de normes techniques fournies par les responsables d’atelier. En ce qui concerne les matières premières, on a tendance à considérer qu’elles sont injectées en début de cycle et que donc la valeur de l’encours contient la totalité des matières premières nécessaires à la fabrication d’un produit. En ce qui concerne la main d’œuvre et les frais d’atelier, il faut évaluer le temps passé sur les encours en fonction du stade d’avancement. L’évaluation globale de la production se fait donc de la manière suivante :
Total des charges de production de la période
+ Valeur des encours début de période
- Valeur des encours fin de période
Coût de production des produits terminés
5.2 Evaluation des déchets et rebuts
On appelle déchet un résidu de fabrication constitué par des éléments de matières premières, ou des impuretés se dégageant de la fabrication.
On appelle rebut des produits finis impropres à l’usage prévu car ne respectant pas le seuil de quantité minimum.
Le traitement analytique de ces éléments dépend de leur catégorie. On distingue le fait qu’ils soient ou pas réutilisables et le fait que leur traitement fasse ou pas supporter un coût à l’entreprise.
Réutilisables | Non réutilisables | ||
En l’état | Après traitement | L’évacuation a un coût | L’évacuation n’a pas de coût |
En diminution du coût de production la valeur du prix de revente (diminuée des frais de distribution et de la marge bénéficiaire) | En diminution du coût de production la valeur du prix de revente (diminuée des frais de distribution, de la marge bénéficiaire et du coût du traitement) | Le coût d’évacuation est rajouté au coût de production | Rien à faire |
La méthode des coûts complets permet de répondre à 3 principaux objectifs :
- calculer et donc connaître des coûts
- déterminer des résultats analytiques
- connaître en permanence la valeur des stocks
La CAE en coûts complets permet de répondre d’une manière satisfaisante à ces objectifs. Cette méthode passe par une définition précise des objectifs. Si les moyens nécessaires sont mis en œuvre dans l’entreprise, les résultats pourront être considérés comme fiables et analysés dans cet esprit. Il faut néanmoins que le service de contrôle de gestion ait à sa disposition toutes les informations dont il a besoin à l’instant où il en a besoin et avec un degré de fiabilité satisfaisant. Ceci repose sur une mise en place du contrôle de gestion dans laquelle le personnel a été sensibilisé aux objectifs et de laquelle il ne ressort pas la notion péjorative de contrôle-sanction qui pourrait aboutir à des résultats délibérément forcés.
Ce phénomène est le premier inconvénient du contrôle de gestion. Le deuxième inconvénient réside dans la construction même de la méthode. La répartition des charges indirectes repose sur des unités d’œuvre choisies parce que représentatives de l’activité du centre. Il est possible qu’une autre personne chargée de définir ces unités d’œuvre n’ait pas fait le même choix, il en résulterait automatiquement une répartition différente des charges donc une valeur moyenne des coûts, donc des résultats analytiques et des choix stratégiques différents. Dans la mesure où une méthode aboutit à des résultats qui peuvent être aussi facilement critiqués elle devient elle-même critiquable . Par ailleurs, on a vu que le système des coûts complets était un système lourd dans la définition de ses objectifs et dans sa mise en place.
On a vu aussi qu’il n’existait pas ou peu de dimension prévisionnelle dans la méthode des coûts complets. Il n’est donc pas possible de gérer des prévisions de rentabilité dans le cadre de commandes régulières ou de commandes marginales.
Pour finir, la méthode des coûts complets repose sur un niveau de production ce qui entraînera une hausse des coûts unitaires les mois où la production sera plus faible, et inversement les autres mois.
Il ne s’agit pas de renoncer aux coûts complets, il s’agit seulement de relativiser leur intérêt et d’être bien conscient que dans le cadre d’une gestion prévisionnelle de l’entreprise cette méthode n’est pas adaptée, il nous faut donc trouver autre chose.
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