Document de cours a propos de la strategie commerciale digitale
Document de cours a propos de la stratégie commerciale digitale
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Aujourd’hui, quasiment tout le monde utilise Internet et le téléphone mobile, pour ne citer que ces deux « médias » digitaux majeurs. Pourtant, de nombreuses marques et entreprises ont des difficultés à avoir une stratégie digitale claire et efficace, comme nous l’avons vu dans l’article précédent. Car pour pouvoir construire une stratégie digitale, l’expérience individuelle et/ou opérationnelle ne suffit pas : démarre-t-on la construction d’un immeuble directement avec l’ingénieur ou le décorateur ? Non, mais en élaborant un projet d’architecture globale. Le web répond aux mêmes lois ! Il faut commencer par avoir une vision stratégique d’Internet et des médias digitaux, c’est-à- dire avoir une hauteur de vue qui permette de :
- saisir l’essentiel et d’éliminer le périphérique
- de mettre en relation et en perspective les différents moyens et canaux d’action, digitaux ou pas
- et de pouvoir partager cette vision avec l’ensemble des intervenants pour qu’un travail commun soit possible, qui ne repose pas uniquement sur l’expérience personnelle donc subjective de chacun.
Comment se représenter Internet ?
On parle généralement d’Internet comme d’un média ou d’un canal de distribution, et c’est ainsi que la majorité des gens le conçoivent. Pourtant, cette vision d’Internet en occulte une grande partie des richesses, et n’aide pas à sa compréhension globale. Car un média ou un canal, c’est un support intermédiaire, qui certes permet la communication et l’interaction entre 2 parties, l’émetteur et le récepteur, qui peuvent ensuite agir en conséquence, mais ce n’est pas un lieu d’actions en lui-même.
Or Internet n’est pas qu’un intermédiaire, c’est un lieu de vie et d’actions qui est aussi une fin en soi pour beaucoup de ses utilisateurs. C’est d’ailleurs cela qui crée souvent la confusion pour les annonceurs : quand est-ce qu’Internet est un outil pour atteindre un but qui se trouve peut- être ailleurs, et quand est-ce que c’est une fin en soi ? Nous proposons plutôt de considérer Internet comme un ESPACE, lieu de vie virtuel à trois dimensions parfaitement comparable à l’espace physique qui nous abrite. De fait, comprendre les lieux et le fonctionnement d’Internet devient beaucoup plus simple, car comme tout espace ou pays, Internet est fait d’un ensemble de LIEUX (sites) reliés entre eux au sein desquels les gens circulent (naviguent), communiquent et agissent. Sites, blogs, portails, forums, réseaux sociaux, wikis, listes de diffusion, plateformes… sont autant de boutiques, maisons, studios, locaux, centres commerciaux, bibliothèques, carrefours de circulation, cafés, parcs et places publiques sur Internet ! Connaître un espace et y habiter ne signifie pas le connaître par cœur, dans tous ses recoins et tous ses acteurs; cela veut dire en avoir une vision globale, comprendre ses principes, être capable de s’y repérer, connaître ses habitants et leurs usages pour tirer le meilleur parti de son installation. Le reste dépend de la pratique individuelle et des besoins de chacun: chacun se crée sa carte, son espace de vie et ses habitudes, comme dans la « vraie » vie.
Pour une entreprise, les questions-clés auxquelles cette vision doit pouvoir répondre sont :
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Cartographie de l’espace Internet : quels sont les lieux de l’Internet ?
Si Internet est un espace, nous devons pouvoir le représenter de manière schématique comme sur une carte, pour comprendre l’organisation des lieux et savoir s’y repérer. Comme en cartographie, c’est l’objectif d’utilisation de la carte qui va déterminer le choix des critères à représenter.
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Limites de l’espace Internet et rôle du mobile
Nous considérerons dans cette analyse tout l’espace digital connecté comme Internet (ou le web, pour faire un abus de langage courant), incluant donc aussi toute connexion en mobilité à partir de quelqu’appareil que ce soit, et les applications mobiles au sens large. Notre angle n’est pas strictement technique mais plutôt un angle d’usages pratiques qui correspond à la manière dont le consommateur moyen peut concevoir Internet. Dans cette approche spatiale, le rôle du mobile prend un éclairage particulièrement intéressant qui se visualise de manière assez limpide et évidente: comme un PONT entre l’espace Internet « online », et l’espace physique « offline » (cit. Osama Bédier, VP Paypal). Quelque soit l’endroit physique où nous nous trouvons, le téléphone mobile surtout sous sa forme évoluée de smartphone, permet d’accéder à Internet instantanément, et de naviguer entre l’espace « connecté » et l’espace « réel » : que ce soit via l’accès à Internet mobile par le navigateur du téléphone, ou via une application elle-même connectée à Internet, ou des fonctionnalités du téléphone telles que la possibilité de photographier un code barre ou de scanner une image, qui vont permettre ensuite d’accéder à Internet plus ou moins directement ou d’envoyer un email, etc… qui va permettre ensuite une autre action ou décision dans la vraie vie !
Typologie des lieux Nous allons utiliser le critère de classement le plus habituel sur Internet, qui se fait selon la fonction ou fonctionnalité dominante des sites, les deux se mélangeant allègrement parfois.
- Site web : le site web « par défaut », quand il n’a pas de fonctionnalité particulière, est l’équivalent dans la vraie vie d’un bâtiment ou d’un immeuble générique, auquel on accole un adjectif pour en préciser la fonction (immeuble d’habitation, immeuble de bureaux…) tout comme on le fait pour les sites de manière générale (site d’informations, site de marque, site ecommerce…). L’utilisation du terme « site » sous-entend néanmoins un contenu structuré répondant à un objectif précis de la part de l’émetteur, qui est plus souvent une entreprise qu’une personne (par opposition aux blogs). Malgré le développement des CMS (systèmes de gestion de contenu) qui en facilitent la gestion, un site garde une image relativement « durable » et un peu « figée », d’une construction qu’on ne change pas tous les jours et qui a des fonctions et une image précises.
Les marques ont eu tendance à essayer de contourner cette contrainte en créant de nombreux sites « éphémères », correspondant généralement à des campagnes de communication ayant une durée de vie limitée. Cette manière de procéder reflète bien la vision (limitée, de média uniquement) que beaucoup de marques ont (ou ont eu) d’Internet, car la création de sites éphémères pour des campagnes est la transposition sur le web d’une logique de médias traditionnels. En télé, une campagne bénéficie de l’audience du site sur laquelle elle est placée. Sur Internet, un site éphémère ne bénéficie d’aucun trafic s’il n’est pas relayé, le créer pour une campagne signifie tracer également tout le réseau routier qui doit y mener, et dévier les internautes de leur chemin habituel pour les y emmener ! Or aujourd’hui, le site web d’une entreprise est davantage l’équivalent de son siège, de son show-room ou de sa boutique en ligne, qu’une simple affiche animée. Dans la vraie vie, quand une marque lance un nouveau produit, crée-t-elle des nouvelles boutiques éphémères pour cela (déviant le trafic de ses lieux de vente habituels), ou essaie-t-elle plutôt de maximiser son trafic habituel en « événementialisant » ses lieux de vente ? Pourquoi ne pas transposer cette logique-là sur le web plutôt, maintenant que les possibilités techniques facilitent considérablement la mise à jour des sites ? C’est d’ailleurs ce que plusieurs marques ont compris en installant leur site éphémère au sein de leur site de marque et en le dupliquant sur les principaux carrefours d’audience (dans leur page Facebook, sur les principaux sites médias ou de FAI…).
Dans la même logique de comparaison par rapport à la vraie vie, un site ou une application mobile se compare à une sorte de drive-in, ou à un distributeur automatique : un accès raccourci et concentré aux produits et services de la marque en situation de mobilité. Selon que l’on parle plus précisément d’un site mobile, d’une application, ou d’un site optimisé pour l’internet mobile, il ne s’agit donc pas nécessairement d’un lieu isolé en soi, mais d’un accès rapide vers un lieu déjà existant (le site web de la marque) ; ce qui conforte bien l’image de « pont » joué par le mobile entre réel et virtuel, et qui doit donc faire présider à toute stratégie mobile une réflexion sur les usages et les comportements de la cible de manière globale. Le téléphone étant, dans l’ordre d’intimité, l’appareil le plus proche des consommateurs (vs autres appareils connectés type ordinateurs, télés, tablettes...), c’est aussi celui où l’intrusivité des marques et l’inutilité des applications/services seront le moins bien tolérées. Pour être durablement convié dans cet univers restreint, il faut montrer patte blanche… ce qui veut dire un haut degré d’utilité pour le consommateur, que ses motivations soient de l’ordre de la praticité ou de la détente. Ce qui correspond à la même logique dans la vraie vie : toutes les marques ont-elles intérêt ou légitimité à avoir des distributeurs partout ou un drive-in ?
- Blogs : un blog est un type de site particulier, qui correspond à une sorte de journal de bord personnel en ligne. Au départ essentiellement l’œuvre d’amateurs (la « blogosphère »), c’est aujourd’hui plus associé à un format qu’à un type d’auteurs, puisque les professionnels et les entreprises s’en sont emparé. Or un internaute attend quand même d’un blog qu’il ne soit pas un simple fil d’actualités de l’entreprise ou l’expression de sa posture de communication la plus « corporate », mais qu’il reflète des opinions, des points de vue, des expertises, qu’il soit ouvert aux commentaires et aux débats, et qu’il ait l’air d’être animé par des humains identifiables et pas par des entités anonymes…
Ce qui sous-entend une ligne éditoriale et une réflexion dans la durée, plutôt qu’une création en mode « campagne », qui risque de décrédibiliser la marque et de ne duper pas grand-monde en fin de compte. Inversement, bien utilisé et bien investi, c’est un outil de communication qui peut avoir de grands bénéfices pour une entreprise, puisqu’il permet d’ouvrir une fenêtre sur des expertises, une « humanité », une culture ou un état d’esprit qui ne transparaissent pas à travers les produits ou les campagnes de communication, et qui peuvent apporter de la légitimité, de la crédibilité, de la personnalisation, de la préférence de marque…
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- COMMENT AVOIR UNE VISION GLOBALE D’INTERNET ?
I.2. Les internautes : usages et motivations
Internet est devenu un outil de la vie courante pour la majorité de la population. Lister des usages qui se rallongent ne suffit plus pour comprendre les motivations des internautes, et peut même avoir l’effet inverse en donnant l’impression que les comportements se complexifient et que les tendances se remplacent à un rythme effréné, ce qui n’est pas vraiment la réalité, notamment dans un pays mature comme la France. Comment en tirer des conclusions « actionnables » pour une entreprise ? Tout comme la métaphore spatiale permet de saisir l’essence des lieux et comment ils s’articulent les uns avec les autres, il importe d’avoir la même hauteur de vue pour saisir les motivations fondamentales qui poussent les gens à utiliser Internet, comment ils procèdent pour y atteindre leurs objectifs et quels sont leurs critères de sélection. En croisant cela avec les objectifs des marques et des entreprises, cela permettra de définir le périmètre d’intervention de ces dernières ainsi que la stratégie de moyens et de contenus la plus adaptée.
Qui sont les internautes et quels sont leurs usages?
70% des Français sont internautes, dont 97% ont le haut débit à domicile. Leur profil se rapproche de plus en plus du profil de la population française en termes de représentativité des sexes (hommes vs femmes) et des CSP (même si les études et les interprétations varient selon les sources : TNS3 vs M@rsouin4, par exemple. La différence qui reste la plus significative entre la population des internautes et la population française est l’âge, les plus jeunes étant encore sur-représentés et les plus de 50 ans sous-représentés sur le web. La présence de la majorité de la population sur le web ainsi que la grande diversification des usages montrent surtout que ces critères ne sont plus vraiment discriminants (sauf peut-être pour les seniors, et encore…), puisqu’ils ressemblent de plus en plus à l’ensemble des usages de la vie réelle des gens, c'est-à-dire qu’Internet intervient dans quasiment tous les pans de notre vie.
Il faut noter également que contrairement à d’autres pays matures, l’équilibre de consommation des grands médias se maintient en France, le développement d’Internet n’empêchant pas la consommation quotidienne de télé et de radio (pour 57% des Français: source TNS). Les usages sont moins matures chez les mobinautes, le profil du mobinaute moyen correspondant à celui de l’internaute moyen des années 90 d'après Ipsos MediaCT5 : mais vu la croissance de la pénétration des smartphones (43,5 millions de Français soit 81% de la population ont un téléphone mobile, et un sur trois a un smartphone, 3 fois plus qu'il y a 2 ans d'après l'étude Mobile Consumer Insight / Médiamétrie6 d'avril 2011) et le développement des plateformes applicatives mobiles7 , la maturation des usages en mobilité va certainement se structurer assez rapidement, du moins pour les usages principaux et transversaux. A part donc sur des cibles spécifiques (seniors, mobinautes...), il faut trouver d’autres grilles de lecture des usages d'Internet pour en tirer des analyses utiles pour une entreprise ou une marque. Ce qui pose du coup la question suivante : sont-ce réellement les usages qui se multiplient, ou les fonctionnalités et les applications qui en s’enrichissant permettent d’utiliser différents outils et supports pour atteindre un objectif similaire ?
Tendances de fond et tendances de forme Qu’est-ce qu’un « usage » ?
Décomposons la notion pour voir ce qui la constitue : un usage est la réalisation d’une action régulière qui est motivée par un objectif final et réalisée par le biais d’un outil ou support. Si nous dissocions le fond de la forme, les dimensions principales d’un usage sont donc :
- Les types d’outils ou de supports = applications / services / sites utilisés (par exemple, un logiciel de messagerie instantanée vs un logiciel d’emails vs un réseau social, tous trois étant des outils permettant la communication entre différentes personnes)
- Les types de contenus et/ou de formats utilisés, qui répondent le mieux à cet objectif (vidéo, audio, texte, présentation téléchargeable ou pas…)
- L’objectif recherché, qui correspond à la motivation de l’internaute
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Cette lecture permet de prendre du recul car en dissociant le fond de la forme, on constate certes que certains usages se développent avec les possibilités techniques mais qu’en même temps d’autres déclinent ou se spécialisent, les internautes changeant en fait d’outil ou d’application pour continuer à atteindre le même objectif (et privilégiant aussi certains outils à d’autres en fonction de leur catégorie d’âge, tout simplement). Dans l’exemple ci-dessous, on voit par exemple une forte cannibalisation potentielle entre Facebook, Twitter, les outils de chat / messagerie instantanée et les SMS, qui peut expliquer le déclin de certains au profit d’autres. Par contre l’email en usage professionnel a peu de concurrents répondant à tous ses avantages, même si pour une réponse brève et immédiate ce n’est pas nécessairement le meilleur outil… La limite de la spécialisation étant directement liée à la capacité ou tolérance de l’être humain à gérer de nombreux outils plutôt qu’un nombre limité!
Quels sont les objectifs principaux sur Internet ?
Les études montrent souvent différents types de motivations des internautes, que chaque institut classe différemment selon ses propres critères qualitatifs (ex: TNS Digital Life8 vs Wave 5 de Universal McCann9 ). Quand on y regarde de plus près et qu’on croise ces motivations avec les sites qui font le plus d'audience sur Internet10, on se rend compte qu’on peut réunir toutes les activités sur Internet sous 4 grands types d’objectifs principaux: 1. La recherche d’informations et de renseignements : il n’y a qu’à voir le succès de Google, de Wikipédia ou des forums, pour citer 3 genres différents, pour comprendre que la recherche d’informations de quelque type et de quelque niveau de profondeur ou d’expertise que ce soit, est une des premières motivations d’utilisation d’Internet, sinon la principale. Le type d’infos recherché va varier selon l’âge, le sexe, la situation personnelle ou professionnelle, le besoin… mais la motivation de départ est bien la même dans tous ces cas.
- Le relationnel, rentrer en contact avec quelqu’un ou échanger avec : que cela s’incarne par de la messagerie instantanée avec des copains, un envoi d’emails ou des échanges sur Facebook, la dimension relationnelle est dominante sur le web par son interactivité, et encore plus sur le téléphone mobile, et ne doit pas se « limiter » à la sphère relationnelle personnelle. Inversement, il ne faut pas tout mettre sous l’adjectif « relationnel », comme les marques savent si bien le faire, c’est donc bien la motivation de départ de l’internaute qu’il faut regarder. La motivation souvent cataloguée « relationnelle » par les marques va en fait consister en une recherche d’informations ou de services, dans un objectif d’achat… n’oublions pas que l’objectif premier d’un consommateur vis-à-vis d’une marque, c’est quand même d’acheter et d’utiliser son produit ! Dans ce cas la dimension « relationnelle » n’est pas un objectif en soi mais un moyen de l’atteindre.
- La consommation au sens large et économique du terme, c'est-à-dire « l'action d'utiliser ou de détruire, immédiatement ou progressivement, des biens et des services, dans le but de satisfaire un besoin11 ». Sachant qu’il peut s’agir autant de consommation « payante » au sens habituel du terme, que ce soit sur Internet ou via Internet (e-commerce), que de consommation « gratuite » de biens et de services, comme le visionnage de vidéos sur YouTube, la lecture de blogs ou encore le fait de jouer à des applications gratuites de jeux sur mobile… tout cela rentre sous l’objectif de consommation. La recherche d’informations se fait très souvent dans un but ultérieur de consommation, le relationnel peut souvent être sollicité dans un but ultérieur également de consommation.
Selon la « casquette » de départ de l’internaute, le besoin de consommation ne sera pas le même et orientera le choix de l’activité, du support et du contenu : détente/"entertainment" vs professionnel, par exemple; immédiat pour se distraire, ou pour répondre à un besoin plus important comme un déménagement, etc. Selon le type d'écran ou d'appareil utilisé pour accéder à Internet (ordinateur fixe, portable, tablette, téléphone mobile, écran connecté…) et la posture de départ (posture physique : penché en avant en mode recherche, ou détendu en arrière en mode détente), le temps de consommation et les produits/services recherchés, la disponibilité (ou non) de l’internaute à d’autres sollicitations, de type publicité par exemple, ne sera pas la même : cet aspect est à creuser en fonction de la catégorie de produits de la marque. Par exemple une marque dans l’univers de l’entertainment ou qui utilise ce registre dans sa communication sera beaucoup plus légitime sur Facebook que d’autres types de marques, et y aura probablement plus de succès, car la motivation principale des internautes sur Facebook est le domaine privé et la détente, ils seront donc plus réceptifs à ce qui alimente leur motivation, et moins à ce qui la perturbe…
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- COMMENT AVOIR UNE VISION GLOBALE D’INTERNET ?
I.3. Les internautes, navigation et critères de sélection
Sur Internet, stratégie des moyens et stratégie de contenus sont intimement liés, et il est relativement inefficace de dépenser de l’argent pour attirer les internautes si le contenu de marque ou d’entreprise auxquels ils seront exposés n’a pas été pensé en adéquation. Pour ce faire, il ne suffit pas d’avoir une vision globale d’Internet et des usages des internautes. Il faut aussi comprendre la manière dont ils procèdent pour atteindre leur but et leurs critères d’arbitrage, car en fonction de leurs besoins, de la catégorie de produits/services recherchée et de leur expérience personnelle ils ne suivront pas forcément les mêmes « chemins » digitaux et ne seront pas réceptifs aux mêmes arguments.
Comment trouve-t-on son chemin sur Internet ?
La manière de circuler et de trouver une information sur le web est parfaitement comparable à la manière de circuler et de trouver son chemin dans la vraie vie14. Dans la vraie vie, il y a 3 grandes manières de circuler dans l’espace qui ont été étudiés et constatés en sciences sociales (source: « Consumer web search behaviour: diagrammatic illustration of wayfinding on the web » by Chris Hodkinson, Geoffrey Kiel & Janet R. McColl-Kennedy, University of Queensland, 2000): - La plus simple et facile à acquérir par l’expérience est la connaissance des « lieux » (« place knowledge »), c’est-à-dire la capacité de reconnaître des lieux précis comme l’entrée d’une ville ou un rond-point connu, etc. Quand on est perdu, on revient sur ces lieux qu’on connaît et qui deviennent des points de repère. Sur Internet, les lieux connus sont la page de départ de l’internaute, qui s’affiche par défaut quand il ouvre son navigateur (généralement la page du FAI, ou Google sur un ordinateur, les applis sur un iPhone...) et les principaux sites qu’il utilise (moteur de recherche, réseau social, messagerie, principaux portails…). Quand un internaute se « perd » sur Internet, il reprend ses repères comme dans la vraie vie et revient à un lieu connu pour relancer une nouvelle recherche, qui est souvent son moteur de recherche préféré. Cette façon de procéder est particulièrement importante à comprendre car elle éclaire la manière dont toute recherche débute : or un nombre relativement limité de sites concentre une très grande part de l’audience en France : Google, les portails et les réseaux sociaux15 !
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Quels sont les critères d’arbitrage et de décision des internautes?
Tracer de belles routes ne suffit pas tout à fait à faire venir les internautes, encore faut-il les convaincre de venir chez soi plutôt que chez les autres. Reste donc à aborder les critères qui influent sur la décision des internautes et sur lesquels ils se basent pour arbitrer et faire des choix. Certains sont visibles dès la recherche de mots-clés dans un moteur (les éléments affichés par Google, par exemple), d’autres seront plutôt jugés « sur place » (quand l’internaute arrive sur le site). L’idée ici n’est pas de rentrer dans le détail mais plutôt d’aborder les grandes familles de critères, car la littérature abonde sur le web sur ces sujets.
Les qualités de la source: propriété des lieux et émetteur du contenu
L’absence de murs donne parfois l’illusion à certains qu’Internet est un espace ouvert et public, mais les mêmes règles y règnent que dans l’espace réel : il y a des lieux privés et des lieux publics, et les types de contenu ainsi que leurs qualités en dépendent fortement. Les internautes le savent ou le découvrent généralement assez vite, la transparence est donc la meilleure règle de conduite à adopter. Pour une marque ou entreprise cela signifie que le contenu émis par ses soins risque fort d’être considéré comme moins crédible que s’il est émis par une source externe, certaines sources étant considérées comme plus crédibles ou plus expertes que d’autres (en fonction des sujets et de l’expérience : médias, bloggeurs amateurs, forums de consommateurs, sources officielles, etc.). Avec l'expérience, les internautes se font leur propre appréciation de la qualité d'une source, et il ne faut pas généraliser trop vite en prétendant que les sources les plus fiables sont automatiquement les proches, ou les consommateurs. En fait, les internautes apprennent surtout à multiplier les sources pour valider leurs informations18. Dans les lieux où de multiples auteurs peuvent intervenir, la qualité affichée de l’auteur (sa fonction, son nom, son profil…) participent de cette crédibilité. Une entreprise qui laisse différents employés s’exprimer en leur nom propre sur son blog aura automatiquement plus de crédit que si c’est « admin » qui poste des informations au ton corporate…
C’est cette recherche de crédibilité qui préside à toutes les stratégies d’influence que les entreprises essaient de construire, avec plus ou moins de bonheur et de réussite en fonction de la qualité de l’approche et du temps investi. Contrairement à ce que beaucoup de marques croient, ce n’est pas en essayant de « contrôler » leur e-réputation19 et ce qui se dit de leurs produits/services qu’elles vont gagner en crédibilité et attirer plus d’internautes, c’est plutôt en répondant et en encourageant la libre parole des consommateurs et des employés (ce qui implique forcément de tenter de régler le problème plutôt que d’essayer de le cacher…). Cette posture présente de grands potentiels d’évolution en France, où il y a globalement une grande réticence ou inquiétude des entreprises au libre-échange avec les consommateurs et à laisser leurs employés interagir publiquement et ouvertement avec eux, malgré les réussites qui en démontrent l’efficacité incontestable (exemples: Best Buy20, Zappos21...).