Formation d’initiation a la finance islamique
Formation d’initiation a la finance islamique
1. Introduction
Les montants totaux des actifs conformes à la Charia sont impressionnants, dépassant le trillion de $ EU et augmentant à un rythme annuel de plus de 10 pour cent, même pendant la crise financière de 2008. Toute-fois, la désagrégation de ces chiffres révèle d’importants faiblesses et défis, notamment – et non des moindres – la dépendance excessive des services bancaires et de la finance islamiques vis-à-vis d’un nombre limité de marchés, ainsi que le caractère relativement sous-développé de ceux-ci sur les marchés des pays musulmans plus peuplés. La plus grande banque islamique au monde, en termes d’actifs, est Bank Melli d’Iran, un pays où toutes les banques respectent la Charia en vertu de la Loi sur les services bancaires exempts d’usure de 1983. Cependant, les sanctions imposées à l’Iran par les États-Unis et l’Union européenne ont eu une incidence négative sur le développement du secteur bancaire.
Ailleurs, ce sont des facteurs politiques nationaux qui freinent souvent le développement des services bancaires islamiques, en particulier en Afrique du Nord où d’aucuns ont établi un lien entre ces services et les mouvements politiques islamistes interdits. Bien qu’il soit trop tôt pour évaluer l’impact que le pouvoir du monde arabe aura sur la finance islamique, suite au renversement des régimes autocratiques des Présidents Moubarak et Ben Ali, la légitimation des mouvements politiques islamistes en Égypte et en Tunisie pourrait être considérée comme une évolution favorable pour la finance islamique.
Depuis les années 70, les pays du GCC ont connu le développement le plus rapide de la finance islamique, suite à la création de Dubai Islamic Bank en 1975 et de Kuwait Finance House en 1977. Au cours de la décennie précédente, notamment en 1963, l’Égypte a tenu lieu de laboratoire pour la première expérimentation de la finance islamique moderne, lorsque Mit Ghamr Savings Bank, une coopérative d’épargne et de crédit respectant la Charia dont les membres effectuent des dépôts qard hasan en échange du droit à des prêts à taux nul, a commencé ses opérations. Jusqu’en 1970, plus de 358 000 comptes avaient été ouverts à Mit Ghamr, ce qui témoigne clairement de sa réussite exceptionnelle en matière d’attraction des populations rurales égyptiennes.1 Les autorités ont mis fin à cette première expérience, car elles préféraient un système bancaire public dans le cadre duquel le financement serait alloué conformément aux priorités de développement du gouvernement plutôt qu’aux initiatives locales qui échappent à tout contrôle et peuvent tenir lieu de centres de pouvoir économique de rechange, en particulier lorsque le processus d’accumulation du capital est influencé par des idéaux islamiques.2
L’auteur a publié d’autres documents sur le développement de la finance islamique au sein du GCC.3 Plus récemment, il a publié un document dans lequel il établissait une comparaison entre les expériences relatives aux services bancaires islamiques en Iran et dans la Péninsule arabique.4
Les agitations sociales à Bahreïn ont une incidence sur le rôle du pays en tant que place bancaire islamique, notamment le risque d’une importante fuite de capitaux, au cas où les troubles persisteraient. Cette situation aurait des conséquences désastreuses pour l’île, compte tenu des maigres ressources dont elle dispose.5 Loin de spéculer sur les éventuels scénarios négatifs, le présent rapport a une perspective à plus long terme, traitant de la situation des pays qui sont au cœur du monde arabe et non de celle des pays périphériques.
Compte tenu de ce qui précède, le rapport met l’accent sur les pays arabes plus peuplés d’Afrique du Nord, où les services bancaires islamiques ont le plus de chances de se développer, en particulier si au moins une partie des forces populaires libérées milite en faveur d’un nouveau type de système financier qui soutiendrait les efforts d’entreprenariat et créerait des opportunités d’emploi, notamment pour les jeunes dont les besoins ont été souvent négligés par les anciens régimes.
Le modèle qui consiste à accroître le rôle de l’État par le truchement de la création d’emplois dans la fonction publique peut encore fonctionner dans les pays du Golfe moins peuplés et riches en ressources pétrolières et gazières. En revanche, il ne peut fonctionner dans un pays tel que l’Égypte dont la population dépasse 84 millions et dont la capacité de mobilisation de recettes fiscales est de plus en plus limitée. De toute évidence, il est impératif de créer un système économique différent dominé par le secteur privé et compétitif au plan inter-national. Un tel système est propice au développement de la finance islamique, car la plupart des banques islamiques efficaces sont des sociétés privées ou des entreprises cotées en bourse qui ont vocation à générer des dividendes pour leurs investisseurs. Il existe une demande du marché avérée pour les services financiers islamiques qui ne nécessitent pas l’intervention de l’État, mais simplement une réglementation leur permettant d’entrer en lice sur un pied d’égalité avec les banques classiques.
L’enseignement islamique reconnaît que le risque financier est inévitable, étant donné qu’il a toujours existé des cycles commerciaux et que les acteurs du marché, notamment les investisseurs, commettent souvent des erreurs. Le deuxième principe islamique exige que les risques commerciaux soient mieux partagés afin d’éviter d’imposer des risques excessifs à l’une des parties. Un accent particulier est mis sur la solidarité ou la fraternité, les uns partageant le fardeau des autres. La plupart des contrats financiers islamiques prévoient le partage des risques, les responsabilités liées à la propriété étant assumées par les investisseurs afin de justifier leur revenu. Le risque ne doit pas être pris pour le plaisir, comme c’est le cas avec les jeux de hasard ou masir interdits,7 mais doit servir une cause juste et sociale.
Le troisième principe financier islamique consiste à éviter les incertitudes contractuelles susceptibles de se traduire par l’exploitation de l’une des parties par l’autre. Ces pratiques constituent ce qu’il est convenu d’appeler gharar et qui est formellement interdit par l’enseignement islamique, tel que stipulé dans le Hadith, recueil des paroles et actes du Prophète.8 L’on estime que les accords verbaux ne sont pas satisfaisants, car ils entraînent souvent des litiges, les parties pouvant oublier les détails exacts des engagements pris. Les contrats écrits sont préférables, mais les formules trompeuses sont malhonnêtes ; d’où la nécessité d’établir des contrats clairs et transparents afin d’instaurer la confiance entre les différentes parties.9 On s’attend à ce que les parties aux contrats valables honorent leurs obligations contractuelles.10
2.1 Contrats financiers islamiques
Il existe une large gamme de contrats financiers isla-miques qui servent chacun une cause particulière et veil-lent à l’équité des dispositions pour tous les signataires. Il incombe au financier ou investisseur de veiller à l’utili-sation à bon escient des ressources en limitant le pou-voir discrétionnaire du bénéficiaire, l’objectif étant de garder un certain niveau de contrôle en vue d’éviter que le financement ne soit utilisé à des fins immorales. Les responsabilités contractuelles des parties atténuent les risques de corruption que favorisent les ambiguïtés et incertitudes. Les contrats financiers islamiques visent à assurer un niveau élevé de confiance entre les parties, réduisant ainsi les coûts de transactions à long terme et En cas de litige entre les parties contractantes, il incombe aux tribunaux nationaux de juger l’affaire, et non aux tribunaux de la Charia dont la compétence se limite aux affaires familiales et d’héritage dans la plupart des juridictions, notamment l’ensemble despays d’Afrique du Nord. En général, le contrat précise l’autorité compétente en cas de litige. Il s’agit souvent d’instances de juridiction anglaise telles que Dubaï International Financial Centre (DIFC), qui dispose de ses propres tribunaux11 et centre d’arbitrage.12 Ses textes prévoient des dispositions concernant les sociétés à vocation spéciale, notamment celles qui gèrent l’émission des titres islamiques (sukuk). Pour des raisons de pertinence, les contrats financiers islamiques sont rédigés, en général, par des cabinets spécialisés dans le droit commercial au nombre desquelles figurent essentiellement des entités internationales de pointe telles que Norton Rose13 et Simmons and Simmons.14
Afin d’assurer le respect de la Charia, les institutions financières islamiques mettent en place un comité d’au moins trois experts de la Charia qui examinent tous les contrats et proposent des amendements, le cas échéant, avant de donner leur approbation sous forme d’une fatwa ou décision.15 Dans certaines juridictions, notamment la Malaisie, le Pakistan ou le Soudan, les banques centrales mettent sur pied leurs propres comités. Toutefois, cette pratique n’a cours nulle part ailleurs dans le monde arabe où il n’existe, du reste, pas de systèmes nationaux responsables du respect de la Charia. Cette privatisation inéluctable du respect de la Charia se traduit souvent par des écarts en ce qui concerne les normes normalisation, celui-ci donne lieu à un débat salutaire et les clients sont libres, naturellement, de changer d’insti-tution financière islamique s’ils ne sont pas convaincus de la validité de la fatwa.
Dans la pratique, les contrats les plus courants proposés par les banques islamiques sont très similaires. Pour le financement des activités commerciales, la banque propose généralement un contrat de type mourabaha en vertu duquel elle achète les actions ou stocks au nom du client et les revend à celui-ci à un prix plus élevé qui comprend une marge bénéficiaire. Étant donné que les stocks appartiennent à la banque jusqu’à ce qu’elle les revende, celle-ci assume les risques liés à la propriété et si les biens revendus sont défectueux, le client est en droit de lui intenter un procès. Ainsi, les risques liés à l’achat sont partagés, ce qui justifie le bénéfice de la banque.16 En général, ces contrats sont valables pour une durée maximum d’une année, bien que des périodes plus longues soient parfois accordées, le client effectuant l’achat sous forme d’une série de paiements mensuels différés. Les différences entre les contrats reflètent, dans une large mesure, les besoins et situations des clients, et non des considérations liées à la Charia.
Les banques islamiques proposent de plus en plus les idjara ou contrats de bail. Dans le cadre de ces contrats, la banque possède un actif donné pendant la durée du contrat et le client paie un loyer.17 La banque assume les responsabilités liées à la propriété et, s’il s’agit d’un bien immobilier ou d’équipements, elle est tenue de prendre en charge l’entretien et l’assurance. Le crédit-bail qui transfère tous les risques au client est inadmissible au titre de la Charia. En revanche, l’idjara constitue un bail d’exploitation en vertu duquel les risques sont partagés.
Les banques islamiques assurent également le financement des partenariats sous forme de contrats moudaraba et moucharaka.18 Dans le cadre de moudaraba, seule la banque finance l’autre partenaire – l’entrepreneur ou le chef d’entreprise – qui apporte, en retour, son temps et ses efforts. Les bénéfices sont partagés, mais la banque, en tant que financier, assume la responsabilité de toutes pertes, étant donné qu’en cas de difficulté pour l’entreprise, le chef d’entreprise ne reçoit aucune rémunération. Par ailleurs, vu que l’autre partenaire n’a apporté aucune contribution au capital initial, il serait trop cruel de lui imputer la responsabilité des pertes. Les contrats de type moucharaka, au contraire, constituent une sorte de coentreprise en vertu de laquelle tous les investisseurs partagent tant les bénéfices que les pertes. Il n’est guère surprenant que les banques islamiques accordent la priorité aux contrats moucharaka pour le financement, utilisant les contrats moudaraba essentiellement pour les dépôts.
2.2 Avantages du développement des services bancaires islamiques
Il existe un important débat sur la question de savoir si le développement de l’intermédiation financière favorise le développement économique ou si le développement des banques est la résultante du développement économique. Les services bancaires islamiques sont essentiellement des services de détail qui satisfont, pour l’essentiel, les besoins des salariés. Ils tiennent lieu de moyens de paiement et permettent d’accorder un financement aux particuliers pour l’acquisition de véhicules et de logements.19 Ces services bancaires de détail peuvent être considérés comme une conséquence du développement économique et de l’émergence d’une classe moyenne relativement nantie, et non comme des services axés sur les projets de développement. En d’autres termes, les services bancaires islamiques de détail apportent une contribu-tion au volet « demande « des activités au sein de l’éco-nomie, mais sont moins pertinents pour l’investissement au titre du volet « offre « que le financement du dévelop-pement vise à appuyer. À cet égard, la BIsD et les banques islamiques d’investissement, qui peuvent as-surer le financement des projets de développement grâce à l’émission de sukuk et au financement syndi-qué, sont les institutions les plus indiquées.
Les services bancaires islamiques peuvent contribuer au développement de l’intermédiation financière pour autant qu’ils attirent les personnes réticentes à traiter avec les banques classiques qui ont recours aux transactions riba. Dans la pratique, cependant, nombre de ces clients de détail disposaient déjà de comptes bancaires. Par conséquent, les banques islamiques tiennent lieu de substituts aux banques classiques, plutôt que de mobiliser de nouveaux financements. En effet, nombre des clients qui effectuent des dépôts bancaires islamiques possèdent encore des comptes dans les banques classiques, l’attrait des banques islamiques tenant au fait qu’elles peuvent assurer un accès supplémentaire au crédit. En somme, bien que la croyance religieuse puisse être l’un des facteurs qui amènent les clients à recourir aux banques islamiques, les facteurs financiers n’en demeurent pas moins importants. La finance islamique est loin d’être l’apanage des pieux.
En ce qui concerne l’Afrique du Nord, le bien-fondé des services bancaires islamiques réside dans le fait que ceux-ci peuvent attirer des dépôts en provenance de pays situés en dehors de la région, notamment les envois de fonds des expatriés travaillant dans ces pays, y compris ceux du Conseil de coopération du Golfe (GCC). Des millions d’expatriés originaires de l’Égypte et, dans une moindre mesure, des pays du Maghreb ont travaillé en Arabie saoudite au cours des quatre dernières décennies. En dépit d’un ralentissement de la migration de la main-d’œuvre exerçant de petits métiers mal rémunérés dans le bâtiment, un nombre croissant de professionnels tels que les médecins et les avocats exercent dans le GCC et disposent tous de comptes bancaires. Plutôt que d’effectuer des transferts monétaires par le biais des bureaux de change, ils effectuent leurs envois de fonds de plus en plus par les canaux bancaires, notamment des banques islamiques opérant dans le GCC vers les banques correspondantes – respec-tueuses de la Charia – présentes en Afrique du Nord.
Les services bancaires islamiques peuvent renforcer les liens financiers mutuellement avantageux qui existent entre l’Afrique du Nord et les autres régions du monde musulman et promouvoir l’intégration économique. Étant donné que la majeure partie du capital entièrement libéré des banques islamiques opérant en Afrique du Nord a été mobilisée au sein du GCC, ces ressources représentent un flux d’investissement direct étranger. Par ailleurs, étant donné que la taille des marchés du GCC est limitée par des populations peu nombreuses, plusieurs institutions financières islamiques basées au sein du Conseil s’emploient à étendre leurs activités à d’autres marchés en créant des succursales et des coentreprises. Souvent, la publicité faite à travers le monde arabe par le biais des médias assure à l’avance la notoriété de la marque des banques islamiques auprès de la clientèle potentielle. Ainsi, les nouveaux venus sur les marchés de l’Afrique du Nord peuvent tirer parti d’un marché au moins partiellement informé. Un modèle de développement digne d’intérêt concerne Kuwait Finance House qui dispose à présent de plus de succursales en Turquie qu’au Koweït, mais ne dispose encore d’aucune filiale en Afrique du Nord.20 De même, Dubai Islamic Bank dispose d’un réseau de succursales en pleine expansion au Pakistan, tandis que Qatar Islamic Bank dispose de succursales à Kuala Lumpur, Beyrouth et Londres. En outre, cette dernière a signé en 2010 un protocole d’accord avec la Banque populaire-caisse d’épargne, deuxième groupe bancaire français le plus important, afin d’avoir accès aux services bancaires de détail français, ainsi qu’aux marchés des petites et moyennes entreprises.
L’Afrique du Nord offre d’importantes possibilités pour la microfinance islamique, compte tenu des niveaux de revenu relativement faibles et du manque d’emplois sûrs et réguliers dont souffre la majorité de la population. La plupart des citoyens ne disposent pas de comptes bancaires et n’ont aucune garantie à proposer pour obtenir un financement bancaire. Par le passé, c’était les prêteurs sur gage et les usuriers qui accordaient des crédits aux pauvres. Toutefois, les conditions relevaient souvent de l’exploitation, compte tenu du faible pouvoir de négociation des emprunteurs. Il s’ensuivait souvent un endettement chronique, les emprunteurs payant des intérêts nettement plus élevés que le principal du prêt. De toute évidence, les taux d’intérêt élevés des prêts s’expliquent par les risques encourus et les coûts liés à la gestion d’un nombre élevé de petits prêts. La micro-finance islamique peut atténuer ces difficultés, dans la mesure où elle comprend, en général, la création de coopératives d’épargne et de crédit dont les membres s’accordent mutuellement des créances sous forme de prêts qard hasan, la seule forme de prêt autorisée par la Charia, dans la mesure où aucun intérêt n’est perçu. Par ailleurs, la crainte d’abandonner leurs coreligionnaires, en cas de défaillance, incite fortement les membres de ces coopératives à honorer toutes leurs obligations.21
Afin d’attirer les membres, un don initial visant à mettre en place le fonds à partir duquel les membres peuvent tirer des ressources est nécessaire. L’une des conditions des prêts à taux nul est que les membres doivent effectuer des dépôts, en général pour des montants très modestes, dans le fonds. Non seulement cette condition assure la disponibilité de ressources, mais elle permet également de veiller à ce que les membres aient un sentiment d’engagement lié à la propriété. Les coûts de financement sont infimes, car les déposants ne sont pas rémunérés, ils n’ont droit qu’à des prêts ultérieurs. Des commissions de service sont prélevées pour les prêts afin de couvrir les coûts administratifs et de permettre aux institutions d’être autonomes. Ce type de système de microfinance islamique fonctionne à Hodeibah au Yémen et à Jabal al-Hoss en Syrie, et des systèmes plus développés sont gérés par des banques coopératives islamiques telles que Bank Rakyat en Indonésie.22 Il existe une expérience suffi-sante que peuvent mettre à profit les pays d’Afrique du Nord, si des propositions sont soumises en faveur de systèmes similaires en vue de mettre un terme à l’exclusion financière et de promouvoir la création d’emplois par le truchement du développement de petites entreprises.23
2.3 Critiques relatives au financement islamique
En dépit de plus de quatre décennies d’expérience des services bancaires et de la finance islamiques, l’industrie a ses détracteurs, tant musulmans que non musulmans. Il existe encore des débats concernant les questions fondamentales, notamment et – non des moindres – le point de savoir si les intérêts perçus par les banques modernes constituent effectivement riba.24 En outre, d’aucuns soutiennent que l’interdiction de riba était per-tinente pour les sociétés traditionnelles où les prêteurs sur gage prélevaient souvent des intérêts exorbitants, mais ne s’applique pas aux réalités modernes. Pour nombre de personnes, les taux d’intérêt ne constituent pas une forme d’exploitation lorsqu’ils sont modérés et maintenus à de faibles niveaux par la concurrence.
Par ailleurs, les coûts de financement imposés par les banques islamiques sont souvent plus élevés que ceux des banques classiques, ce qui favorise le sentiment que la finance islamique est onéreuse. Il existe, naturellement, le coût du respect de la Charia, auquel s’ajoutent les honoraires d’avocat liés à la structuration des produits qui augmentent les frais généraux. En outre, étant donné que le marché de la finance islamique est un segment différent du marché financier global, il existe moins de concurrence, le marché étant dominé souvent par une ou deux banques, tandis que dans le financement classique, il existe de nombreuses institutions qui sont en concurrence. Les coûts liés à la réglementation sont souvent plus élevés pour les banques islamiques, car si elles sont tenues d’émettre des bons du Trésor classiques au titre des exi-gences de liquidité de la banque centrale, elles doivent soit renoncer aux intérêts soit les accepter, mais les « purifier » en les reversant sous forme de don à des œuvres caritatives.
Il existe également une critique concernant les processus de respect de la Charia et une remise en question de l’indépendance et de l’intégrité des érudits qui siègent au sein des conseils de la Charia.25 Étant donné que ces experts de la Charia sont rémunérés par les banques pour lesquelles ils travaillent, il existe des risques de conflit d’intérêts, car d’aucuns estiment qu’il est peu probable qu’ils rejettent les produits financiers proposés dans ces conditions.26 Étant donné que certains experts de la Charia siègent au conseil d’admi-nistration de nombreuses banques, ils sont soupçonnés de ne pas consacrer suffisamment de temps à l’étude des questions et l’on craint que la confidentialité puisse être brisée lorsque ces experts siègent au conseil d’administration d’institutions concurrentes. En Malaisie, ces questions ont été résolues, les érudits de la Charia n’étant autorisés à siéger qu’au sein d’un seul conseil. En outre, un système d’accréditation est mis en place en vertu duquel ils doivent obtenir l’approbation de la banque centrale avant d’être nommés au sein du conseil de la Charia.27 Il n’existe aucun système comparable à celui-ci dans le monde arabe et en Afrique du Nord. Le Conseil des services financiers islamiques (IFSB), qui prodigue des conseils sur la réglementation des banques islamiques, a élaboré des directives sur le respect de la Charia, mais celles-ci ne sont pas obligatoires.28
Table de matières
3 Glossaire
4 Résumé analytique
10 1 Introduction
13 2 Justification de la finance islamique
2.1 Contrats financiers islamique
2.2 Avantages du développement des services bancaires islamiques
2.3 Critiques relatives au financement islamique
20 3 Aperçu des services bancaires et de la finance islamiques en Afrique du Nord
3.1 Raisons du sous-développement des services bancaire islamiques en Afrique du Nord
3.2 Aspects juridiques et réglementaires
25 4 Activités bancaires islamiques en Afrique du Nord
4.1 Égypte
4.2 Tunise
4.3 Algérie
4.4 Maroc
4.5 Libye
4.6 Mauritanie
29 5 Financement de projets conforme à la Charia
5.1 Financement islamique de projets en Égypte
5.2 Financement islamique de projets en Tunisie et Maroc
5.3 Financement islamique de projets en Mauritanie
5.4 Activités de la Banque islamique de développement en Afrique du Nord
35 6 Perspectives pour les instruments du marché financier islamique
6.1 Fonds gérés conformément à la Charia
40 7 Souscriptions privées et capital-risque utilisant moucharaka
7.1 Prises de participation privées en Égypte
7.2 Prises de participation privées au Maroc
7.3 Souscriptions privées conformes à la charia
43 8 Conclusions
45 Annexes : Études de cas relatives aux banques islamiques en Afrique du Nord
A.1 Égypte
A.1.1 Banque Faisal Islamique d’Égypte
A.1.2 Banque Al Baraka Égypte
A.1.3 Banque Al Watani Égypte
A.1.4 Succursales islamiques des Banques publiques Égyptiennes
A.2 Tunisie
A.2.1 Al Baraka Tunisie
A.2.2 Banque Noor Tunisie
A.3 Algérie
A.3.1 Banque Al Islamic
A.3.2 Banque Al Baraka Algérie
A.4 Maroc
A.5 Libye
A.6 Mauritanie