Economie politique : cours et exercices resolus
Economie politique : Cours et exercices résolus
INTRODUCTION
L’économie politique est la science qui étudie le comportement de l’homme vivant en société et guidé par la recherche du maximum d’efficience, dans son activité de production et de consommation face au problème d’affectation des ressources raresà usages alternatifs entre de besoins concurrents (E.WAUTHY).
C’est la science qui étudie comment les ressources rares sont affectées pour satisfaire les besoins des hommes vivant en société. Elle s’intéresse aux opérations essentielles (production-distribution-consommation des biens) ainsi qu’aux institutions et aux activités ayant comme objet de faciliter ces échanges.
Cet ouvrage s’adresse essentiellement aux étudiants et aux chercheurs en
Sciences Economiques et propose au lecteur une cure complète de l’Economie politique moderneen suivant une approche pédagogique adaptée à la réceptivité de l’étudiant en Sciences Economiques. Il a pour but d’initier l’étudiant en Sciences Economiques à l’analyse des problèmes économiques en utilisant un langage à la fois théorique, graphique et mathématique. Il s’agit là d’une combinaison de deux approches : l’analyse théorique et la recherche empirique.
L’Economie Politique est une science à la fois délicate et complexe. En rédigeant cet ouvrage, mon objectif est de rendre la compréhension de l’économie politique à la fois simple et aisée. Dans le souci de précision et de très grande clarté, de nombreux exemples et exercices illustrent le développement théorique au travers de différentes sections.
La curiosité intellectuelle peut amener un chercheur à publier un ouvrage dans un domaine où d’éminents Professeurs ont déjà consacré d’autres ouvrages. Cet ouvrage est conçu pour combler les insuffisances des enseignements d’Economie Politique dispensés dans les universités des pays en développement, en l’occurrence la République Démocratique du Congo, et qui ont minoré le rôle des mathématiques dans l’approfondissement des points clés du débat entre monétaristes et keynésiens.
Tous les économistes savent que l’analyse économique moderne se subdivise en deux branches : l’analyse microéconomique et l’analyse macroéconomique.
Ce livre couvre tout le domaine de l’analyse économique en présentant systématiquement, en un nombre de pages relativement réduit, l’essentiel de ce qui est nécessaire de connaître. Au départ, je propose une analyse micro-économie basée sur un examen détaillé des comportements des agents individuels en tant que « homo oeconomicus ». Cette analyse montre comment des échanges libres entre agents économiques rationnels (ou égoïstes) conduisent à une situation d’équilibre, c’est-à-dire une situation où chacun obtient exactement ce qu’il veut en fonction de ses calculs rationnels et de l’information qu’il détient. Dans la seconde partie, j’intègre l’analyse macro-économique qui s’attache aux grandeurs globales ou « agrégats ».
Loin d’intégrer tous les aspects de la macroéconomie moderne, cette partie analyse les modèles de détermination du revenu national, le rôle de la monnaie dans l’économie, l’inflation et le chômage. L’analyse des biens publics et externalités permettra aux étudiants à penser comme des économistes et, de ce fait, à s’engager dans le débat sur la politique économique. A la fin de l’ouvrage, de nombreux exercices résolus permettront au lecteur de procéder à un contrôle individuel de connaissances.
PARTIE 1. ANALYSE MICROÉCONOMIQUE
Cette partie porte sur l’analyse micro-économique. Celle-ci a pour objet l’étude des comportements des agents économiques individuels (consommateurs ou ménages, producteurs ou entreprises) et de leurs relations sur les différents marchés où s’échangent les produits et les facteurs de production. La célèbre « loi de l’offre et de la demande » est un instrument privilégié de ces échanges ou rencontres.
Le chapitre 1 aborde quelques concepts fondamentaux. Ces concepts sont nécessaires pour une bonne compréhension du contenu de cette partie. Le chapitre 2 analyse le comportement du consommateur à partir des deux approches de l’analyse de l’utilité. Le chapitre 3 met l’accent sur le comportement économique du producteur, en passant en revue la théorie de la production et son développement récent, le coût de production, ainsi que la combinaison optimale des facteurs de production. Les chapitres 4 et 5 proposent un examen détaillé du marché et la manière dont l’équilibre est réalisé dans les différents régimes, en insistant sur la taxation et la subvention. Enfin, le chapitre 6 étudie l’ensemble des modèles qui sous-tendent l’économie de l’information, spécialement le modèle principal-agent et l’asymétrie informationnelle.
CHAPITRE 1. QUELQUES CONCEPTS FONDAMENTAUX
Chaque science a ses concepts et expressions nécessaires à sa théorisation. C’est ainsi que nous commençons cet ouvrage par une discussion sur quelques concepts fondamentaux. Nous allons examiner, dans ce chapitre,la notion de rareté et de besoins économiques (1.1), les biens économiques (1.2), l’utilité (1.3), la valeur (1.4) ; ainsi que les grandes phases de l’activité économique (1.5), les grands pôles d’économie et la politique économique (1.7).
1.1. Notion de rareté et besoins économiques
L’activité humaine présente un aspect économique lorsqu’il y a lutte contre la rareté. En effet, tout homme a des besoins ; c’est-à-dire des désirs de disposer des moyens capables de faire cesser des sensations de peine ou d’insatisfaction. De ce fait, le besoin peut être défini comme toute sensation d’insatisfaction qui ne peut être effacée qu’au prix d’une consommation.
C’est le manque d’une chose utile, nécessaire et agréable. Il y a plusieurs sortes de besoins. D’une manière générale, on distingue : - Les besoins physiologiques ou vitaux (ceux dont la satisfaction est capitale pour survivre) : besoin de manger, besoin de se vêtir, besoin de se loger, …
- Les besoins semi-vitaux : besoin de boire l’alcool, besoin de boire un sucré, …
- Les besoins intellectuels et culturels : besoin de s’instruire, besoin de voyager, besoin de lire, …
- Les besoins moraux et religieux : besoin de prier, besoin de se dévouer à une divinité, …
- Les besoins psychologiques : besoin d’affection, besoin d’estime etc.
Parmi les différents besoins que le consommateur peut éprouver, l’analyse microéconomique ne s’intéresse qu’aux besoins économiques. Le besoin économique est un besoin qui peut être satisfait par une opération économique. Avoir envie de voyager dans le temps n’est pas un besoin économique car il s’agit d’un désir qui ne peut être assouvi. En revanche, avoir envie d’un pain est un besoin économique car il peut être assouvi par la consommation de ce pain. Avoir besoin de faire l’amour n’est pas un besoin économique, car il ne peut être satisfait par une opération économique. L’analyse microéconomique suppose que la satisfaction de tout besoin économique exprimé par un consommateur se réalise par la consommation d’un bien dont le seul mode d’acquisition est l’achat libre et volontaire sur un marché.
De tous les besoins, ce sont surtout les besoins physiques et matériels (vitaux et semi-vitaux) qui sont considérés comme besoins économiques.
Les besoins économiques sont :
- Illimités : on n’en aura jamais suffisamment ;
- Changeables : les besoins dépendent de la personne (enfant, adulte, femme, vieillard…), du lieu (ville, village) et du temps ;
- Subjectifs : les besoins d’un citadin diffèrent de ceux d’un villageois ;
- Satiables : leur intensité diminue au fur et à mesure qu’ils sont satisfaits ;
- Hiérarchisables : c'est-à-dire ordonnés selon les préférences d’un chacun et/ou d’après l’intensité avec laquelle chacun d’eux s’exerce sur nous.
1.2. Les Biens économiques
Les désirs ressentis comme des besoins constituent la raison et le but de l’activité économique. Les besoins sont multiples. Pour les satisfaire, on doit opérer un choix entre plusieurs biens et retenir ceux qui satisfont le mieux nos besoins.
Le pain est un bien car il satisfait notre besoin de manger. L’air est un bien, il satisfait notre besoin de respirer. Est considéré comme bien, toute chose apte à satisfaire un ou des besoins, ou toute chose ayant une utilité reconnue par l’homme. Cependant, tout bien n’est pas un bien économique. Les biens qui intéressent l’économie sont des biens économiques. Un bien économique peut se définir comme « tout bien rare parfaitement apte à satisfaire un besoin humain et dont l’acquisition entraîne des dépenses ».
Les biens économiques sont ceux qui satisfont les quatre conditions ciaprès :
- Ils sont aptes à satisfaire un ou des besoins ;
- Ils sont rares ;
- Ils sont en quantités limitées par rapport aux besoins ;
- Leur acquisition entraîne un coût (des dépenses).
Toute activité économique est orientée vers la production des biens et des services (biens non matériels) économiques. Il faut travailler ou faire une activité pour produire des biens économiques. C’est ainsi que la définition suivante d’un bien économique est retenue en microéconomie : un bien économique est un bien qui peut faire l’objet d’une production en série.
Cette définition (qui n’est pas la seule) a le mérite d’exclure à la fois les biens libres et les biens non reproductibles. Les biens libres sont les biens disponibles en quantité illimitée et à un prix nul et dont la jouissance procure une satisfaction qui n’est pas négligeable. L’air, l’eau d’une rivière, le sable sur une plage sont des biens libres. Ces biens ne font pas l’objet de transactions. Les biens non reproductibles, comme les œuvres d’art font eux aussi l’objet d’analyses spécifiques, dans la mesure où le rationnement de leur offre entre dans la définition même de ces biens. On peut classer les biens économiques selon leur utilisation ou usage. Aussi avons-nous, d’une part, les biens (économiques) de consommation (1.2.1) et les biens (économiques) de production (1.2.2) et, d’autre part, les biens substituables et les biens complémentaires (1.2.3).
1.2.1. Biens de consommation
Les biens de consommation sont des biens qui permettent la satisfaction immédiate du besoin d’un consommateur (comme un bien alimentaire ou un meuble). Ils ne satisfont qu’un seul usage, la consommation. Ils peuvent être non durables ou durables. Un bien non durable est un bien qui est complètement consommé après un seul usage (aliments, boissons, cigarettes, …).
Les biens durables sont ceux qui servent plusieurs fois la satisfaction du besoin correspondant (maison d’habitation, voiture, montre, vélo, vêtements, …).
1.2.2. Biens de production
Les biens de production sont ceux qui servent à la production des biens de consommation et ne satisfont les besoins du consommateur que de façon indirecte. Ils peuvent être non durables, comme c’est le cas de bois de chauffage (pour produire la nourriture), levure (pour la production du pain), huile de palme (pour produire du savon),… ou non durable, comme c’est le cas d’une machine à coudre, d’une scie, d’une pirogue, …).
Un bien est un output s’il est le résultat d’une production, quels que soient son état (fini, semi-fini, brut, élaboré, …). Lorsqu’un bien sert à la 16 production d’autres biens, quelque soit son état et son origine, le terme input est économiquement consacré. Notons qu’un bien peut être à la fois un bien de consommation et un bien de production.
C’est le cas d’une voiture qui peut servir à la consommation finale ou dans le processus de production. C’est aussi le cas du courant électrique qui peut servir à la consommation domestique ou dans le processus de production (pour faire tourner une usine agro-alimentaire, par exemple).
1.2.3. Biens substituables et biens complémentaires
Deux biens sont dits « substituables » s’ils peuvent satisfaire le même besoin, comme c’est le cas du beurre et de la margarine. Par conséquent, si le prix de l’un augmente, la quantité demandée de l’autre augmente aussi. Deux biens sont dits « complémentaires » si c’est la combinaison des deux biens qui satisfait un besoin, comme c’est le cas du pneu et de la chambre-à- air. Dans ce cas, l’augmentation du prix de l’un entraîne la diminution de la quantité demandée de l’autre bien.
1.3. L’utilité
Nous venons de voir qu’un bien, c’est toute chose ayant une utilité reconnue par l’homme. L’utilité est d’après C. MENGER, « la capacité que possède une chose de servir à la satisfaction des besoins humains ». Dans le cadre de ce cours, nous retenons la définition suivante : l’utilité d’un bien est l’importance qu’un individu accorde à ce bien à un moment précis de sa vie, à cause de la jouissance qu’il en attend. Et, c’est le besoin de l’homme qui donne à une chose son utilité et qui lui confère la qualité de bien.
L’utilité d’un bien est un concept qui est subjectif, car l’appréciation d’un bien varie selon les individus. Par ailleurs, l’utilité d’un bien dépend de la quantité de ce bien et de l’intensité du besoin à satisfaire. Le besoin étant satiable, son intensité diminue quand la satisfaction augmente. Ainsi, dans le même temps décroit l’intensité du besoin, décroît aussi l’importance du bien qui permet de le satisfaire. Comme on le verra dans l’étude du comportement du consommateur, le concept de l’utilité s’analyse au travers de deux approches : l’approche cardinale qui prétend que l’utilité est un concept mesurable et l’approche ordinal qui indique que l’utilité n’est pas un concept mesurable.
1.4. La valeur
D’après C. MENGER, la valeur est « l’importance que des biens particuliers ou des quantités de bien revêtent pour nous, parce que nous sommes conscient de dépendre de la disposition que nous en avons pour la satisfaction de nos besoins ». En se référant à l’utilité des biens dans un contexte de rareté, les néoclassiques ont pu réaliser l’unification des deux éléments de la valeur chez les classiques, à savoir : la valeur d’usage et la valeur d’échange.
D’après A. SMITH, père fondateur de l’économie politique, la valeur se rapporte à la valeur d’usage quand elle signifie l’utilité d’un objet, c’est-à- dire la faculté de satisfaire un besoin ou un désir : elle est particulière à un objet et dépend de l’appréciation individuelle ; elle est donc essentiellement variable (concept subjectif). A l’opposé, la valeur se rapporte à la valeur d’échange quand elle signifie la faculté que donne la possession d’un objet d’acheter d’autres marchandises : cette valeur est identique pour tous et est déterminée par l’offre et la demande (concept objectif).
Le lien entre l’utilité et la valeur d’un bien est bien traduit par Robinson J. quand il écrit : « l’utilité est la caractéristique des biens qui fait que des individus veulent les acheter, et les individus les achètent pour jouir de l’utilité procurée par leur consommation ». La référence à l’utilité comme fondement de la valeur permet aux agents économiques d’effectuer des calculs économiques rationnels.
1.5. Les grandes phases de l’activité économique
Il y a d’abord la « production ». Des biens et des services sont produits dans des cellules appelées « entreprises ». Doit être considéré comme production, non seulement la fabrication des biens matériels (voitures, frigo,…) mais également les services rendus par le médecin, l’avocat, le banquier, le professeur. La production est mise à la disposition des « consommateurs ». Ce type d’activité dépend de la « distribution ».
Celle-ci constitue un acte de production puisqu’elle doit être analysée comme un service rendu. Les activités de production permettent la distribution des « revenus » à tous ceux qui ont participé à la production. Au niveau de l’économie, la valeur de la production est égale à la somme des revenus distribués. Si tous les revenus distribués sont dépensés sous forme d’achats de biens et des services, on a alors une égalité entre la production totale (Y), les revenus (R) et la consommation (C).
De ce fait : Y = R = C. Cependant, cette représentation de l’économie est trop simplifiée. En effet, les entreprises réalisent des produits et investissent, de leur côté, les 18 ménages ne dépensent pas tout ce qu’ils gagnent, une partie de leurs revenus est destinée à l’épargne (S). Dans une économie fermée, sans intervention de l’Etat, on a l’égalité : Y = R = C + S. (1) Selon l’optique du produit, la production totale (Y) est dissociée en production de biens de consommation(C) et en production de biens d’investissement (I).
L’équation fondamentale de l’équilibre est donc : Y = C + I (2) De ces deux équations, on tire l’égalité entre l’épargne (S) et l’investissement (I). L’analyse approfondie de la notion du circuit économique intègre l’Epargne (S) et l’investissement (I). De plus, elle peut être étendue aux Pouvoirs publics et au Reste du monde. Ce qui permet de faire une analyse macroéconomique complète, permettant de déterminer l’équilibre. Dans une économie fermée, avec intervention de l’Etat, il y a trois utilisations possibles des biens et des services qu’elle produit.
L’identité du revenu national exprime ces trois composantes du PIB : Y = C + I + G Les ménages consomment une partie de la production de l’économie et utilisent, conjointement aux entreprises, une autre partie pour l’investissement, le solde étant acquis par l’Etat. Pour simplifier l’analyse, nous avons supposé qu’il n’y a pas d’échanges extérieurs.
1.6. Les grands pôles d’économie
En considérant une économie, on peut distinguer dans celle-ci les pôles principaux entre lesquels se nouent les relations économiques. Ces pôles permettent d’identifier les agents économiques. Il s’agit des Ménages (1.6.1), des Entreprises (1.6.2), de l’Etat (1.6.3), et du Reste du monde (1.6.4).
1.6.1. Les ménages
Le secteur des ménages (particuliers) regroupe tous les individus résidant dans le pays et considérés dans leur fonction de consommation, abstraction faite de leur participation à une activité productive quelconque (dans le cadre d’une entreprise individuelle). Ils offrent aux entreprises des facteurs de production (le travail) moyennant un revenu qui leur permet de consommer. En macroéconomie, ils sont saisis par l’agrégat « Consommation » ou consommation finale (C).
Ce dernier représente la valeur des biens et des services utilisés pour la satisfaction directe des besoins humains, individuels ou collectifs. Notons à cet effet que l’épargne (S) est la part des ressources (revenus) courants qui reste disponible pour accumuler des actifs physiques ou financiers.
1.6.2. Les Entreprises
Celles-ci sont des cellules qui produisent des biens et des services en vue de leur vente à un prix qui couvre approximativement leurs coûts. Elles sont saisies en macro-économie par l’agrégat « Investissement » (I). . On distingue les entreprises privées (Entreprises individuelles et sociétés commerciales et industrielles) dont la fonction principale est la production des biens et des services à but lucratif ; des entreprises publiques placées sous l’autorité de l’Etat et qui produisentdes biens et des services publics.
1.6.3. Les administrations
Elles sont souvent appelées « Etat » en macroéconomie. La fonction principale des administrations est la fourniture des services à but non lucratif. On distingue les Administrations publiques (Pouvoir public) et les Administrations privées (Partis politiques, syndicats, ONG, Associations sportives, Croix rouge, …).