Apprendre l’économie financière formation complet
Introduction
Les opérations financières intra groupe manifestent et rendent possible la solidarité entre les structures qui partagent le même objet. Cette forme de solidarité est essentielle à plusieurs égards. Elle permet en premier lieu d’assurer le développement, la consolidation de l’outil (le groupe d’entreprises) et du projet commun à toutes les structures (l’insertion par l’activité économique). Toutefois, consolider l’assise financière de l’ensemble ou plus simplement de l’une de ses entreprises exige de choisir judicieusement les opérations financières à réaliser. Deux critères essentiels doivent présider au choix de la nature et du type d’opérations financières. [ Les opérations adoptées doivent être pénalement, financièrement et fiscalement sans risque pour les structures et leurs dirigeants (directeurs, gérants, sociétaires, administrateurs …).
Toutes les opérations financières ne sont pas autorisées. Loin s’en faut ! Et celles qui ne le sont pas sont sources de risques pour les acteurs et pour leurs outils (SIAE). Les opérations autorisées s’avèrent relativement limitées quant à leur nombre et, celles qui le sont, sont étroitement réglementées. A cet état de fait s’ajoute que la forme juridique des personnes morales (commercial et associatif) n’est pas neutre pour procéder ou bénéficier d’une opération financière donnée. [ Elles doivent également être adaptées d’une part aux besoins financiers et aux capacités de remboursement des structures qui empruntent et, d’autre part, aux capacités de financement des « prêteuses ». Cette question sera traitée dans le détail au chapitre IV.
En premier lieu il nous faut retenir que les opérations financières possibles entre entités économiques sont étroitement encadrées par la loi bancaire et par les réglementations fiscales. Sortir de ces cadres définis par le législateur et par l’administration fi scale peut entraîner de lourdes sanctions.
f f f f Les risques pénaux.
La loi bancaire institue le principe du monopole bancaire quant aux opérations de crédit. Dit autrement, une opération financière qui revêt les caractéristiques d’une opération de crédit est de la seule compétence des établissements bancaires et financiers. Y contrevenir peut entraîner en premier lieu de lourdes sanctions pénales et en second lieu des sanctions financières. Les risques financiers. Ces risques concernent essentiellement le soutien abusif d’une structure par une ou plusieurs membres du groupe. Les risques fiscaux. Les opérations financières intra groupe mettent souvent en jeu des structures qui relèvent de deux régimes fiscaux différents : le régime commercial (imposition à l’Impôt sur les sociétés, Taxe sur la valeur ajoutée, Taxe professionnelle) et le régime associatif (Taxe sur les salaires). Certaines opérations financières intra groupe peuvent avoir des conséquences fiscales importantes sur les structures sous régime fiscal associatif (ex : la contamination de la fiscalité commerciale)
Les interdictions introduites par loi bancaire en matière d’opérations financières entre entreprises d’un même groupe Les opérations financières autorisées entre d’une part les personnes morales et les personnes physiques et, d’autre part, les personnes morales entres elles sont étroitement encadrées notamment par la loi bancaire Française du 24 janvier 1984. La loi impose une distinction essentielle qu’il faut constamment conserver en mémoire pour procéder à des opérations financières : [ Les opérations financières qualifiables d’opérations de crédit. [ Les opérations financières qui ne sont pas des opérations de crédit.
I.2.1. Les principes de la loi bancaire et le monopole des opérations de crédit. Les opérations qualifiables d’opérations de crédit sont de la seule compétence du secteur bancaire et financier. Il dispose en la matière d’un monopole. En dehors de quelques exceptions, seuls les établissements bancaires et financiers peuvent procéder à des opérations de crédit. Il est donc généralement interdit pour les entreprises, qu’elles soient sous une forme associative ou commerciale, et pour les personnes physiques d’effectuer de telles opérations. Tout contrevenant s’expose à des poursuites judiciaires pénales passibles de trois mois d’emprisonnement et à une amende de 375 000 €.
I.2.2. Ce qui qualifie une opération financière d’opération de crédit. Deux articles de la loi bancaire permettent de définir au sein des opérations financières celles qui relèvent du crédit.
[ L’article 3 de la loi défi nit une opération de crédit comme un « acte par lequel une personne (morale ou physique) agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à disposition d’une autre personne (morale ou physique) ou prend dans l’intérêt de celle–ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un cautionnement, ou une garantie... ». [ L’article 10 de la loi précise qu’il est « interdit à toute entreprise autre qu’un établissement de crédit de recevoir du public des fonds à vue ou à moins de deux ans ». L’article L 511-5 du code monétaire et financier précise, quant à lui, qu’il est strictement interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel. Nous retiendrons trois enseignements importants.
[ 1. Une opération financière qui par nature est une prestation (une opération réalisée à titre habituel) accompagnée d’un prix (je prête à la société Alpha 1 000 € sur deux ans à 5 %) relève du domaine du crédit. Ce prix est appelé taux d’intérêt. [ 2. Il est interdit d’emprunter pour ensuite prêter (intermédiation financière). Ainsi une structure A d’un groupe d’entreprises ne peut pas emprunter à une structure B pour ensuite prêter tout ou partie de ces fonds à un structure C.
[ 4. Les opérations financières qui ne sont pas qualifiables d’opérations de crédit ou de banque ne naissent généralement pas d’une opération d’intermédiation (emprunter pour ensuite pouvoir prêter) et elles ne peuvent pas être accompagnées d’un taux d’intérêt tel que les banques ou les institutions financières le pratiquent. Nous retiendrons toutefois que certaines opérations financières non bancaires peuvent supporter un intérêt ; comme nous le verrons ce taux est soit associé aux performances de l’entreprise (donc déterminé ex post) soit stipulé légalement. Dans ce dernier cas, le taux doit s’inscrire dans des limites réglementaires que l’administration fiscale publie chaque année.
1.3 Les opérations financières possibles qui ne relèvent pas du monopole bancaire Pour plus de clarté, nous présentons les opérations financières en faveur des structures selon deux entrées distinctes. [ Les opérations financières autorisées pour les sociétés commerciales : EURL, SARL, SAS et SA. [ Les opérations financières autorisées pour les associations. Lorsque nous désignerons sans distinction à la fois les associations et les sociétés commerciales, nous parlerons alors simplement « d’entreprises ».
1.3.1. Les opérations financières en faveur des sociétés commerciales.
1.3.1.1. Apports financiers pour la constitution d’un capital social ou une augmentation de capital.
Nous retiendrons également que : [ La détention d’une fraction du capital social confère à celui qui la possède un droit de propriété sur une partie proportionnelle de l’actif de la société et le droit de participer aux décisions collectives lors des assemblées ordinaires et extraordinaires. Le pouvoir de décision de chacun est généralement proportionnel à la fraction de capital détenue et il s’exerce grâce au droit de vote ; [ toute personne physique ou morale peut participer à la constitution ou à l’augmentation de capital sauf dispositions contraires inscrites dans les statuts de la société (clauses sur le contrôle d’entrée des nouveaux associés).
L’augmentation de capital est généralement l’occasion de faire entrer de nouveaux associés ou actionnaires ; [ chaque associé et actionnaire a droit à une part des bénéfices réalisés et distribués par la société. La décision de distribution et le montant de cette dernière sont arrêtés en assemblée générale ; [ la distribution de dividendes est une obligation si un actionnaire ou un associé la réclame de manière légitime. S’il n’y a pas de distribution des dividendes pendant de nombreux exercices très bénéficiaires, la non-distribution réitérée est susceptible de constituer un abus. Toute clause statutaire (inscrit dans les statuts sociaux) stipulant la non-distribution de dividendes sera jugée par les tribunaux comme non écrite (clause réputée léonine). [ les principes, les modalités de réalisation de ces opérations financières et les implications en matière de répartition du pouvoir de gouvernance entre les différents acteurs relèvent du droit des affaires. Pour plus de détails sur ces questions se reporter entre autre à « Organisation juridique et fiscale des groupes économiques solidaires », Coorace.
…
1.3.1.2. Les opérations financières en comptes courants d’associés.
Les comptes courants d’associés désignent les avances d’argent consenties aux sociétés commerciales par les associés ou actionnaires (personnes physiques et morales dont les associations), les dirigeants et les salariés. Bien que ces avances soient juridiquement considérées comme des prêts productifs d’intérêts, elles n’en restent pas moins autorisées par la loi bancaire au regard du lien particulier qui existe entre les « préteurs » et l’entreprise. C’est ce lien qui leur permet de bénéficier d’une exception et les autorisent à consentir un prêt à leur société. Ces avances sont généralement à plus de deux ans. Elles peuvent toutefois être à moins de deux ans.
Les seuls « personnes » autorisées a réalisé ses avances sont : [ l’associé unique de l’EURL ; [ les associés de SARL ou les actionnaires de sociétés par actions (SAS, SA) détenant au moins 5 % du capital ; [ les gérants, les administrateurs, les membres du Directoire ou du Conseil de Surveillance (SAS, SA) ; [ les salariés de l’entreprise dans la limite de 10 % des capitaux propres de la société. Les intérêts versés par la société aux préteurs (associés ou actionnaires) peuvent être déduits de l’Impôt sur les sociétés (IS) aux conditions suivantes : [ le taux appliqué doit se situer dans la limite réglementaire qui est la moyenne annuelle des «taux effectifs moyens» pratiqués par les établissements de crédit, pour des prêts aux entreprises à taux variable d’une durée supérieure à 2 ans ; [ si la totalité des avances (consenties sous forme de comptes courants) ne dépasse pas une fois et demie le montant du capital social ; [ si le capital social de la société a été totalement libéré.
Si les sommes prêtées le sont pour plus de deux ans, les partenaires bancaires intègrent ces comptes courants d’associés lors du calcul du fonds de roulement de la société. En effet ils assimilent ces comptes courants à des fonds propres de l’entreprise bénéficiaire (souvent qualifiés de quasi-fonds propres). Cette intégration améliore sensiblement ses capacités d’emprunt auprès de la banque. Mais pour bénéficier de « cet effet levier bancaire » des comptes courants, il est indispensable que les entreprises et / ou les personnes qui apportent les fonds et la société qui en bénéficie aient passé entre elles une convention qui stipule les conditions et la date de remboursement. Les prêts en comptes courants sont qualifiés de créances de dernier rang (pour celle ou celui qui prête). Ainsi, en cas de cessation d’activité de l’entreprise emprunteuses (dépôt de bilan), ils ne sont remboursés aux entreprises prêteuses qu’après désintéressement complet de tous les autres créanciers privilégiés (URSSAF, Salariés, fi sc…) ou chirographaires (fournisseurs) ;
…
I.3.1.3. Les prêts participatifs Les prêts participatifs sont des prêts à plus de 2 ans.
Ainsi, en cas de cessation d’activité de l’entreprise emprunteuses (dépôt de bilan), les prêts participatifs ne sont remboursés aux entreprises prêteuses qu’après désintéressement complet de tous les autres créanciers privilégiés (URSSAF, salariés, fi sc…) ou chirographaires (fournisseurs) ; [ en cas de redressement judiciaire par continuation de l’entreprise débitrice, le remboursement des prêts participatifs et le paiement des rémunérations prévues sont suspendus pendant toute la durée de l’exécution du plan de continuation.
…
I.3.1.4. Les avances de trésorerie au sein d’un groupe économique solidaire A son article 12-3°, la loi bancaire précise qu’une entreprise qu’elle que soit sa nature, peut « procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement et indirectement des liens de capital conférant à l’une des entreprises liées, un pouvoir de contrôle effectif sur les autres ». Autrement dit, en raison de cette exception autorisée, toute société de capitaux ayant une prise de participation dans d’autres sociétés de capitaux peut procéder avec elles et entre elles à des opérations de trésorerie ; voire centraliser leur trésorerie (mise en commun automatique de leur trésorerie). Si la loi autorise des opérations de trésorerie entre sociétés mères et filiales ou sous filiales (et vice versa), elle prend soin de définir les conditions nécessaires et à remplir pour rendre ces opérations de trésorerie licites. [ Les sociétés de capitaux doivent avoir entre elles un lien de capital direct ou indirect (fi gure 1). [ Une des sociétés de ce groupe doit avoir un pouvoir de contrôle effectif sur les autres (ex : avoir par exemple une part de capital suffi sante qui lui assure la majorité des voix aux conseils d’administration de ses filiales ou de ses sous filiales).
Table des matières
I. DE LA DISTINCTION ENTRE LES OPÉRATION FINANCIÈRES INTRA GROUPE QUI PEUVENT ÊTRE SOURCES DE RISQUES ET CELLE QUI N’EN SONT PAS ........................... 6
I.1 INTRODUCTION ............7
I.2 LES INTERDICTIONS INTRODUITES PAR LOI BANCAIRE EN MATIÈRE D’OPÉTATIONS FINANCIÈRES ENTRE ENTITÉS D’UN MÊME ENSEMBLIER .........9
I.2.1 Les principes de la loi bancaire et le monopole des opérations de crédit ................9
I.2.2 Ce qui qualifie une opération financière de crédit ............9
I.3 LES OPÉRATIONS FINANCIÈRES POSSIBLES QUI NE RÉLÈVENT PAS DU MONOPOLE BANCAIRE ......... 12
I.3.1 Les opérations financières en faveur des sociétés commerciales ...... 12
I.3.2 Les opérations financières en faveur des structures associatives ........ 21
I.4 SOUTENIR UNE STRUCTURE DE L’ENSEMBLIER QUI VA MAL PEUT ÊTRE QUALIFIÉ DE «SOUTIEN ABUSIF» ......... 24
I.4.1 : L’action de soutien abusif ..... 24
I.4.2 : Les risques associés au soutien abusif ....... 25
I.5 LES RISQUES FISCAUX ASSOCIÉS AUX OPÉRATIONS INTRA ENSEMBLIER ...... 26
II. LES FICHES DÉTAILLÉES DE PRÉSENTATION DES OPÉRATIONS FINANCIÈRES POSSIBLES ENTRE STRUCTURE D’UN MÊME GROUPE ÉCONOMIQUE SOLIDAIRE .................27
II.1 INTRODUCTION .......... 28
II.2 PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DES OPÉRATIONS FINANCIÈRES POSSIBLES ........ 30
II.2.1 : Sociétés commerciales 1 Sociétés commerciales ........ 30
II.2.2 : Sociétés commerciales 1 Structures associatives ....... 32
II.2.3 : Sociétés associatives 1 Sociétés commerciales .......... 34
II.2.4 : Personnes physiques 1 Structures commerciales ........ 36
II.2.5 : Personnes physiques 1 Structures associatives .......... 38
II.2.5 : Personnes physiques 1 Sociétés commerciales .......... 40
II.3 UN OUTIL DE SUIVI DES ENGAGEMENTS INTRA ENSEMBLIER ....... 42
III. LES OUTILS FINANCIERS EXTRA GROUPE ...44
III.1 INTRODUCTION .......... 45
III.3 OUTILS FINANCIERS À MOYEN ET LONG TERME ..... 51
III.3.1 : Les emprunts bancaires à moyen et long terme .......... 51
III.3.2 : Les opérations en capital ou en quasi-fonds propres.... 55
IV. OPTIMISER LA MOBILISATION DES OUTILS FINANCIERS POUR RENFORCER LA STRUCTURE FINANCIÈRE DU GROUPE ................ 64
IV.1 INTRODUCTION .......... 65
IV.2 LA MESURE DE LA SOLVABILITÉ D’UN ENTREPRISE .. 67
IV.3 LA MESURE DE L’INDÉPENDANCE FINANCIÈRE ....... 69
IV.4 LES OPÉRATIONS FINANCIÈRES INTRA ENSEMBLIER QUI PARTICIPENT À RENFORCER LA CAPACITÉ D’EMPRUNT D’UNE ENTREPRISE .............. 72
IV.5 LE CAUTIONNEMENT SOLIDAIRE COMME EFFET LEVIER POUR L’EMPRUNT BANCAIRE .. 73
IV.5.1 : Les cautions solidaires émanant de la solidarité interne au groupe économique solidaire .. 74
IV.5.2 : Les garanties d’organismes financiers spécialisés ....... 76
GLOSSAIRE ............ 80