Cours sur le commerce international et interprovincial au Canada
ÉVOLUTION COMPARATIVE DU COMMERCE INTERNATIONAL
ET DU COMMERCE INTERPROVINCIAL
La courbe en « L » ressort comme un fait empirique marquant dans la première section. Nous explorons plus à fond la relation entre le commerce intranational et le commerce international dans les sections suivantes à l’aide d’une décomposition par province et d’une désagrégation entre les biens et les services.
La courbe en « L »
Nos deux mesures de l’ouverture internationale et interprovinciale (INOP et IPOP, respectivement) sont les parts du commerce dans le PIB :
INOP = (importations internationales + exportations internationales) / PIB IPOP = (importations interprovinciales + exportations interprovinciales) / PIB
Les données de Statistique Canada se présentent en une série temporelle annuelle pour les dix provinces canadiennes couvrant la période 1981-20003. L’évolution idiosyncrasique relative des deux séries temporelles pour l’ensemble du Canada ressort plus clairement du diagramme de dispersion suivant (figure 1) qui met en relation les parts du commerce interprovincial et du commerce international.
Les observations dispersées sont reliées par une ligne continue afin d’illustrer leur évolution dans le temps4. Le cheminement historique débute dans le coin sud-est du diagramme pour se terminer dans le coin nord-ouest. L’évolution des deux parts du commerce dans le diagramme de dispersion révèle clairement deux périodes distinctes : 1) de 1981 à 1991, la part du commerce interprovincial dans le PIB a chuté continuellement et de façon (relativement) constante, tandis que la part du commerce international dans le PIB est demeurée à peu près constante; 2) de 1992 à 2000, la part du commerce interprovincial dans le PIB est demeurée à peu près constante, tandis que la part du commerce international dans le PIB a augmenté de façon continue et constante. Manifestement, la relation entre les deux variables représentant les parts du commerce semble avoir été perturbée vers 1991-1992 par une importante rupture structurelle.
Nous appelons ce fait stylisé la courbe en « L » pour décrire la forme en L du diagramme de dispersion. Nous décrirons ce phénomène plus en détail dans les sections suivantes en procédant à une désagrégation des flux commerciaux par province et par secteur.
Désagrégation par province
Les rapports de dispersion entre les deux variables représentant les parts du commerce des dix provinces sont présentés dans les figures 2, 3 et 4.
La forme en « L » qui caractérise la relation globale entre l’ouverture au commerce interprovincial et au commerce international semble déterminée principalement par les deux grandes provinces centrales, le Québec et l’Ontario. Dans ces deux provinces, les profils de commerce ont évolué de façon similaire et suivent la tendance canadienne. L’évolution comparative des liens commerciaux suit un sentier différent dans les régions périphériques.
Au début de la période étudiée, les quatre provinces de l’Atlantique étaient celles qui dépendaient le plus du commerce interprovincial. Dans cette région, les parts du commerce international et du commerce interprovincial ont diminué de façon marquée durant la période 1981-1991. Par la suite, la part du commerce international a augmenté tandis que la part du commerce interprovincial évoluait à peu près au même rythme que le PIB. Il est intéressant de noter que la plus grande partie de la baisse observée au Canada atlantique dans l’ouverture sur le reste du pays et sur le reste du monde coïncide avec la sévère récession de 1981-1983. La baisse de la part du commerce international dans le PIB durant cet épisode est particulièrement marquée dans le cas de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick.
Il y a peu de traits communs dans l’évolution des liens commerciaux des quatre provinces de l’Ouest. La Saskatchewan et la Colombie-Britannique sont les deux seules provinces canadiennes qui n’ont pas enregistré une baisse notable de la part du commerce interprovincial durant la période 1981¬ 1990. Après 1992 au Manitoba et après 1993 en Saskatchewan et en Colombie-Britannique, les parts tant du commerce international que du commerce interprovincial ont augmenté. Pour l’ensemble de la période, la baisse des parts du commerce interprovincial n’a pas été très importante dans ces trois provinces.
La situation est différente pour l’Alberta. Principal producteur de pétrole au Canada, cette province est la seule pour laquelle le diagramme de dispersion indique une relation négative entre l’évolution des parts du commerce international et du commerce interprovincial. En fait, l’Alberta est la seule province où les deux parts du commerce – INOP et IPOP – ont une corrélation négative (-0,11) au niveau des différences premières sur l’ensemble de la période. Pour les autres provinces, les corrélations sont positives et varient de 0,20 pour l’Ontario à 0,61 et 0,72 pour le Québec et Terre-Neuve, respectivement. Ajouté à l’analyse graphique du diagramme de dispersion, cette information clé illustre clairement que l’hypothèse du détournement de commerce (l’expansion du commerce international se serait faite en partie au détriment des échanges commerciaux interprovinciaux) pourrait être valable uniquement dans le cas de l’Alberta. Nous reviendrons plus loin sur ce point.
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Services c. biens
Une désagrégation du commerce entre les secteurs des services et des biens permet de mieux comprendre l’effet de la courbe en « L ». Nous avons calculé les mêmes indices de parts du commerce canadien pour les biens et les services en divisant les exportations et les importations de biens (services) par le PIB. Les résultats sont présentés à la figure 5.
Le diagramme de dispersion du commerce des services est tout à fait différent. Dans l’ensemble, le commerce international et le commerce interprovincial des services ont eu tendance à croître plus rapidement que le PIB sur l’ensemble de la période. Cependant, l’expansion du commerce interprovincial des services est survenue durant la période 1994-2000, tandis que l’expansion du commerce international des services s’observe principalement sur la période 1981-1994.
La figure 6 fait ressortir un autre fait stylisé intéressant qui soulève de nombreuses questions. Sur l’ensemble de la période 1981-2000, le commerce international des services est demeuré une fraction très modeste et stable du commerce international des biens. Ainsi, on ne perd que très peu d’information en concentrant l’attention uniquement sur les biens dans l’analyse de l’évolution du commerce international du Canada. Cependant, le tableau est très différent dans le cas du commerce interprovincial. Les échanges de services constituent une fraction importante du commerce des biens et la part des échanges de services a augmenté de façon substantielle sur la période. Comparativement au commerce international, le commerce interprovincial des services est beaucoup plus intense et l’écart s’est creusé avec le temps.
L’explication de ce fait stylisé sort du cadre de la présente étude, mais l’analyse simplifiée présentée dans ce chapitre est utile. Le phénomène de la courbe en « L » s’applique uniquement aux échanges de biens et non aux échanges de services. L’inclusion de l’information disponible sur les échanges de services dans l’analyse des profils du commerce international du Canada ne fournirait pas le fondement d’une hypothèse majeure. Cependant, ce n’est pas le cas du commerce interprovincial, où les échanges de services jouent un rôle important et croissant.
L’effet frontière, l’ALÉ et l’hypothèse du détournement de commerce
La courbe en « L » soulève de nombreuses questions en rapport avec l’explication économique des profils de commerce du Canada. Pourquoi la part du commerce interprovincial a-t-elle diminué dans les années 80? Pourquoi la part du commerce interprovincial est-elle demeurée constante dans les années 90 tandis que celle du commerce international augmentait? Pourquoi une rupture soudaine s’est-elle produite dans les profils d’échanges commerciaux au début des année 90? Quel rôle l’ALÉ a-t-il joué dans la courbe en « L »? Pour répondre à ces questions, il faut disposer de données sectorielles détaillées et procéder à la vérification économétrique de différents modèles structurels des échanges commerciaux. Bien entendu, cette tâche déborde largement les limites de la présente étude. Dans ce chapitre, nous nous intéressons à une question économique clé qui semble en contradiction avec le message plus direct émanant de la courbe en « L » : l’hypothèse du détournement de commerce. Cette hypothèse suppose que le commerce intranational est un substitut du commerce international. Si, par exemple, le commerce interprovincial était artificiellement stimulé par la structure tarifaire du Canada, la suppression des droits tarifaires provoquerait une augmentation du commerce international au prix d’une baisse correspondante du commerce interprovincial, dans le contexte de l’hypothèse du détournement de commerce.
À l’aide de ce modèle, Anderson et van Wincoop (2003) démontrent que les estimations de l’effet frontière habituel de type McCallum sont non symétriques. McCallum (1995) a mesuré l’effet des barrières commerciales sur les profils d’échanges entre le Canada et les États-Unis au niveau régional à l’aide d’un modèle gravitationnel du commerce. L’effet frontière est mesuré par le ratio du commerce interprovincial au commerce provinces-États pondéré (en fonction de la taille et de la distance). L’auteur a constaté qu’en moyenne, les échanges commerciaux entre deux provinces canadiennes étaient (en 1988) 22 fois plus importants que les échanges commerciaux entre une province canadienne et un État américain. Ce résultat a été reconnu par Obstfeld et Rogoff (2000) comme l’une des énigmes du commerce, et la question a été analysée attentivement et documentée dans une série d’études par John Helliwell5. Dans le présent chapitre, en groupant l’information temporelle et transversale contenue dans l’évolution des profils d’échanges commerciaux des provinces depuis 1980, nous montrons que le cadre théorique sous-jacent d’un détournement de commerce pur utilisé par Anderson et van Wincoop (2003) est clairement rejeté par les données canadiennes. Ce point est important dans le contexte des travaux publiés sur l’effet frontière parce que les bases de données canadiennes sur le commerce interprovincial et le commerce international ont été, dès le départ, au centre des études sur l’effet frontière utilisant des données réelles sur le commerce intranational.
La vérification empirique d’un détournement de commerce ou d’une création de commerce par suite de changements dans les barrières commerciales est un sujet qui retient depuis longtemps l’intérêt des économistes (Balassa, 1967). Divers modèles des échanges commerciaux peuvent engendrer un détournement de commerce. L’analyse empirique présentée dans ce chapitre n’est pas fondée sur un modèle structurel du commerce. Plutôt que de mettre l’accent sur un modèle structurel du commerce ou une famille de modèles, nous suivons une approche théorique en vérifiant directement la prévision d’un détournement de commerce à l’aide de l’information contenue dans les données temporelles et transversales regroupées sur les parts du commerce interprovincial et du commerce international dans les dix provinces canadiennes au cours de la période échantillonnée, soit 1981-2000.
Examen empirique sur le thème du détournement de commerce
L’analyse procède en deux étapes. Premièrement, nous combinons l’information temporelle et transversale regroupée (au niveau provincial) pour les dix provinces canadiennes sur la période échantillonnée (1981-2000) dans le but d’analyser la relation contemporaine qui pourrait exister entre la part du commerce international et la part du commerce interprovincial. Deuxièmement, nous appliquons un test de causalité de type Granger à ces deux variables afin de voir s’il existe une relation causale entre les deux.
Les résultats de cinq régressions sur le détournement de commerce sont présentés au tableau 1. Dans les deux premières régressions, l’hypothèse est vérifiée à l’aide des niveaux des variables IPOP et INOP. Dans les trois dernières régressions, l’hypothèse est vérifiée à l’aide des différences premières : d(IPOP) et d(INOP). Les parts du commerce interprovincial sont utilisées comme variables dépendantes. L’hypothèse du détournement de commerce suppose que l’expansion du commerce international a un effet négatif et significatif sur les parts du commerce interprovincial, pour les dix provinces canadiennes. Dans les cinq régressions, nous avons employé des effets fixes pour modéliser le fait que les provinces canadiennes suivent différentes tendances dans l’évolution des parts du commerce interprovincial.
À la première colonne, nous avons vérifié l’hypothèse du détournement de commerce pour les niveaux des variables en appliquant une méthode simple imitant l’approche économétrique transversale, en faisant abstraction des considérations temporelles. Dans ce premier cadre économétrique, nous ignorons l’importante rupture structurelle qui s’est produite vers 1991 dans la relation entre les parts du commerce international et du commerce interprovincial, saisie par la courbe en « L », et nous ne corrigeons pas pour tenir compte de l’autocorrélation. L’effet du commerce international sur la part du commerce interprovincial est négatif, important et très significatif (au seuil de 1 p. 100), et la régression a un coefficient R2 élevé, soit 0,87. Cet exercice illustre le risque que comporte la vérification de l’hypothèse du détournement de commerce en comparant le commerce interprovincial et le commerce international entre deux dates (par exemple 1988, qui est antérieure à l’ALÉ, et 1996, qui est postérieure à l’ALÉ, comme l’ont fait Helliwell, Lee et Messinger, 1999) sans tenir compte de la rupture structurelle de 1991. La corrélation négative entre le niveau des parts du commerce international et du commerce interprovincial au cours des périodes qui chevauchent le bris structurel laisse penser que l’hypothèse du détournement de commerce ne devrait pas être rejetée. La corrélation négative entre les deux variables est illustrée à la figure 7 par un diagramme de dispersion simple des deux variables comprises dans la régression par les moindres carrés ordinaires (MCO).
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Les quatre régressions suivantes sont fondées sur deux approches concurrentes pour résoudre les problèmes économétriques de la première régression en vue de vérifier l’hypothèse du détournement de commerce. Dans la seconde régression, nous procédons aussi à l’estimation de l’hypothèse du détournement de commerce à partir des niveaux des variables IPOP et INOP. Cependant, nous modélisons explicitement la rupture structurelle en introduisant une variable nominale (BR91) qui prend la valeur zéro avant 1991 et la valeur un par la suite, pour les dix provinces6. Nous corrigeons ensuite la corrélation sériale en introduisant un coefficient commun AR(1) (pour toutes les provinces) dans notre régression. Le résultat en ce qui a trait à l’hypothèse du détournement de commerce se trouve alors inversé! L’ouverture au commerce international a ici un effet positif et significatif (au seuil de 5 p. 100) sur les parts du commerce interprovincial. La variable BR91 représentant la rupture structurelle est négative et significative au seuil de 1 p. 100. L’erreur-type de la régression est beaucoup moins élevée que dans le premier cas : le coefficient R2 est de 0,98, tandis que le coefficient Durbin-Watson atteint près de 2. Manifestement, la régression (2) offre un bien meilleur ajustement que la régression (1).
Dans les régressions (3), (4) et (5), nous avons suivi une approche simple pour régler la question de la non-stationnarité en prenant les différences premières des deux variables du commerce. Dans la régression (3), le système a été estimé pour l’ensemble de la période 1981-2000. Nos avons répété la même régression pour les deux échantillons correspondant aux périodes 1981-1991 et 1991-2000, qui se divisent à la date du bris structurel dans la relation entre les niveaux des deux variables du commerce.
Pour les trois régressions utilisant les différences premières, l’hypothèse du détournement de commerce est fortement rejetée avec un effet positif, important et significatif (au seuil de 1 p. 100) du changement dans la part du commerce international sur le changement dans la part du commerce interprovincial. Fait intéressant, l’effet est plus marqué après 1991 qu’avant. Une augmentation de 100 p. 100 du commerce international entraîne une augmentation de 17,5 p. 100 et de 26,4 p. 100 du commerce interprovincial respectivement avant et après 1991.
Dans le modèle basé sur les différences premières, les paramètres des effets fixes estiment les tendances à long terme de la croissance annuelle de la part du commerce interprovincial dans l’hypothèse où il n’y a aucun changement dans la part du commerce international. Les estimations ponctuelles ne sont pas toutes statistiquement différentes de zéro. Cependant, elles sont toutes négatives et certaines sont fortement significatives. Pour l’Ontario et le Québec, la baisse persistante de la part du commerce interprovincial est significative au seuil de 1 p. 100. Pour Terre-Neuve, la diminution est significative au seuil de 5 p. 100. Dans le cas de l’Alberta, la baisse est significative au seuil de 1 p. 100 uniquement pour la période 1991-2000.
Les résultats pour la période 1991-2000 sont présentés au tableau 2. Il est intéressant de constater que l’hypothèse nulle d’une absence de causalité de type Granger est rejetée pour les deux relations (INOP causant IPOP, et l’inverse) dans les données agrégées sur le commerce, tant pour le Canada que pour le Québec. Les données sont plus partagées dans le cas de l’Ontario puisque l’hypothèse nulle ne peut être rejetée pour l’une des relations. Dans l’ensemble, les résultats semblent indiquer la présence possible d’une causalité simultanée (et positive, compte tenu des résultats de la régression (5) au tableau 1) entre le commerce international et le commerce interprovincial au Canada sur la période d’échantillonnage, soit 1991-20007.
Analyse : l’ALÉ
Un élément qui ressort de l’analyse comparative de l’évolution des liens entre le commerce interprovincial et le commerce international présentée dans ce chapitre est le fait que le choc structurel qui a perturbé la relation entre les deux voies commerciales n’a pas coïncidé avec l’entrée en vigueur de l’ALÉ. Ce choc structurel a influé sur les données entre 1991 et 1992, tandis que l’ALÉ a pris effet le 1er janvier 1989. Entre la fin de 1988 et 1991-1992, la relation entre le commerce interprovincial et le commerce international semble avoir continué d’évoluer conformément à la tendance générale observée durant les années 80 : une diminution du commerce interprovincial simultanément à une augmentation du commerce international à un taux similaire à celui du PIB.
DU COMMERCE NTERNATIONAL ET DU COMMERCE INTERPROVINCIAL
SUR LA CROISSANCE DES PROVINCES
Tel que souligné dans Aghion et Howitt (1998, section 11.6), il est très difficile en théorie moderne de la croissance d’isoler l’effet à long terme d’une expansion des liens commerciaux sur le revenu et le bien-être dans une économie. De nombreux facteurs dynamiques interviennent, par exemple l’accumulation du capital humain et matériel, le nivellement des prix des facteurs, les effets d’agglomération et les économies d’échelle, ainsi que l’avantage comparatif dynamique. Ben-David et Loewy (1998) ont ainsi constaté que les retombées de la connaissance découlant d’une intensification des échanges commerciaux ont un effet positif sur la croissance économique au cours du processus de transition et à plus long terme. Mais, sur le plan empirique, la plus grande partie de la recherche moderne s’intéresse à l’effet positif d’un accroissement du commerce international sur la croissance économique. Comme le montre Vamvakidis (2002), cet effet positif pourrait n’avoir joué qu’au cours des dernières décennies (depuis 1970). Auparavant, l’auteur n’arrive pas à établir l’existence d’une relation positive entre la croissance économique et les mesures du commerce pour un ensemble de pays9.
Dans ce chapitre, nous utilisons l’information transversale que renferme l’évolution asymétrique des profils d’échanges commerciaux des provinces pour estimer l’effet à long terme du commerce sur le PIB par habitant et la productivité du travail au niveau des provinces, dans un cadre de convergence conditionnelle. Ce cadre donne de bons résultats pour ce qui est de vérifier la relation entre l’ouverture au commerce et la croissance, comme dans l’étude de Vamvakidis (2002).
Fondement et méthodologie empiriques
yi,t = e−β yi,t−1 + (1− e−β )y *i + εi,t . (1)
Dans cette équation, ,B est le rythme annuel de convergence vers l’état stationnaire et le terme d’erreur additif Ei, t saisit l’effet des chocs régionaux qui influent temporairement sur l’économie i au temps t. Si ,B est égal à 0, yi,t est déterminé uniquement par yi,t-1, l’économie ne converge pas vers y*i, et yi,t est intégrée d’ordre un. Cependant, l’économie converge vers un état stationnaire, y*i lorsque ,B est positif et inférieur à un. L’hypothèse de convergence conditionnelle a trait au cas où les N unités économiques convergent vers différentes valeurs de l’état stationnaire y*i.
Pour cette raison, dans l’équation (1) (suivant Coulombe et Lee, 1995) – et, comme pour toutes les variables utilisées dans l’analyse empirique présentée dans cette étude – la mesure de la variable économique régionale, xi,t (à l’instar de yi,t et y*i ) correspond à la déviation logarithmique par rapport à la moyenne transversale au temps t :
…
où Xi,t est le niveau du logarithme xi,t. Dans ce modèle, y*i est l’écart relatif à long terme entre la province i et la valeur moyenne non pondérée des indicateurs économiques y des provinces. L’utilisation de variables pour mesurer l’écart par rapport à la moyenne de l’échantillon s’est avéré extrêmement utile dans les régressions de convergence sur des données temporelles et transversales regroupées parce qu’elle permet d’éliminer des facteurs communs, tels que le ralentissement de la productivité, qui pourraient fausser les résultats.
yi,t = Y1yi,t−1 + Y2RUi + Y3DAi,t + Y4DQi,t + εit
,
Le paramètre de convergence γ1 est égal au éβ de l’équation (1) et les variables RUi, DAi,t, et DQi,t – la variable d’urbanisation relative et les variables nominales employées pour l’Alberta et le Québec, respectivement – déterminent les valeurs relatives de l’état stationnaire y*i.
Dans la présente étude, nous voulons vérifier l’hypothèse selon laquelle l’évolution observée dans les liens commerciaux interprovinciaux et internationaux sur la période 1981-199911 pourrait avoir influé sur certains indicateurs macroéconomiques à long terme des provinces, par exemple le PIB par habitant et la productivité du travail. À cette fin, la méthodologie de Coulombe (2000) a dû être adaptée au problème examiné ici, et cela de trois façons. Premièrement, l’échantillon employé par Coulombe (2000) a dû être limité à la période 1981-1999 en raison de la disponibilité de données comparables sur le commerce au niveau régional. Deuxièmement, nous avons dû utiliser l’ensemble de la série sur le commerce international et le commerce interprovincial dans l’analyse empirique parce que les profils de commerce des provinces ont évolué de façon asymétrique au cours de la période étudiée. Troisièmement, nous avons ignoré certains chocs spécifiques au Québec et à l’Alberta puisqu’ils sont survenus avant la période à l’étude12. Les deux premières modifications à la méthodologie antérieurement utilisée par Coulombe (2000) représentent des changements méthodologiques importants et nous en traitons dans ce qui suit.