Avant propos : Cadre de la mission 5
Introduction 7
1 Gestion des risques de liquidité & de taux en ALM 11
1.1 Facteurs de risque de taux et de liquidité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.1.1 Mouvements des taux d’intérêt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.1.2 Comportement de la clientèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.2 Indicateurs de gestion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.2.1 Recommandations du Comité de Bâle . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.2.2 Méthode des gaps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.3 Méthode de la duration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.4 La méthode des MNI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
2 Théorie des impasses 23
2.1 Ecoulement en liquidité´ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.1.1 Définition des fonctions d’écoulement . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
2.1.1.1 Ecoulement de la production´ . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
2.1.1.2 Ecoulement du stock´ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.1.2 Introduction des productions nouvelles futures . . . . . . . . . . . . . 27
2.1.2.1 Dynamique des encours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
2.1.3 Impasses en liquidité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
2.2 Ecoulement en Taux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.2.1 Marge d’intérêt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.2.2 Loi de non corrélation du taux client avec les taux de marché . . . . . 29
2.3 Impasse en taux et technique de couverture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.3.1 Couverture d’un facteur de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.3.2 Généralisation à plusieurs facteurs de risque . . . . . . . . . . . . . . . 32
2.4 Taux de Cession Interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
2.4.1 Définition du TCI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
2.4.2 Définition du Taux de Valorisation Interne . . . . . . . . . . . . . . . 34
2.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
3 Technique de couverture appliquée au Livret A 35
3.1 Impact sur les MNI d’une réindexation du Taux de rémunération du Livret
A en se couvrant sur le taux court terme uniquement . . . . . . . . . . . . . . 35
3.1.1 Calcul pratique de MNI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
3.1.2 Exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
3.2 Impact d’une réindexation du Livret A sur les MNI en se couvrant sur les
taux court et long . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
3.3 Calcul du TVI en se couvrant sur les taux court et long . . . . . . . . . . . . 41
3.3.1 Calcul de la MNI prévisionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.3.2 Expression du TVI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3
Conclusion générale 45
Annexe 48
A Calcul des nominaux d’un swap amortissable 49
B Présentation des instruments de couverture 51
B.1 Swap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
B.2 FRA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
B.3 Autres cas : le swap CMS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
C Calcul de la loi de Non Corrélation 55
D Exemples de conventions d’écoulement 57
D.1 Ecoulement in fine sur la production et linéaire sur le stock . . . . . . . . . . 57
D.2 Ecoulement linéaire sur la production et quadratique sur le stock . . . . . . . 57
D.3 Ecoulement exponentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
Presentation du Groupe de Recherche Operationnelle´
Créé en février 1969, le GRO sous la direction d’Antoine Frachot, est rattaché à Yves Perrier, Directeur des Risques du Groupe Crédit Agricole. L’équipe du GRO est actuellement composée de 14 ingénieurs d’études, et d’un nombre variable de stagiaires : pour cette année, trois stagiaires longs d’un an, cinq stagiaires de six mois, et plusieurs autres stagiaires, principalement en été. Les ingénieurs sont jeunes et leur travail au GRO constitue généralement un premier emploi. La durée d’un poste est de trois à quatre ans. Les évolutions en sortie du GRO sont très variées (centre d’affaires Entreprises, marketing quantitatif, gestion de bilan, recherche sur les marchés de capitaux, gestion de portefeuille, etc).
Le Groupe de Recherche Opérationnelle est un bureau d’étude et d’audit travaillant pour l’ensemble du Crédit Lyonnais et ses filiales sur tous types de sujet nécessitant une expertise technique et scientifique : banque commerciale (datamining, CRM, scoring, webmining), gestion de bilan (gestion actif-passif, allocation de fonds propres, risque de crédit, risque opérationnel, risques de marché), marchés de capitaux (valorisation de produits dérivés, évaluation d’actifs, finance d’entreprise), recherche & développement pour la finance, la statistique et l’économie.
Dans tous ces domaines, le GRO tente d’apporter une réponse scientifique aux questions pratiques qui lui sont soumises en fournissant, le cas échéant, des outils techniques et informatiques.
Le GRO réalise également des prestations externes, et publie des documents externes, tant sur son site internetque dans des revues financières.
Le GRO réalise une part importante de ses activités d’étude et de conseil pour les directions des Particuliers, Professionnels et Entreprises du Crédit Lyonnais. Il s’agit le plus souvent de travaux quantitatifs, qui recouvrent des problématiques de marketing, de risque et de stratégie :
– Marketing quantitatif : analyse comportementale des clients, construction de scores d’appétence, de potentiel, d’attrition, évaluation de la valeur du client,
– Sélection des risques : outils d’octroi, évaluation du risque client, note de signature, – Veille technologique : techniques de scoring, réseaux de neurones, formations.
Le GRO a développé une expertise importante dans le domaine de la gestion de bilan à travers ses différentes interventions et études pour les professionnels de cette activité. Il utilise également ses compétences et sa connaissance des marchés des Particuliers, Professionnels et Entreprises :
– Gestion Actif/Passif : analyses quantitatives intervenant dans l’élaboration de conventions ALM, développement de modèles comportementaux de la clientèle,
– Gestion des risques : risque de crédit, risque de marché, risque opérationnel,
– Allocation de fonds propres : évaluation du capital économique, calcul du couˆt du risque, implémentation des recommandations Bâle 2.
Les ingénieurs du GRO possèdent de solides compétences en finance mathématique, en calcul actuariel et en corporate finance :
– Audit des pricers : analyse des modèles et des choix méthodologiques, ré-implémentation des pricers sur système indépendant du Front, vérification des calculs de prix et de grecques, tests et simulations des limites des pricers,
– Veille technologique : Recherche en modèles de pricing, analyse numérique et méthodes de simulation, économétrie de la finance.
La gestion actif passif ou Asset Liability Management (ALM) connaˆ?t un remarquable essor depuis quelques années. Initialement technique proche de l’actuariat et des pratiques d’adossement, réservée à quelques spécialistes des banques, la gestion actif passif s’impose désormais comme un cadre conceptuel de la gestion financière.
Le développement de la gestion actif-passif s’est donc effectué parallèlement au développement des techniques de gestion des risques lorsque les banques se sont vues dans l’obligation de mettre en place de véritables outils de gestion de ces risques. En effet, de nouvelles contraintes leur ont été imposées par la pression concurrentielle et par la nouvelle réglementation prudentielle développée par les autorités de tutelle.
La mise en place en 1974 du Comité de Bâle par les banques Centrales d’une dizaine de pays a, par exemple, permis aux banques et aux autorités de tutelle nationales de mettre au premier plan l’importance d’une gestion active des risques financiers.
Les banques assurent une fonction d’intermédiaire financier. Cette fonction peut être l’allocation, lorsque les ressources d’origines diverses sont combinées pour servir de support de financement à un emploi unique et, vice-versa, lorsqu’une ressource particulière sert de support de financement à plusieurs emplois distincts. La transformation représente la deuxième fonction d’intermédiation, c’est-à-dire emprunter à une échéance courte et placer les fonds ainsi obtenus dans des actifs de plus long terme. C’est le métier de base de toute banque commerciale qui collecte des dépôts à vue et octroie des prêts. Cette fonction est à l’origine de la majeure partie des risques financiers. Aussi le transfert des risques requiert une attention toute particulière. Bessis (1995) [3] considère deux sortes de risques : les risques financiers et les risques opérationnels. Au sens du comité de Bâle, les risques opérationnels se définissent ainsi : ”Operational risk is defined as the risk of loss resulting from inadequat or failed internal process, people and systems or from external events. This definition includes legal risk, but excludes strategic and reputational risk”. Ces risques ne doivent pas être sousestimés mais dépendent du contrôle interne de gestion et non d’une approche financière. Les risques financiers se décomposent principalement en six types de risque :
– Le risque de contrepartie est le risque pour un créancier de perdre définitivement sa créance dans la mesure ou` le débiteur ne peut pas, même en liquidant l’ensemble de ses avoirs, rembourser la totalité de ses engagements,
– Le risque de liquidité représente pour une banque l’éventualité de ne pas pouvoir faire face, à un instant donné, à ses engagements ou à ses échéances,
– Le risque de taux d’un établissement financier est celui de voir sa rentabilité ou la valeur de ses fonds propres affectées par l’évolution des taux d’intérêt,
– Le risque de marché, que la Commission Bancaire définit comme ”le risque de pertes sur les positions du bilan et du hors-bilan à la suite de variations des prix de marché”.
– Le risque de change, traduit le fait qu’une baisse des cours de change peut entraˆ?ner une perte de valeur d’avoirs libellés en devises étrangères. De même, la hausse des taux de change peut entraˆ?ner une hausse de valeur en monnaie nationale d’engagements libellés en devises étrangères.
– Le risque de solvabilité, c’est-à-dire le risque de ne pas disposer des fonds propres suffisants pour absorber les pertes éventuelles.
Néanmoins, tous ces risques ne trouvent pas leur origine dans les mêmes opérations.
Ainsi certains risques sont inhérents à l’activité relative à la banque commerciale tandis que d’autres sont relatifs aux opérations de marché. De plus, les entités de la banque qui prennent les risques ne sont pas nécessairement celles qui les gèrent. Schématiquement, les risques trouvent leur origine dans :
– les activités de marché : le risque de crédit, le risque de liquidité et le risque de marché,
– les opérations de la banque commerciale : le risque de crédit, le risque de taux d’intérêt, le risque de liquidité.
Pour les positions de liquidité et de taux (et on pourrait ajouter de change), seuls les soldes importent et les opérations individuelles ont peu de sens. Ainsi, il est souhaitable d’effectuer une gestion globale du risque de liquidité et du risque de taux d’intérêt. C’est alors le rôle de la gestion Actif-Passif.
L’ALM s’intéresse aux risques financiers liés à l’obtention de liquidités et au financement des opérations et avant tout aux risques liés au mouvements des taux d’intérêt. Néanmoins, les visions divergent quelque peu sur le but final de la gestion actif-passif selon les auteurs.
Par exemple, pour J. W. Bitner [5], les objectifs d’un gestionnaire actif-passif sont de :
– gérer le risque de taux pesant sur le bilan de la banque,
– gérer les besoins de liquidité relatifs à l’activité bancaire,
– préserver le capital de la banque, – augmenter le résultat de la banque.
Pour d’autres tels que Bessis [3], Darmon [9] ou Dubernet [11], les objectifs de l’ALM sont plus prudents. Ils ne font en effet pas référence au dernier point envisagé par Bitner. Pour eux, l’ALM poursuit avant tout un objectif d’assurance de la pérennité de l’établissement en planifiant son développement et son financement et ne doit pas se fixer pour objectif de maximiser la rentabilité de l’établissement.
Pour M. Dubernet [11],
“La gestion actif-passif vise à cantonner dans des limites consciemment déterminées les conséquences négatives éventuelles des risques financiers, principalement risque de
liquidité, risque de taux et risque de change. Elle cherche à atteindre cet objectif dans les
meilleures conditions de rentabilité. Pour ce faire, elle passe par la mesure et l’analyse des risques financiers et débouche sur des préconisations d’action.”
Par conséquent, selon la définition et les objectifs que se donnent les responsables ALM de la banque, chacun n’aboutira pas à la même politique de risque pour celle-ci. Par exemple concernant le risque de taux, la gestion ALM doit alors s’efforcer d’associer des problématiques de risque et de rentabilité. En effet, l’ensemble des postes du bilan est largement influencé par les mouvements des taux d’intérêt puisque la quasi-totalité des actifs et passifs bancaires engendre des revenus ou des charges indexés sur les taux de marché. Par conséquent, l’instabilité des taux d’intérêt génère une instabilité du résultat bancaire. Néanmoins, la prise de risque est aussi la condition sine qua non à l’obtention d’une meilleure rentabilité future.
Nous nous attachons dans ce document aux méthodes d’appréhension et de quantification du risque de liquidité et du risque de taux afin d’identifier une méthode qui conduise à une gestion saine de ces risques. Nous nous intéresserons à l’aide d’un exemple aux divers types de couverture qui pourront être mis en place.
Dans un premier chapitre (1), nous exposons les différentes méthodes d’appréhension du risque de liquidité et du risque de taux rencontrées dans la littérature. Nous les critiquons relativement aux recommandations effectuées par le Comité de Bâle dans deux documents consultatifs“Principles for the Management and Supervision of Interest Rate Risk”et“Principles for the Assessment of Liquidity Management in Banking Organisations”.
Nous proposons ensuite dans un second chapitre (2) la description complète d’une méthode satisfaisant à ces recommandations et formalisée d’un point de vue mathématique par P. Demey, A. Frachot et G. Riboulet au Crédit Lyonnais.
Enfin, le troisième chapitre (3) détaille une étude pratique, illustrant ainsi les notions présentées dans le chapitre précédent. Inspiré par la nouvelle indexation du taux de rémunération du livret A, nous analyserons l’impact de cette indexation sur les objectifs de la gestion actif-passif.
10 INTRODUCTION
Chapitre 1
L’ALM fournit des indicateurs en termes de risque et de rentabilité attendus sur les différents produits du bilan. Cette gestion doit permettre de disposer de règles à même de limiter l’exposition du bilan de la banque au risque de taux et de gérer de fa¸con optimale ses positions pour, finalement, mettre en place les couvertures adaptées grâce à des produits de hors-bilan.
Une gestion active du bilan doit assurer une visibilité suffisante sur les résultats futurs de l’établissement ainsi que sur les aléas qui les affectent. L’ALM est la plupart du temps assimilée aux techniques relatives à la gestion du risque de taux. L’objectif est en effet de maˆ?triser la sensibilité globale du résultat de la banque à l’évolution des taux. C’est donc un objectif de gestion du risque de taux afin de préserver la marge d’intérêts dégagée par les opérations d’exploitation mais aussi de lisser et optimiser le résultat de l’établissement. Par conséquent, la démarche ALM est une démarche d’identification, de mesure et de contrôle des risques financiers pouvant peser sur le bilan de la banque.
Nous définissons ici les risques de liquidité et de taux et identifions les facteurs qui les génèrent : les mouvements de la courbe des taux et les aléas du comportement de la clientèle. Nous détaillerons ensuite les recommandations du Comité de Bâle relatives à la gestion de ces deux risques puis effectuerons un tour d’horizon des méthodes permettant de les gérer.
Le risque de taux d’intérêt est le risque de voir ses résultats affectés défavorablement par les mouvements de taux d’intérêt. Ce risque peut avoir diverses origines. Nous les décrirons en 1.1. La définition du risque de liquidité est quant à elle moins intuitive.
On peut, conformément au document du Comité de Bâle, définir la liquidité d’une banque comme la capacité de financer ses actifs et de rembourser les engagements pris au moment ou` ces financements ou remboursements apparaissent.
“Liquidity [is] the ability to fund increases in assets and meet obligations as they come due”
Le risque de liquidité se traduit donc à travers l’impossibilité de satisfaire ses engagements. Il apparaˆ?t lorsque des besoins inattendus sont subis par la banque et qu’elle ne peut y faire face à partir de ses actifs liquides. Un dernier aspect du risque de liquidité peut aussi être vu à travers l’incapacité temporaire de la banque à lever des capitaux à un couˆt raisonnable (cet aspect ne nous intéresse pas dans ce document).
Il est donc nécessaire de considérer différents aspects du risque de liquidité. Ce risque peut tout en effet être fatal en cas d’illiquidité extrême puisqu’il peut alors provoquer la faillite d’un établissement.
Le risque de liquidité ou d’illiquidité est donc fondamental du point de vue d’une banque. Comme le suggère la définition, une liquidité mal maˆ?trisée peut engendrer :
– soit une perte d’opportunité par incapacité de financement du développement de l’activité,
– soit une crise de liquidité par incapacité à honorer les engagements contractés.
Le risque de taux et le risque de liquidité trouvent leur origine, d’une part, dans le caractère aléatoire des mouvements de taux d’intérêt et, d’autre part, dans celui du comportement des clients de la banque.
Le risque de taux est un facteur important d’instabilité du résultat de la banque. Différentes composantes du risque de taux sont appréhendées dans les ouvrages relatifs à la gestion ALM.
Notons que l’acceptation de ce risque par la banque fait partie intégrante de son activité. En effet, l’exposition au risque de taux de la banque est une condition nécessaire à l’obtention d’un certain niveau de rentabilité.
Néanmoins, une trop grande exposition aux mouvements des taux d’intérêt peut générer d’importantes pertes. Ces mouvements ont une influence sur les rémunérations et les couˆts générés par les produits et instruments financiers (actifs, passifs et instruments de horsbilan) dont dispose la banque. Par conséquent, leurs mouvements ont un impact direct sur le résultat généré mais aussi sur la valeur actuelle des différents revenus futurs.
Il est donc nécessaire d’appréhender correctement de quelle fa¸con les mouvements de la courbe des taux peuvent impacter les marges de la banque.
Les trois risques les plus importants sont :
– le risque de translation de la courbe des taux, – le risque de déformation de la courbe des taux, – le risque de base.
Ces risques trouvent véritablement leur origine dans les mouvements de taux d’intérêt à travers le fait que :
– les volumes d’actifs ou passifs ayant la même indexation sur les taux d’intérêt ne sont pas les mêmes,
– les actifs et passifs ne sont pas indexés sur les mêmes taux,
– les taux de rémunération des actifs et passifs indexés sur le même taux d’intérêt ne sont pas corrélés de la même fa¸con avec le taux d’indexation.
Le risque de translation de la courbe des taux (repricing risk) correspond tout d’abord au risque d’une hausse ou d’une baisse générale des taux. Il se matérialise lorsque actifs et passifs ne sont pas parfaitement adossés.
Exemple 1Imaginons que la banque dispose d’un volume d’actifs supérieur à son volume de passifs (peu importent leurs maturités et leur taux d’indexation). On suppose uniquement que leur taux de rémunération sont parfaitement corrélés avec le taux d’intérêt sur lequel ils sont indexés. Il suffit alors que la courbe des taux subisse une baisse de 1 pourcent pour que le résultat annuel généré sur le bilan subisse lui aussi une baisse de 1 pourcent.
Les mouvements de taux d’intérêt ne sont néanmoins pas toujours uniformes et il est courant d’observer des changements de pente de la courbe des taux dans le temps mais aussi une déformation de cette courbe . Ces mouvements correspondent au risque de déformation de la courbe des taux (yield curve risk).
Les taux de court terme et de maturités plus élevées peuvent donc évoluer avec des amplitudes différentes ou même de fa¸con inverse. Selon le type de placement ou d’emprunt effectué par la banque sur les marchés, les intérêts payés ou re¸cus pour ceux-ci n’évolueront donc pas de la même fa¸con.
Exemple 2Imaginons le cas, simpliste, d’une banque ne disposant pour ressources que des dépôts à vue des particuliers et n’accordant pour crédits que des crédits immobiliers classiques. Les dépôts à vue étant, par définition, disponibles à tout instant pour les particuliers, la banque décidera de placer ces montants à court terme. Les crédits immobiliers ont par contre une durée contractuelle la plupart du temps assez élevée, par exemple 10 ans en moyenne. Par conséquent, la banque choisira d’emprunter ces montants à long terme.
Ainsi, si les taux longs augmentent tandis les taux courts baissent (ou augmentent moins fortement) la banque verra son résultat se dégrader sans qu’elle ne puisse modifier les engagements qu’elle aura pris envers les particuliers concernant le taux de rémunération des crédits immobiliers.
Enfin, une corrélation imparfaite dans les taux re¸cus et payés par la banque sur des produits financiers ayant par ailleurs les mêmes caractéristiques de repricing génère un troisième risque relatif aux mouvements de taux d’intérêt, le risque de base (basis risk). Lors de mouvements des taux d’intérêt, il peut apparaˆ?tre un spread non négligeable entre les taux re¸cus et payés sur les différents actifs et passifs de maturités équivalentes et de fréquences de repricing similaires.
Le risque de base est donc le risque qui apparaˆ?t lorsque les taux re¸cus ou payés par la banque ne s’ajustent pas de la même fa¸con sur les taux de marché. Pour une même maturité, les taux d’un actif et d’un passif bancaire peuvent en effet ne pas subir des impacts de même amplitude suite à un choc sur les taux de marché puisqu’ils peuvent être indexés sur le même taux d’intérêt sans pour autant que les corrélations de ces deux taux de rémunération avec l’index de référence ne soient les mêmes.
L’importance du risque de base n’est pas la même pour chacune des banques puisqu’il est intégralement inhérent à la composition de son bilan. Il faut noter que, si ce sont les mouvements de taux d’intérêt qui sont à l’origine de ce risque, il se matérialise néanmoins dans le fait que les taux de rémunération des divers produits ne sont pas tous corrélés de la même fa¸con aux taux d’intérêt.
Les mouvements de taux d’intérêt influencent par ailleurs le comportement de la clientèle. Nous détaillons ci-après le rôle qu’ils jouent dans le caractère aléatoire du comportement de la clientèle et dans quelle mesure celui-ci est à l’origine d’un quatrième type de risque de taux mais aussi du risque de liquidité.
Il existe de nombreuses options implicites dans le bilan d’une banque. En effet, la clientèle dispose par exemple de l’option de rembourser par anticipation ses crédits ou de retirer tout ou une partie des montants placés sur son compte à vue. Les mouvements de taux d’intérêt influencent très fortement l’exercice de ces options par la clientèle. Ainsi, un risque de taux relatif au comportement de la clientèle apparaˆ?t dans le bilan : le risque lié aux clauses optionnelles (Optionality).
Ce risque lié aux clauses optionnelles est considéré dans la littérature comme inhérent autant aux mouvements des taux d’intérêt qu’aux comportement de la clientèle. J. Bessis considère par exemple ce risque comme un risque de taux indirect.
“Ces risques optionnels ne naissent pas d’une indexation mécanique, mais des comportements des opérateurs qui exercent, en fonction des évolutions des taux, les options contractuelles incorporées aux produits bancaires.”
Ainsi, le fait que l’exercice de ces options par les clients dépende de l’évolution des taux d’intérêt (et de fa¸con non linéaire) constitue à la fois un risque de taux mais aussi un risque de liquidité. Des mouvements de volume relatifs aux produits proposant des options à la clientèle sont directement induits par les mouvements de taux. Il est donc nécessaire de pouvoir connaˆ?tre le comportement des clients, notamment en fonction des mouvements de taux d’intérêt.
Exemple 3En termes de remboursement anticipé de crédits, le comportement des clients est en effet assez rationnel par rapport aux mouvements de taux. Lorsque les sommes empruntées sont assez élevées, ceux-ci se tiennent relativement bien informés des mouvements de taux d’intérêt et de l’impact qu’ils ont sur les taux de facturation de ce type de crédits. Ainsi, si les taux baissent, le client remboursera par anticipation son crédit en cours et souhaitera en négocier un second à un taux inférieur auprès de sa banque. La marge dégagée sur ce crédit ne sera alors pas celle attendue par la banque.
Les aléas générés par les mouvements de taux d’intérêt et par le comportement de la clientèle pouvant sembler indépendants. Ils sont en réalité liés à travers le phénomène d’optionalité présent dans le bilan de la banque. On vient de voir que le comportement des clients combiné aux mouvements de taux d’intérêt régit le phénomène d’exercice des options dont ils disposent. Par conséquent, c’est la combinaison du caractère aléatoire des mouvements de taux d’intérêt et du comportement des clients qui engendre le risque relatif aux options cachées du bilan de la banque commerciale. Nous verrons que le comportement de la clientèle peut cependant être un facteur de risque de liquidité au-delà de ce phénomène d’exercice des options implicites.
Pour R.L. Harrington [17], le risque de liquidité se situe à trois niveaux pour une banque :
1. Funding risk : risque qui se traduit par la nécessité d’obtenir de nouvelles ressources lorsqu’une des ressources dont la banque disposait par le passé n’est plus disponible (par exemple lors de retrait massif sur les dépôts à vue).
2. Time risk : risque qui apparaˆ?t lorsque la banque ne peut obtenir des rentrées d’argent pourtant attendues (par exemple, incapacité de remboursement d’un prêt par un client).
3. Call risk : risque relatif à l’obtention de nouvelles ressources (suite par exemple à des emprunts importants sur des lignes de crédits).
Les différents points abordés par R.L. Harrington, permettent clairement de faire apparaˆ?tre l’importance que joue le comportement des clients dans la gestion de la liquidité de la banque. En effet, la banque doit gérer sa liquidité grâce à l’étude du comportement de la clientèle :
– à la fois en sachant évaluer les ressources dont elle est suˆre de disposer aux dates futures grâce aux placements et dépôts effectués par la clientèle,
En évaluant par exemple le pire écoulement qu’elle puisse envisager sur chacun des postes pour les montants dont elle dispose aujourd’hui (en termes de retrait des montants placés sur les dépôts à vue, de non remboursement des prêts contractés ).
– mais aussi pour développer son activité.
En disposant par exemple des montants nécessaires à l’ouverture de nouveaux crédits auprès des particuliers lorsque ceux-ci en font la demande. Il faut pour cela pouvoir appréhender les productions nouvelles que la banque peut attendre dans le futur.
Une fois que les facteurs de risque de taux et de liquidité sont clairement identifiés, il convient de rappeler que l’objectif attribué à l’ALM est un objectif d’obtention d’un résultat “normal” compte tenu du niveau d’activité de la banque. Les responsables ALM de la banque doivent donc définir une politique relative au risque de liquidité et au risque de taux. Quel niveau de tolérance en termes de risque de liquidité acceptent-ils? En termes de risque de taux? Pour déterminer quelles limites peuvent être acceptées par la banque, il faut auparavant définir les indicateurs qui vont être retenus pour quantifier ces différents risques.
Il est d’usage de chercher à connaˆ?tre l’impact du risque de taux sur :
1. Le résultat de la banque, c’est-à-dire sur sa Marge Nette d’Intérêt
Les méthodes utilisées sont alors des méthodes de mesure de la marge reposant sur un principe d’amortissement dans le temps de la marge de transformation. Cette marge est déterminée comme la différence entre les conditions auxquelles les crédits seraient refinancés sur les marchés et les conditions auxquelles les ressources clientèle seraient replacées sur les marchés.
2. La valeur de la banque, c’est-à-dire sur sa Valeur Actuelle Nette.
Les méthodes de mesure de valeurs reposent sur le principe de l’actualisation. On calcule la Valeur Actuelle Nette des flux financiers futurs certains à laquelle s’ajoute la valorisation d’options implicites ou explicites.
Ainsi, tous les ouvrages relatifs à l’ALM envisagent comme méthode d’appréhension du risque de taux, la méthode des gaps (relative à l’analyse des marges) et la méthode de la duration (relative à l’analyse de la valeur). La plupart des auteurs cernent clairement les limites de ces deux méthodes et formalisent diverses méthodes plus appropriées à l’évaluation d’une véritable exposition du bilan au risque de taux, telles que la méthode des Marges d’Intérêt Prévisionnelles.
Le Comité de Bâle effectue par ailleurs des recommandations en terme de gestion du risque de liquidité et du risque de taux. Nous les détaillons tout d’abord afin de pouvoir identifier les limites de chacune des méthodes proposées dans la littérature et de définir quels objectifs doivent être atteints si l’on souhaite effectuer une gestion efficace de ces deux risques.
Le Comité de Bâle a été créé en 1974 et se réunit 4 fois par an. Il regroupe aujourd’hui la Belgique, le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, les PaysBas, l’Espagne, la Suède, la Suisse, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Chacun des pays´ est représenté par sa banque centrale et lorsqu’ils n’en disposent pas, de l’autorité ayant la responsabilité prudentielle et un rôle de supervision de l’activité bancaire.
Le Comité ne possède pas d’autorité supranationale et ses conclusions n’ont pas de force légale. Néanmoins, grâce à la trentaine de groupes de travail qui se réunissent régulièrement, le Comité effectue un certain nombre de recommandations relatives à la gestion bancaire. Libre ensuite à chacune des autorités des pays de prendre les décisions correspondant le mieux à son système bancaire. Néanmoins, le Comité encourage les pays à adopter des décisions ayant une approche standard commune.
Ces décisions couvrent un large éventail de problématiques bancaires. Durant les dernières années, le Comité a par ailleurs pris une position plus déterminée pour promouvoir la mise en place de standards acceptés par tous. En 1997, le Comité a donc réalisé en collaboration avec divers pays ne faisant pas partie des 10 pays membres du Comité un ensemble de “Core Principles for Effective Banking Supervision”. Afin de facilité leurs implémentation, en octobre 1999, un document intitulé “Core Principles Methodology” a été publié.
Concernant les problématiques de risque de liquidité et de risque de taux, le document consultatif du Comité de Bâle de janvier 2001 consacre un chapitre aux “Principles for the Management and Supervision of Interest Rate Risk”ainsi qu’un chapitre aux“Principles for the Assessment of Liquidity Management in Banking Organisations”. Les recommandations effectuées dans ces documents fournissent un large éventail des facteurs qui doivent être envisagés en ALM ainsi qu’une description des pratiques qui peuvent être mises en oeuvre afin d’obtenir une gestion saine du risque de liquidité et du risque de taux. La plupart des méthodes concernent en réalité le risque de taux mais permettent aussi d’évaluer le risque de liquidité de la banque.
“A number of techniques are available for measuring interest rate risk exposure of both earnings and economic value. Their complexity range from simple calculations to static
simulations using current holdings to highly sophisticated dynamic modelling techniques that reflect potential future business and business decisions.”
Concernant la gestion du risque de liquidité, le comité recommande de définir une politique de risques regroupant des objectifs qualitatifs et quantitatifs afin d’atteindre les objectifs de la banque du point de vue de la protection de son capital mais aussi de sa capacité à faire face aux pires événènements.
Le chapitre ”Principles for the Assessment of Liquidity Management in Banking Organisations” fournit quelques indicateurs qui pourront être calculés en ALM et pour lesquels la banque devra se fixer des limites en accord avec ses objectifs de gestion. Parmi ces indicateurs, on trouve le ratio de liquidité :
Ce ratio doit être calculé à partir des actifs les plus liquides et uniquement ceux-ci, c’est-à-dire les actifs qui pourront être disponibles instantanément lors d’une crise.
Le Comité considère ensuite que le niveau le plus basique de gestion de la liquidité doit
être la mesure de tous les flux sortant et entrant afin d’identifier ou` peuvent se situer les insuffisances potentielles de liquidité dans le bilan. Par ailleurs, il est précisé qu’un aspect important de la liquidité réside dans les hypothèses de besoins futurs. Il est donc recommandé d’évaluer des ”impasses” de liquidité dans le futur en intégrant l’écoulement des montants présents dans le bilan à la date actuelle mais aussi les productions nouvelles futures (nouveaux crédits qui seront accordés ).
Ce document considère de plus que le risque de liquidité ne peut être appréhendé correctement par la banque qu’après que celle-ci ait envisagé des scénarios de stress afin d’évaluer son exposition.
En effet, la liquidité de la banque dépend dans une large mesure de la fa¸con dont les flux collectés par la banque évoluent selon différents types de scénarios. Il est donc recommandé d’utiliser un large panel de scénarios prenant en compte à la fois des facteurs internes à la banque mais aussi externes (conditions de marché) et d’évaluer dans quelle mesure la liquidité serait gérée dans un cadre ”anormal”.
Enfin, ce document rappelle que les analyses relatives au risque de liquidité doivent être réactualisées régulièrement puisque les paramètres retenus lors d’une étude ou les hypothèses faites à une époque peuvent rapidement devenir obsolètes.
Le document ”Principles for the Management and Supervision of Interest Rate Risk” redéfinit quant à lui les différents risques relatifs aux mouvements de la courbe des taux, puis énumère les effets induits pour la banque avant de faire état des techniques de gestion de ce risque et de leur limites.
Ce document considère les 4 types de risque de taux déjà évoqués précédemment :
1. Repricing risk (point 13) : risque de translation de la courbe des taux,
2. Yield curve risk (point 14) : risque de déformation de la courbe des taux,
3. Basis risk (point 15) : risque de base,
4. Optionality (point 16) : risque lié aux options cachées.
Les effets que ces risques induisent concernent les bénéfices de la banque, la valeur de marché du bilan de la banque ou encore la performance de la banque.
Ce chapitre rappelle que, pour la majeure partie, les banques s’intéressent aux impacts des mouvements de taux d’intérêt sur les bénéfices de la banque. Ces considérations conduisent ces banques à mettre en place la méthode des gaps examinée en 1.2.2.
D’autres ne souhaitent néanmoins pas seulement évaluer les effets de ces mouvements sur les bénéfices générés mais sur la valeur de marché du bilan. Il est alors nécessaire de s’intéresser à la Valeur Actuelle Nette de chacun des produits du bilan et la méthode retenue est généralement la méthode de la duration qui tente de quantifier la sensibilité du bilan au risque de taux. Par ailleurs, la méthode des gaps, en dépit de sa facilité d’utilisation, est limitée puisqu’elle ne donne qu’une vision statique de l’exposition de la banque au risque de taux. Divers ouvrages relatifs à l’ALM lui donne comme alternative la méthode des Marges d’Intérêt Prévisionnelles.
Le Comité de Bâle définit donc divers objectifs à atteindre afin d’appréhender correctement le risque de taux, mais aussi de gérer parallèlement les besoins en liquidité de la banque.
Le Comité de Bâle recommande de mettre en place des écoulements en liquidité pour chacun des produits du bilan de la banque. Cette modélisation permet en effet de calculer par la suite les impasses en liquidité, c’est-à-dire la différence entre les actifs et les passifs du bilan aux différentes dates futures. Le Comité recommande d’effectuer à la fois des évaluations d’écoulement “statique” mais aussi “dynamique”. L’estimation de l’écoulement ”statique” revient à effectuer une estimation historique de l’écoulement moyen. L’estimation de l’écoulement ”dynamique” consiste en une prise en compte et une analyse des effets optionnels et intègre les prévisions de productions nouvelles pour le produit concerné.
Le Comité de Bâle recommande enfin d’évaluer le lien entre le taux des différents produits et les taux de marché afin d’évaluer des écoulements en taux. Cette estimation doit alors s’effectuer grâce à une analyse économétrique. La méthode présentée dans le chapitre 2 constitue une réponse à ces souhaits. Nous présentons et critiquons ici les méthodes rencontrées dans la littérature et couramment utilisées par les banques.
Bitner [5], Bessis [3], Darmon [9] font référence à la méthode des gaps pour évaluer l’impact du risque de taux sur le résultat global de la banque, i.e. sur la marge d’intérêt. Le PNB (Produit Net Bancaire) d’une banque est constitué principalement de la marge financière et des commissions. La méthode des gaps décompose un bilan bancaire en actif et passif, contenant chacun des postes dégageant des flux caractérisés par un taux et un échéancier. Il est possible de classer ces postes par taux puis par échéance et de scinder chacune de ces classes en deux parties. La première contient les flux non affectés par un mouvement de taux. La seconde inclut les flux affectés par un mouvement de taux (ce sont ceux des postes à taux variables et ceux de la production nouvelle affectés par les nouveaux taux en vigueur).
On définit comme gap l’écart, à une date t, entre l’actif et le passif. En particulier, on appelle gap à taux fixe, la différence entre l’actif et le passif non affectés par un mouvement des taux.
Cette méthode envisage la position en risque de taux de la banque comme une accumulation de toutes les lignes du bilan ayant chacune des particularités différentes en termes de taux de rémunération et de maturité. Le gap (impasse) comptable de la date (t) s’écrit :
Gap comptable(t) = AV (t) ? PV (t)
ou` :
– AV (t) représente la valeur nominale des emplois (actifs) à taux variables, – PV (t) représente la valeur nominale des ressources (passifs) à taux variables.
Le bilan de la banque étant équilibré à chacune des dates, le gap comptable est aussi
égal à la différence entre la valeur nominale des ressources à taux fixe et celle des emplois à taux fixe.
Ce gap est un gap instantané. Par conséquent, le fait qu’à un instant donné, le gap comptable soit nul, signifie uniquement que, pour cette date et uniquement pour celle-ci, la marge actuelle est insensible aux taux. Le gap instantané ne permet aucunement de conclure quant à la sensibilité de la marge future aux variations de taux.
Il est donc nécessaire de prendre en compte un horizon plus large d’analyse de la marge. On cherche alors à évaluer la variation de marge d’intérêt induite par une variation des taux à la date actuelle. L’élaboration d’un tableau prévisionnel récapitulatif de l’ensemble des opérations sous la forme d’un échéancier permet de faire apparaˆ?tre des impasses, ou gaps, échéance par échéance. Seuls les actifs et passifs à taux variables sont concernés par une variation de taux. Chacune des impasses traduit les variations de résultat sur ces produits en fonction de la variation de taux d’intérêt de la date initiale.
Pour résumer, cette méthode établit un échéancier de rémunérations payées ou rec¸ues sur chacun des actifs et passifs dépendant des mouvements de taux d’intérêts en fonction de leur maturité ou de leur date de repricing lorsqu’ils sont à taux variable. L’amplitude de l’impasse résultant de l’ensemble du bilan fournit alors le niveau d’exposition de la banque au risque de translation de la courbe des taux.
Cette méthode est fréquemment utilisée puisqu’elle est relativement simple d’emploi et permet de fournir des indications sur l’apparition du résultat dans le temps. Elle a l’inconvénient de se limiter qu’aux produits à échéanciers bien déterminés et est entièrement basée sur l’exploitation des données comptables. Par contre, les produits complexes doivent faire l’objet d’hypothèses et de modélisations financières plus sophistiquées pour permettre le calcul des points de risque.
– Tout d’abord, cette méthode n’envisage qu’une translation de la courbe des taux immédiate et permanente. Elle ne prend donc pas compte du risque de base, ni du risque de spread entre les références de taux d’intérêt (risque de déformation de la courbe des taux). Certains méthodes des gaps plus sophistiquées tendent néanmoins de remédier à cette lacune en envisageant des variations différentes pour les taux de différentes maturités. Par ailleurs, elle néglige les encours à taux révisable à partir de leur date de révision.
– L’optionalité est elle aussi laissée hors de l’analyse. En effet, on ne tient pas compte de l’impact de l’évolution des taux d’intérêt sur l’amortissement de l’encours (remboursements anticipés ) ou sur les effets de substitution (par exemple des dépôts à vue aux comptes à terme).
– Enfin, elle n’intègre pas la production nouvelle qui va pourtant modifier la structure du bilan et par conséquent les impasses aux différentes dates futures. Certains auteurs intègrent néanmoins des prévisions de productions futures afin de compléter cette méthode.
Une seconde méthode est couramment rencontrée dans la littérature (cf Bitner [5], Darmon [9] ). Il s’agit de la méthode de la duration. Cette méthode s’intéresse à la Valeur Actuelle Nettede la banque et pourra être utilisée lorsque les dirigeants souhaitent porter leur attention sur la valeur de marché de la banque et non sur une approche relative à son résultat à court terme.
On exprime dans cette méthode l’exposition au risque de taux relative à chacun des actifs et passifs en termes de sensibilité de leur Valeur Actuelle Nette. Ainsi, on cherche tout d’abord à déterminer la Valeur Actuelle Nette de chacun des éléments du bilan et du hors-bilan.
On peut alors écrire :
V AN(bilan) = Valeur actuelle des actifs
? Valeur actuelle des dettes
+ Valeur actuelle du hors-bilan
L’évaluation des éléments du bilan et du hors-bilan s’effectue sur la base de leur valeur de marché, i.e. :
– une valeur de marché directement observable pour les instruments négocié sur un marché organisé,
– une valeur théorique obtenue par une actualisation des flux au taux de rendement actuariel d’opérations de marché de durée et de risque comparables à ceux de l’instrument
évalué,
– une valeur estimée à l’aide d’un modèle d’évaluation de type Black et Scholes [6] lorsqu’il s’agit d’instruments conditionnels.
Les concepts de duration et de sensibilité sont alors utiles pour évaluer l’exposition au risque de taux de la valeur de marché de la banque. Si on note V la valeur de marché d’un actif et r le taux d’intérêt, sa duration D vaut alors :
La sensibilité S de cet actif vaut quant à elle :
Par conséquent, si les taux augmentent de 1%, un actif de sensibilité S verra sa valeur augmenter de S%. Cet indicateur ne donne que la sensibilité globale de l’actif à une translation de la courbe des taux. En effet, la sensibilité n’est calculée que pour un taux particulier et on connaˆ?t ainsi uniquement la variation de la valeur du produit considéré en fonction de la variation de ce taux et uniquement de celui-ci. C’est seulement sous l’hypothèse de translation uniforme de la courbe des taux qu’on peut généraliser cette sensibilité à des taux de diverses maturités.
Néanmoins, pour affiner l’appréhension du risque de taux, on peut alors calculer des sensibilités par rapport à des taux de différentes maturités. Pour un même produit, il faut alors évaluer autant de sensibilités que de maturités de taux considérées. Plus ce nombre sera élevé, plus l’appréhension du risque de taux sera précise.
On peut ensuite évaluer de la même fa¸con la sensibilité globale de la VAN du bilan aux taux d’intérêt.
Voyons quels peuvent être les points positifs mais aussi les limites de cette méthode dans le cadre de l’ALM.
– Cette méthode a l’avantage d’être très synthétique. En effet, l’ensemble des flux futurs est résumé à une seule valeur (la Valeur Actuelle Nette) par le biais de l’actualisation. On peut alors en déduire la sensibilité de cette valeur aux différents facteurs qui l’influencent, par exemple les taux d’intérêt ou le comportement des clients.
actuelle d’une chronique de flux certains Ft est
X
– Néanmoins cet avantage est aussi un inconvénient puisqu’on ne peut plus différencier les flux d’intérêt dans le temps.
– La méthode de la duration soulève par ailleurs divers problèmes d’ordre technique. Il n’est tout d’abord pas toujours évident d’effectuer un calcul de duration sur chacun des produits du bilan. Il se pose ensuite un problème de choix du taux référence par rapport auquel on effectue les calculs : faut-il prendre le taux actuariel, la courbe des taux zéro-coupons? Ainsi, cette méthode n’appréhende qu’une translation d’une courbe des taux particulière, limitant amplement l’analyse. Elle peut donc être intéressante pour un produit particulier (on peut pour un produit effectuer un choix de taux assez cohérent, par exemple le taux d’intérêt sur lequel le taux de rémunération du produit est indexé etc) mais devient assez floue sur l’ensemble du bilan.
– Enfin, le calcul de la sensibilité pour évaluer l’impact d’une variation de taux n’est valable que pour des variations faibles de la courbe des taux. La sensibilité est en effet elle-même fonction du niveau de taux de référence. Par conséquent, des phénomènes de convexité de la courbe des taux rendent les calculs très approximatifs pour des variations importantes.
– Cette méthode possède a contrario un avantage extrêmement important sur la méthode des gaps. Elle permet d’intégrer les opérations optionnelles telles que les options relatives aux relations avec la clientèle puisque celles-ci peuvent être valorisées et ajoutées à la valeur obtenue par actualisation des flux futurs.
– Enfin, cette méthode telle qu’elle est décrite dans les ouvrages relatifs à l’ALM considère uniquement la sensibilité en taux des divers produits. Appliquée telle qu’elle y est décrite, elle ne permet pas d’appréhender le risque de liquidité. Elle doit donc soit être complétée par une autre méthode permettant de gérer ce risque.
Les approches précédentes demeurent des approches statiques qui consistent à mesurer l’impact d’une variation de taux à une date donnée sur les résultats prévisibles ou sur la valeur nette de l’établissement. L’analyse statique ne tient donc pas compte de l’évolution future du bilan (productions nouvelles), des risques de fluctuations ultérieures des taux, de leur volatilité, de la convexité de la courbe des taux.
Le Comité de Bâle recommande d’effectuer une analyse dynamique. On ne mesure alors plus les effets d’une évolution passée et certaine mais on essaie d’anticiper les effets d’une évolution future et hypothétique. Il est donc utile de considérer des scénarios de variation de taux et des hypothèses d’évolution de bilan (production futures). Une approche dynamique s’impose en effet pour apprécier les différentes alternatives envisageables et optimiser les choix.
J. Darmon [9] propose une adaptation de la méthode des gaps qui tente de répondre à ces insuffisances. Il s’agit de la méthode des Marges d’Intérêt Prévisionnelles (MNIP). Cette méthode se base sur diverses simulations pour combler les lacunes de la méthode des gaps.
Cette méthode nécessite tout d’abord d’envisager de multiples scénarios de taux. L’évolution des taux ne correspond plus seulement à une translation mais aussi à une déformation. De nombreux modèles de taux rencontrés dans la littérature (cf Vasicek[27], Cox-IngersollRoss [7] ) peuvent être utilisés afin d’effectuer des simulations de taux. J. Darmon recommande de retenir un scénario central de taux (le plus probable) et d’envisager divers scénarios alternatifs.
L’auteur recommande par ailleurs d’effectuer des modélisations d’encours des différents postes du bilan. Quelle production nouvelle peut-on attendre? Quel sera l’amortissement du stock? Autant de questions auxquelles la banque pourra répondre grâce aux prévisions des directions d’exploitation mais aussi à une analyse comportementale de la clientèle intégrant l’optionalité (modélisation du taux de remboursement anticipé ).
Il est ensuite nécessaire d’analyser l’indexation des différents taux de rémunération des postes du bilan sur les taux d’intérêt. Ceci permet d’appréhender correctement les hypothèses à effectuer sur les tarifications des productions nouvelles intégrées dans l’encours futur.
Cette méthode permet donc de tenir compte de diverses hypothèses d’évolution des taux d’intérêt, d’intégrer leurs effets sur les volumes d’encours ou sur la tarification clientèle, les choix de gestion de bilan de l’établissement Elle répond largement aux recommandations du Comité de Bâle en terme de gestion du risque de liquidité et du risque de taux.
22 CHAPITRE 1. GESTION DES RISQUES DE LIQUIDITE & DE TAUX EN ALM´
Chapitre 2
La méthodologie présentée maintenant correspond à la formalisation d’une méthode satisfaisant les objectifs du comité de Bâle :
– Détermination de conventions d’écoulement en liquidité permettant de calculer des impasses en liquidité (écoulements statique et dynamique).
– détermination de conventions en taux permettant de traduire l’ajustement des taux des divers produits sur les taux d’intérêt.
Cette méthode est évoquée dans divers ouvrages tels que celui de J. Bessis. Elle a été formalisée d’un point de vue mathématique par P. Demey, A. Frachot et G. Riboulet (GRO, Crédit Lyonnais) en 2001.
Les analyses en liquidité et en taux sont extrêmement liées. Tout besoin en liquidité à une date donnée est financée aux conditions de taux de la date courante. Par conséquent, la projection des besoins de liquidité est certes indispensable, mais doit être complétée par une analyse du risque de taux. Les besoins (respectivement excédents) de liquidités aux dates futures seront refinancés (respectivement placés) selon diverses modalités qui ont toutes pour particularité de porter une incertitude quant aux conditions de taux auxquelles elles seront effectuées.
Cette méthode consiste à évaluer l’impasse de liquidité du bilan puis l’impasse en taux afin de quantifier les montants en risque. Plusieurs techniques sont ainsi mises en place en amont de l’analyse du risque de taux afin de déterminer des impasses à taux fixes : – La mise en place des conventions d’écoulement pour chacun des postes du bilan, – L’intégration d’opérations prévisionnelles dans le périmètre ALM.
Une convention permet de définir :
- Un écoulement en liquidité du produit qui décrit comment s’écoule le stock dans le temps. Cette loi peut être contractuelle ou conventionnelle et représente l’évolution la plus probable du produit. Elle n’intègre que les aléas qui peuvent affecter la liquidité du produit tels que les remboursements anticipés pour les crédits aux particuliers.
- Un écoulement en taux du produit qui décrit le profil de dépendance de la marge d’intérêts du bilan aux taux de marché. Il faut pour cela auparavant déterminer le degré d’insensibilité des opérations commerciales à l’évolution des taux de marché. On peut alors mettre en place une loi de non corrélation pour chacun des produits. Cette loi traduit le pourcentage de l’encours qui peut être refinancé à taux fixe dès aujourd’hui pour différentes maturités, c’est-à-dire dont les caractéristiques de rémunération sont figées.
La modélisation de la liquidité suppose d’étudier chaque poste du bilan afin de déterminer son degré de liquidité pour les actifs et d’exigibilité pour les passifs. De nombreux éléments doivent alors être intégrés dans cette analyse. Il faut à la fois tenir compte des paramètres internes à la banque tels que sa politique commerciale ou sa politique de titrisation, mais il est aussi nécessaire d’intégrer des paramètres externes à la banque tels que la conjoncture économique, l’émergence de concurrents ou encore le comportement des clients.
La détermination d’une impasse en liquidité permet alors d’anticiper les montants qui devront être empruntés ou placés aux dates futures. L’impasse en liquidité est nulle pour la date courante puisque le bilan de la banque est équilibré à tout instant. En revanche, la projection de l’impasse aux dates futures n’a aucune raison d’être nulle. On désignera donc par impasse en liquidité la courbe qui fournit le montant de l’impasse à chacune des dates futures.
Cette évaluation permet non seulement d’anticiper les besoins futurs en liquidité, mais aussi d’évaluer une partie du risque de taux auquel s’expose la banque. Le déséquilibre entre actifs et passifs bancaires génère en effet des besoins de refinancement ou de placements à des dates futures pour lesquelles on ne connaˆ?t pas aujourd’hui le niveau des taux. Une mauvaise appréhension de la liquidité de la banque peut donc être une des sources du risque de taux que doit maˆ?triser la gestion ALM.
Ainsi, il est vital pour la banque d’évaluer de quelle fa¸con chacun de ses actifs et passifs
évolue au cours du temps. Pour ceci, il faut quantifier la probabilité qu’un euro présent dans le bilan à la date d’aujourd’hui soit encore présent à une date future par la détermination de fonctions d’écoulement.
Néanmoins, afin d’anticiper correctement les montants de l’impasse future, il est non seulement nécessaire d’évaluer l’écoulement des actifs et passifs présents ou entrants dans le bilan mais il faut aussi pouvoir évaluer les montants de production nouvelle qui seront observés par la suite. La prise en compte de ces productions nouvelles futures dans le calcul d’impasse permet d’évaluer une impasse dynamique.
Ainsi, il faut effectuer une distinction entre les montants présents dans le bilan à la date t (le stock ou l’encours) et la fa¸con dont ils s’écoulent et les montants entrant dans le bilan aux différentes dates futures (la production nouvelle).
Au final, à chaque date, l’encours présent au bilan est égal à :
?
? l’amortissement du stock de la date précédente
+
?
la production nouvelle de la date courante
On s’interroge ici sur la fa¸con dont disparaissent les euros présents dans le bilan (écoulement du stock), ou entrant dans le bilan (écoulement de la production) sans tenir compte d’éventuelles productions nouvelles futures. Des exemples de conventions d’écoulement sont détaillés en annexe D.
La fonction d’écoulement de la production donne la probabilité qu’un euro de production nouvelle entrant dans le bilan à une date t soit encore présent à une date T ultérieure. Il s’agit donc d’un euro qui entre dans le bilan en t (production nouvelle) et non d’un euro présent dans le bilan à la date t (encours). Ainsi, on suppose que les montants de production nouvelle ne s’écoulent pas de la même fa¸con que les montants déjà en stock.
Si on note PN(t) la production nouvelle apparue à la date t, PN(t,T) le montant de cette production encore présent à la date T, alors on définit la fonction d’écoulement de la production nouvelle par la relation suivante :
PN(t,T) = PN(t).S(t,T)
Cette fonction d’écoulement définit la convention en liquidité du produit et a les propriétés suivantes :
- S(t,t) = 1. Un euro entrant dans le bilan à la date t se trouve toujours dans le bilan à la date t.
- S(t,+?) = 0. La production disparaˆ?t tôt ou tard du bilan. Cette propriété suppose de définir une date arbitraire de sortie du bilan pour certains produits tels que les dépôts à vue.
Ceci permet d’introduire immédiatement la notion d’écoulement contractuel. En effet, pour certains produits de type échéancé (pour lesquels il existe une date de fin contractuelle du produit), la convention d’écoulement théorique correspond à l’écoulement tel qu’il est impliqué par les termes du contrat. Ainsi, pour un crédit à la consommation de durée 5 ans, on peut, au moment ou` ce montant entre dans le bilan, définir l’écoulement contractuel du produit comme celui correspondant à l’échéancier de remboursement mis en place.
Néanmoins, l’écoulement qu’on choisira de retenir comme écoulement conventionnel du produit peut être différent de cet écoulement théorique puisque le client dispose de diverses options (par exemple l’option de remboursement anticipé) qui viendront modifier la convention d’écoulement. Ainsi, la banque pourra choisir d’intégrer ces facteurs non contractuels, mais bien réels, dans l’écoulement conventionnel du produit.
Par ailleurs, il existe certains produits pour lesquels aucune date de fin contractuelle n’est spécifiée. Ces produits, non échéancés, font principalement partie du passif de la banque. Les dépôts à vue font par exemple partie des produits non échéancés. En effet, le contrat d’ouverture d’un compte dépôt ne spécifie pas de durée de fin du contrat. Les montants présents sur ces comptes peuvent être retirés à tout instant. Il n’existe donc pas d’écoulement contractuel pour ces produits et la définition d’un écoulement effectif reste elle-même assez problématique.
Dans le cas général, on peut supposer que les fonctions d’écoulement de la production dépendent :
- de la date d’entrée dans le bilan de la production t;
- du temps écoulé entre la date d’entrée dans le bilan t et la date considérée T ; - d’autres variables telles que les taux de marché entre ces deux dates.
En effet, la fonction d’écoulement peut dépendre de l’évolution des taux d’intérêt puisqu’un client peut tirer un avantage financier à exercer les diverses options dont il dispose selon l’évolution des taux d’intérêt. Par conséquent, la nécessité de prendre l’optionalité dans l’évaluation des conventions en liquidité ne fait aucun doute.
Néanmoins, la pratique la plus courante fait l’hypothèse que seule la durée séparant les dates t et T influe sur la probabilité d’un euro entré dans le bilan à la date t soit encore présent à la date T. Cela signifie qu’on considère alors que les productions nouvelles passées et futures s’écoulent de la même fa¸con et que leur date d’entrée dans le bilan importe peu.
Quelque soit le type de modèle retenu, l’évaluation de la fonction d’écoulement de la production nouvelle d’une banque doit à la fois traduire l’écoulement contractuel de cette production mais aussi l’occurrence de tous les évènements non contractuels (remboursements anticipés etc). Ainsi, la quantification d’une fonction d’écoulement en liquidité de la production nouvelle résulte d’une analyse des éléments contractuels des produits mais aussi d’études comportementales des clients. Il est donc nécessaire de se poser de nombreuses questions lors de l’évaluation de la convention d’écoulement. Quels taux de remboursement anticipé observe-t-on couramment sur chacun des types de crédit? Ce taux dépend-t-il de la durée contractuelle du crédit, de la durée restant à courir ou encore du niveau des taux d’intérêt de marché?
L’encours d’un poste du bilan peut être envisagé comme l’accumulation des différentes strates de production nouvelle apparues dans le passé et non encore écoulées. En effet, le stock de crédits encore présents à une certaine date correspond bien à tous les crédits contractés à une date antérieure pour lesquels les clients n’ont pas fini de rembourser les montants empruntés. Ainsi, le stock de la date d’aujourd’hui est constitué de la somme des productions nouvelles passée auxquelles on aurait appliqué pour coefficient d’amortissement la fonction d’écoulement de la production nouvelle.
Ainsi, on peut écrire mathématiquement :
en notant B(t) l’encours de la date t.
Comme la notion d’écoulement de la production nouvelle, la notion d’écoulement du stock cherche à traduire le phénomène de disparition de l’encours B(t) du bilan sous hypothèse que les productions nouvelles futures soient nulles. Cela traduit la fa¸con dont s’écouleraient les montants présents dans le bilan de la banque si celle-ci arrêtait l’activité leur ayant trait. Cette hypothèse est certes très peu réaliste mais répond à la logique de risque qui doit être adoptée par la banque.
L’écriture précédente du stock permet de décomposer l’encours d’une date future en deux parties :
- la projection de l’encours de la date courante sous hypothèse de productions nouvelles futures nulles;
- l’accumulation entre les deux dates de différentes strates de production nouvelle.
ou` B(t,T) représente la projection de l’encours actuel sous hypothèse de production nouvelle future nulle :
On définit alors la fonction d’écoulement du stock de la même fa¸con que pour la production, comme le pourcentage de l’encours encore présent dans le bilan aux dates futures.
B(t,T) = B(t) · Sstock(t,T)
soit :
Dans ces conditions, la fonction d’écoulement du stock Sstock(.,.) n’est pas en toute généralité la même que la fonction d’écoulement S(.,.) des différentes productions nouvelles qui composent ce stock.
Il est important de voir que la notion d’écoulement du stock est certes très utile mais n’est pas le concept adéquat pour une discussion saine. En effet, la fonction d’écoulement d’une strate de production, S, reflète le comportement des clients alors que la fonction d’écoulement du stock, Sstock, combine le comportement des clients et les productions nouvelles passées.
Les types d’écoulements de la production nouvelle et du stock les plus fréquemment utilisés sont détaillés en annexes.
2.1. ECOULEMENT EN LIQUIDIT´ E´
Pour construire les besoins futurs de liquidité ou les replacements futurs de liquidité excédentaire, il faut connaˆ?tre l’écoulement futur des encours actuels (en faisant donc abstraction des productions nouvelles futures). Néanmoins, il faut également évaluer les productions nouvelles futures, pour en déduire finalement ce que seront les encours réellement inscrits au bilan aux dates futures. On cherche ici à identifier la fa¸con dont les encours futurs combinent écoulement de l’encours aujourd’hui et productions nouvelles futures.
Nous avons vu précédemment que les encours de la date courante s’écrivent comme étant l’accumulation des différentes strates de production nouvelle apparues dans le passé. Par différentiation :
Cette équation peut être assimilée à une équation de conservation de la matière. En effet, la variation d’encours s’écrit comme étant la somme de la production nouvelle apparue entre t et t + dt et du flux d’écoulement du stock entre t et t + dt.
Si on note Bi(t) l’encours un poste i du bilan, alors à tout instant le bilan doit être équilibré et on a :
Néanmoins si on veut projeter ce bilan à une date future il est nécessaire d’introduire les notions de fonctions d’écoulement et de productions nouvelles définies précédemment. La définition de l’impasse en liquidité est alors relativement immédiate. L’impasse en liquidité représente la différence entre les encours d’actifs et de passifs pour toutes les dates futures, telles qu’on peut les projeter depuis la date d’aujourd’hui :
ou` les sommes sont prises respectivement sur toutes les lignes de l’actif (resp. passif). Une telle définition fait abstraction des productions nouvelles futures et donc se place donc implicitement dans l’hypothèse ou` la banque arrête son activité. Cela ne permet donc pas d’appréhender correctement les besoins futurs en liquidité de la banque. Il est donc nécessaire de prendre en compte les productions nouvelles futures afin d’aboutir à l’impasse dynamique :
ou` PNga (resp. PNgp) sont les éléments de productions nouvelles anticipées dont on souhaite tenir compte dans l’impasse (productions nouvelles qui elles-mêmes s’écouleront).
En pratique, la construction des différentes impasses, en introduisant ou non certaines productions nouvelles, s’effectue en fonction du degré de connaissance que les gestionnaires ALM ont des modèles de prévision. En effet, plusieurs considérations entrent en ligne de compte pour savoir quelles productions nouvelles doivent être retenues dans l’impasse dynamique.
Il est par exemple nécessaire de se demander quel est le degré de certitude des productions nouvelles futures. En effet, certaines peuvent être connues avec une relative certitude, comme par exemple la production de prêts immobiliers dans les 2 à 3 prochains mois. On connaˆ?t en effet régulièrement le nombre de Plan Epargne Logement fermés récemment. Si, légalement,´ les clients disposent d’un an pour convertir leur PEL en prêt PEL, la banque sait que la plupart des conversions s’effectuent dans les trois premiers mois et dispose de données historiques de pourcentages mensuels de conversion.
De même les encours de dépôts à vue sont relativement stables au moins à court-terme, ce qui signifie que la production nouvelle est assez prévisible. Le trésorier a donc intérêt à introduire des éléments sur la production nouvelle future tant que celle-ci est relativement bien prévue. A l’inverse, tenir compte d’une production nouvelle future très incertaine peut conduire à des décisions incorrectes dans la gestion de la liquidité.
Nous venons d’exposer le risque de liquidité et la manière dont un gestionnaire ALM peut s’en prémunir. Son objectif est d’expliciter une certaine impasse ”en liquidité”. Cette méthodologie reflète clairement les flux de ”cash”au sein de la banque. Cependant, tous ces transferts de liquidité, besoins ou excédents, contiennent un aléa : les taux à appliquer dans le futur à ces mêmes transferts. Nous ne connaissons pas de fa¸con certaine la courbe des taux de marché de demain. Or, une gestion ALM efficace assure une visibilité suffisante sur les résultats futurs de l’établissement ainsi que sur les aléas qui les affectent.
Le risque de taux doit être pris en compte à différents niveaux. En effet, les taux d’intérêt influent sur le résultat de la banque en divers endroits :
– Tout d’abord, ils interviennent au niveau de l’impasse en liquidité en elle-même puisque l’écoulement du stock de chacun des produits peut être plus ou moins rapide en fonction de l’évolution des taux d’intérêt.
– Ils interviennent ensuite au niveau de la rémunération re¸cue à l’actif et versée au passif. En effet, les taux de rémunération des différents produits bancaires dépendent plus ou moins des taux d’intérêt. Nous verrons que le concept de non corrélation des taux client avec les taux de marché permet de modéliser ce phénomène.
– Enfin ils interviennent naturellement à travers le financement ou le placement de l’impasse en liquidité.
Nous allons montrer dans ce chapitre dans quelle mesure les taux d’intérêt interviennent à travers la rémunération re¸cue ou versée par la banque ainsi que sur le refinancement ou le placement de l’impasse en liquidité. Pour observer ce phénomène, il est nécessaire de définir la marge d’intérêt de la banque.
Sur l’ensemble du bilan, la somme des intérêts rec¸us et versés à la date t, s’écrit, en notant Ba(t) (respectivement Bp(t)) l’encours d’actif (resp. passif) inscrit au bilan sur la période la rémunération du poste i du bilan à la date t :
Cette vision instantanée de la marge d’intérêt doit être complétée par une vision à long terme. Vue d’aujourd’hui, que vaut la marge à une date future T ? :
ou` Ri(t,T) représente le taux client du poste i de la date T tel que per¸cu de la date t et rT le taux de replacement/refinancement instantané. Cette modélisation n’est pourtant pas exacte. En effet, il est important d’intégrer à cette projection le fait que l’impasse en liquidité sera replacée ou refinancée.
X X
M(t,T) = Ba(t,T).[Rstocka (t,T) ? rT] ? Bp(t,T) · [Rstockp (t,T) ? rT]
a p
On peut alors écrire la marge d’intérêt projetée comme :
X X
M(t,T) = Ba(t,T) · Rstocka (t,T) ? Bp(t,T) · Rstockp (t,T)
a p
" #
X X
? Ba(t,T) ? Bp(t,T) · rT
a p
Deux éléments doivent donc être projetés dans le futur : les encours de chacun des postes ainsi que les taux-client.
Remarque 1En ce qui concerne la projection des encours, le raisonnement est similaire à celui effectué lors de la mise en place de l’impasse en liquidité. Dans un premier temps, on peut ne considérer que les opérations connues aujourd’hui et donc la projection retenue est celle qui écoule le stock de la date t, sans tenir compte de la production nouvelle. Dans un second temps, on peut intégrer des éléments de production nouvelle future.
On peut tout d’abord constater que les mouvements de taux d’intérêt interviennent directement dans le niveau de la marge d’intérêt à travers le financement ou le placement³P P ´ de l’impasse en liquidité a Ba(t,T) ? p Bp(t,T) . Néanmoins, les taux interviennent à
un second niveau dans la marge d’intérêt à travers les taux de rémunération des actifs et passifs . Afin de mettre en évidence ce second phénomène, il faut définir une loi de non-corrélation. Cela va nous permettre d’apprécier l’exposition au risque de taux de la banque.
La loi de non-corrélation détermine le degré d’insensibilité des opérations commerciales à l’évolution des taux de marché. Il faut alors mettre en place une loi de non corrélation pour chacun des produits. Cette loi traduit le pourcentage de l’encours qui peut être refinancé à taux fixe dès aujourd’hui pour différentes maturités, c’est-à-dire dont les caractéristiques de rémunération sont figées. On obtient ainsi la partie de l’écoulement en liquidité qui peut être considérée comme du taux fixe.
Tout comme pour les fonctions d’écoulement en liquidité, plusieurs degrés de réalisme peuvent être intégrés dans la loi de non-corrélation. Par exemple, on peut très bien envisager le cas d’une loi de non-corrélation dépendant du niveau des taux de marché. En effet, il n’est pas absurde d’imaginer une loi de non-corrélation qui refléterait un phénomène tel qu’un choc sur les taux de marché soit d’autant moins vite intégré dans le niveau des taux client que les taux de marché sont très élevés, et d’autant plus vite que les taux de marché sont bas.
L’exposition au risque de taux intervient en deux points : la rémunération re¸cue ou versée sur chacun des postes du bilan ainsi que sur le financement ou le placement de l’impasse en liquidité. L’impasse de taux mesure l’impact d’un choc de taux sur la marge. Pour mesurer cet impact, il suffit alors de dériver partiellement la marge d’intérêt par rapport au taux choisi. Dans le cas de l’impasse en taux court, on obtient :
Plus concrètement, l’impasse en taux représente la variable qu’on cherche à annuler lorsqu’on parle de couverture de la marge d’intérêt contre le risque de taux. Nous décrivons alors les opérations de couverture qui doivent être mises en place à chaque date. Plus précisément, nous donnons les équations qui permettent de construire les impasses correspondant aux diverses sources de risque.
On se donne une série d’encours B (t), un écoulement en liquidité du stock Sstock (t,T) et un modèle d’évolution du taux client que nous notons Lt. Nous noterons rt, le taux court. Par définition, la projection vue de t de la marge nette d’intérêts pour les exercices à venir dépend des conditions futures du marché et est donnée par
Couvertures passées
ou` nous avons noté B (t,T) = B (t) · Sstock (t,T), ou` ?(s,T) représente le profil du nominal du swap mis en place à la date s pour l’échéance T, autrement dit la partie du nominal (agrégé) des swaps mis en place en s qui est refinancée à taux fixe et qui l’est encore en T. ws représente le taux de ce swap aux conditions prévalant à la date s. Il faut noter que Encoursactif = Encourspassif puisque la banque replace l’intégralité de l’encours client. L’expression précédente peut être ré-écrite en agrégeant l’ensemble des couvertures passées donnant des tombées de flux à la date T.
MNI(t,T) = B (t,T) · (rT ? LT) + Bb (t,T) · (wct ? rT)
avec
ou` Bb(t,T) représente la partie de l’encours refinancée à taux fixe en t qui se trouve toujours refinancée en (sous hypothèse de production nouvelle future en taux nulle). Dans la pratique, B (t,T) est interprété comme l’impasse en taux à la date t. Celle-ci est déterminée de telle sorte que les MNI futures soient insensibles à un choc instantané sur le taux court, ce qui conduit à
Le calcul détaillé de la loi de Non Corrélation NC sera donné en annexe C. On en déduit que le modèle reliant le taux client au(x) taux de marché ainsi que le profil d’écoulement en liquidité définissent complètement le programme de couverture sensé être mis en place à toute date. Par différentiation de cette position, on en déduit la couverture marginale à effectuer à la date t :
wt est alors obtenu en égalisant la valeur de marché des jambes fixes et variables du swap dont l’amortissement du nominal est donné par ?(t,T). Nous reviendrons sur le calcul du taux de swap en annexe B.
Dans le cas ou` le taux de référence dans le swap est l’euribor, le terme est à remplacer par et correspond à la valeur de l’euribor forward.
Remarque 2 (Ecoulement en taux de la production nouvelle )´ De la même manière
que l’on définit une production nouvelle en liquidité, on peut définir une production nouvelle en taux PNd ainsi qu’un écoulement en taux Sb par
Un euro refinancé à taux court à la date t se trouve toujours refinancé à la date t.
??? tôt ou tard. Cette propriété suppose de définir une date arbitraire de sortie du bilan.. Le refinancement à taux court d’une strate de production nouvelle est stoppé
Sous cette forme, on voit immédiatement que le nominal des swaps ?(t,T) à mettre en place au titre de la couverture correspond exactement à l’écoulement en taux de la production nouvelle (en taux), c’est-à-dire que
?(t,T) = PNd(t) · Sb(t,T) = PNd(t,T)
Remarque 3 (Non-corrélation de la production nouvelle)On peut également noter que la non-corrélation sur production nouvelle est différente de la non-corrélation sur stock.
En effet, on la définit naturellement par
Sb(t,T) = S (t,T) · NCPN (t,T)
ce qui conduit à l’expression suivante pour la non-corrélation de la production nouvelle
Les non-corrélations sont égales dans le cas ou`
Par exemple, dans le cas ou` l’écoulement en liquidité est exponentiel, les NC sont égales si elles sont exponentielles.
Dans la partie précédente, on cherchait à insensibiliser la MNI future à une translation de l’ensemble de la courbe des taux. Les autres sources de risque, comme le spread taux long / taux court, ou comme l’inflation étaient ignorées. Nous proposons de raffiner le raisonnement pour tenir compte des multiples sources de risque possibles.
On considère donc qu’il existe n facteurs de risque X1, ,Xn qui prennent les valeurs Xt1, ,Xtn à la date t. Si on note le taux du swap amortissable de nominal ?k(s,T) sur le facteur Xk, alors la MNI prévisionnelle s’écrit
Couvertures passées du facteur Xk
De la même manière que dans la partie précédente, il est possible d’agréger l’ensemble des flux tombant à une date T :
MNI(t,T) = B (t,T) · (rT ? LT) + Xn Bb ¡ k ? XTk¢ k(t,T) · wbt
k=1
avec
L’objectif est alors de déterminer les nominaux Bbk(t,T) qui insensibilisent la MNI prévisionnelle à un choc sur le facteur. Ils sont donnés par :
?k,
Exemple 4 (Taux court et inflation )On considère le cas ou` le taux Lt est expliqué par le taux court et l’inflation.
½
Lt = ? · rt + ? · It + ?
avec refixing périodique Cela conduit à deux impasses, sur le taux court et sur l’inflation :
et donc les swaps à mettre en place, à chaque date t, sont
- un swap amortissable receveur taux fixe contre euribor de nominal bb
- un swap amortissable payeur taux fixe contre inflation de nominal
Exemple 5 (Taux court et taux du livret A)Si on considère le taux court rt et le taux du Codevi Lt comme facteurs de risque, alors les impasses sont :
(
Bb1(t,T) = B (t,T)
Bb2(t,T) = ?B (t,T)
et donc les swaps à mettre en place, à chaque date t, sont
- un swap amortissable receveur taux fixe contre euribor de nominal bb
- un swap amortissable payeur taux fixe contre taux client de nominal
ou, de manière équivalente, un swap amortissable receveur taux client+marge contre
euribor de nominal b
2.4. TAUX DE CESSION INTERNE
Les conventions de liquidité et de taux ayant été établis, une présentation de la tarification bancaire semble nécessaire pour clore ce chapitre. Le but de cette section n’est pas de présenter un modèle éclaté du bilan, comme dans l’ouvrage de M. Dubernet [11] mais de donner au lecteur une vision globale des échanges entre les diverses entités d’une banque. En effet, comment effectuer l’analyse des marges de chaque activité, de chaque produit, de chaque marché, de sorte à ce que cet établissement donne à son réseau les bonnes incitations, celles qui lui permettent de développer son activité dans des conditions cohérentes avec les exigences des créanciers et des actionnaires. Quels sont donc les prix de transferts entre les entités? Comment calculer le Taux de Cession Interne (TCI), c’est-à-dire le taux d’intérêt auquel l’unité commerciale emprunte à sa direction financière.
Nous résumons les échanges dans le schéma suivant :
Marché |
Direction Financière |
Réseau |
Client |
Refinancement Transfert Epargne
Tx de Marché TCI Tx Client
Fig. 2.1 – Transferts entre les différentes entités d’un établissement de crédit.
Si on considère une strate de production nouvelle, c’est-à-dire un ensemble de nouveaux contrats de même nature (même taux, même maturité, même nominal, etc.) la Direction Financière s’engage à échanger (payer dans le cas d’un emploi et recevoir dans le cas d’une ressource) avec la banque de réseau un taux TCI correspondant au prix de la couverture de cette strate. Par exemple, le cas d’un prêt immobilier, la banque finance cet emploi en empruntant à taux variable sur les marchés. Pour se couvrir, la Direction Financière doit donc contracter un swap amortissable ws, de même profil que le prêt. Le TCI correspond exactement au prix de ce swap amortissable.
En ce qui concerne Direction Financière, les flux échangés sont :
– La Direction Financière re¸coit en s :
Xs = PNt · S(t,s) · rs + PNdt · Sb(t,s) · (wt ? rs)
ou` rs est le taux de rémunération issue du placement d’une certaine quantité de cash, (cf écoulement en liquidité) par la Direction Financière sur les marchés financiers et (wt ?rs) le spread de taux issu du swap amortissable mis en place pour la couverture (cf écoulement en taux)
– La Direction Financière paie :
?s = TCI(t,s) · PN(t) · S(t,s)
Concrètement, on définit donc le TCI comme le taux fixe tel que la rémunération du réseau soit identique, en marked-to-market, si cette rémunération est indexée sur le TCI ou sur l’euribor. Il faut donc égaler la somme des flux futurs actualisés, obtenus dans le premier cas comme l’encours PN(t)·S(t,s) multiplié par le TCI, et dans l’autre cas comme l’encours multiplié par l’Euribor. Au final :
·Z +? ¸ ·Z +? ¸
Et PNt · S(t,s) · rs · ?(t,s) ds = Et TCI(t,s) · PNt · S(t,s) · ?(t,s) ds
t t
Cette égalité ne définit pas entièrement le taux de cession interne, ce n’est qu’une contrainte à respecter. Aussi il faut se fixer un type de fonction afin de réduire de ne pas avoir une infinité de TCI. Par exemple, si le Comité ALM choisit un taux de cession interne constant au cours du temps, on obtient :
Mathématiquement, le Taux de Valorisation Interne (TVI) est un TCI associé au stock. Autrement dit, c’est le taux qu’il faut appliquer à l’encours de la date t pour rémunérer le réseau conformément à ce qui a été prévu : à chaque date t dans le passé, la Direction Financière s’était engagée à payer au réseau, un taux TCIt sur chaque PN (t)S (t,s) future. Pour respecter cet engagement, il faut définir le TVI par :
Comme, on obtient :
Nous avons décrit précisément une méthode correspondant à la formalisation des objectifs du Comité de Bâle. Nous avons pu ainsi détailler quelle doit être la stratégie de couverture contre les fluctuations du taux client. Dans un premier temps, nous avons supposé que le seul facteur de risque est une translation de l’ensemble de la courbe des taux, puis nous avons généralisé à plusieurs facteurs de risque. Nous sommes alors amenés à construire autant d’impasses qu’il y a de facteurs de risque.
La gestion ALM ayant pour objet de gérer les financements permettant de combler les décalages de montants sur toutes les périodes entre les emplois et les ressources. Ces financements devront être mis en place dans le respect des contraintes réglementaires mais aussi des règles internes à chacune des banques en ce qui concerne les financements. Il nous donc logique semble de présenter l’implémentation de la théorie que nous venons de développer. Ce sera l’objet du chapitre 3.
Chapitre 3
Le gouvernement a décidé la modification des taux de rémunération de l’épargne réglementée à compter du 1er aouˆt dernier. Le taux du livret A a ainsi baissé de 3% à 2.25%. Afin de «dépolitiser» le dossier et de faciliter les variations de taux en fonction de la situation économique, cette décision s’est accompagnée pour l’avenir d’un dispositif d’indexation automatique des taux de rémunération du Livret A à un niveau intermédiaire entre l’inflation et les taux à court terme.
Nous allons proposer une implémentation des couvertures liées à ce produit d’épargne. Nous regardons principalement l’impact sur la marge nette d’intérêt puis sur le taux de valorisation interne.
Nous appliquons la modélisation décrite dans la section 2.3.1 dans le cas ou` le taux client est le taux de rémunération du Livret A.
Pour se couvrir contre le taux court à la date t, il faut ajouter à la Marge ”Ouverte” la somme des couvertures sur le taux court (Euribor vs Taux de Swap) générant une tombée de flux à la date t. On obtient donc la MNI ”fermée” :
ou` ?(s) est le nominal du swap de couverture mis en place en s.
Comme précédemment, afin de calculer ce nominal, regardons la MNI en T vue de t :
Pour vérifier que la MNI soit bien couverte, l’impasse en taux doit être nulle :
autrement dit :
car puis en dérivant par rapport à t :
Comme dans la remarque 2, on en déduit que le nominal du swap de couverture mis en place en t s’écrit :
?(t,T) = PNd(t,T)
Au final le calcul de MNI se modélise comme suit :
En pratique, l’intégrale ci-dessus ne se calcule pas comme telle. Lors du premier contrat, il ne faut pas appliquer une fonction d’écoulement en taux sur la production nouvelle mais sur le stock aussi :
avec t0 = t ? dPN, dPN étant une date arbitraire de sortie de bilan propre à chaque banque. Sb donne bien la probabilité qu’un euro de production nouvelle refinancé à taux fixe à une date t le soit encore à une date T ultérieure.
Remarque 4Il faut bien se rendre compte que w(t0) est lié à est lié
Sb(s,T). On définit l’écoulement en taux du stock comme :
3.1. COUVERTURE SUR LE TAUX COURT TERME UNIQUEMENT
Le Gouvernement Raffarin propose une indexation du taux du Livret A comme la moyenne entre un taux court terme et l’inflation plus 25bp avec refixing tous les 6 mois :
Une indexation explicite sur l’inflation laisse deux alternatives possibles aux gestionnaires actif-passif :
– Un marché de l’inflation se développe et offre la possibilité aux banques de se couvrir simultanément contre les variations du taux d’inflation et des taux d’intérêt;
– Le marché de l’inflation ne se développe pas et les banques restent exposées au risque d’inflation, ou du moins à la partie de l’inflation non corrélée aux taux.
Se couvrir contre l’inflation introduit donc un deuxième paramètre, ce qui complexifie les traitements des marges. Cela nécessite de recourir à des instruments indexés sur l’inflation, ce qui aujourd’hui pourrait s’avérer difficile dans un marché ”inflation” peu développé.
Afin de proposer une alternative, nous étudions ci-après les liens entre l’inflation et les taux de marché. Cette approche permet de répliquer une couverture sur l’inflation et nous semble plus facile à mettre en œuvre, même si nos premières analyses montrent que cette modélisation n’est pas forcément robuste sur le marché européen.
Ecrivons par exemple la MNI en tenant compte de la formule du gouvernement et en se nous couvrant uniquement sur le taux court. Pour cela, régressons l’inflation sur le taux court pour obtenir une expression de la forme : LivretA(t) = ? · rt + ?.
On a : Inf = ?0 · Txct(t) + ?0, d’ou` un taux de rémunération du Livret A :
Pour cet exemple , la MNI devient :
MNI(t) = ((1 ? ?) · rt ? ?) · B(t) + (w(t0) ? r(t0)) · B(t) · S\stock(t0,t) Z t
+ PNd · Sb(t,T) · (ws ? rt) ds
t0
Afin d’effectuer des simulations, nous supposons un encours constant et les fonctions d’écoulement dépendent seulement de la durée séparant deux dates. Nous pouvons donc expliciter S, .
Fonction d’Ecoulement en taux de la Production nouvelle
Puisqu’on a fait l’hypothèse que seule la durée séparant les dates t et T influe sur la probabilité qu’un euro refinancé au taux fixe à la date t soit encore refinancé à la date T, à encours constant, on obtient : PNd(s) = cte = PNd. La fonction d’écoulement en taux de la production nouvelle est alors de la forme :
Par définition, on a :
En différentiant :
Comme
Réécrivons l’expression b pour T = t :
d’ou`
Au final, on obtient :
Dans ce cas précis, la MNI devient :
Production Nouvelle en Taux
La production nouvelle en taux est un certain pourcentage de l’encours. Ce pourcentage est le spread entre l’écoulement en taux du stock au début et celui pour le premier pas de temps.
Fonction d’Ecoulement en taux du stock et Non Correlation
On considère une loi de non-corrélation homogène et indépendante des taux de marché. C’est-à-dire qu’on considère alors une loi qui s’écrit uniquement en fonction du temps écoulé entre la date du choc et la date courante, soit NC(t,T) = NC(T ? t).
Par définition on a,
On choisit arbitrairement un écoulement en liquidité du stock et une fonction de non corrélation linéaires :
ou` 1 est une fonction indicatrice.
Fig. 3.1 – Fonction de Non Corrélation linéaire.
La marge obtenue nous donne alors le calcul suivant :
En suivant un raisonnement analogue, étudions les variations du livret A dans le cadre de la réindexation désirée par le Gouvernement en se couvrant sur deux deux facteurs de risque : le taux court terme (3 mois) et le taux long terme (10 ans). Nous mettons donc en place à chaque date un swap classique et un swap CMS.
Le taux du Livret A dépend donc du taux court et de l’inflation. Si l’on régresse cette dernière sur le taux long, on obtient :
LivA(t) = ? · r(t) + ? · Swap10Y (t) + ?
On note rt est l’Euribor 3 mois et Rt est le taux du Swap 10 ans, nous sommes dans le cas de l’exemple 4 .
Cette couverture nous conduit à créer deux impasses puisque l’on considère deux facteurs de risques : l’une avec des paramètres induit par la prise en compte des taux courts termes, l’autre des taux longs termes. Dans cette configuration, la MNI devient :
– ws1 : taux des swaps Euribor vs Taux fixe
– ws2 : taux des swaps CMS
MNI(t) = ?Bt · [? · rt + ? · Rt + ?] + Bt · rt
+ (ws1(t0) ? rt0) · B(t0) · S\stock(t0,t) ? (ws2(t0) ? Rt0) · B(t0) · S\stock(t0,t)
Z t
+ PN[1(s) · S\1(s,t) · (ws1 ? rt) ds
t0
Z t
? PN[2(s) · Sc2(s,t) · (ws2 ? Rt) ds
t0
avec t0 = t ? dPN, et Sci(t,T) = Si(t,T) · NCi(t,T)
NC1(s,t) est une loi de non corrélation linéairement décroissante de 1 à 1?? puis stable à partir de la date de refixing choisie. Par contre, NC2(s,t) est linéairement croissante de 0 à ? puis stable puisque le replacement de la trésorerie se fait au taux court terme.
En effet, pour se couvrir sur le Taux court et sur le Taux long, il faut, comme dans le cas précédent, que les dérivés partielles de la MNI vérifient :
En prenant un paramètre de plus à couvrir, on va s’apercevoir qu’il ne faut pas considérer les fonctions de non corrélation de la même manière.
En effet, on a :
LivA(t) = ? · rt + ? · Rt + ?
Le taux court terme et le taux long terme n’étant à priori pas indépendant, l’astuce de calcul consiste à réecrire la formule du Livret A sous la forme :
LivA(t) = ?c · rt + ?l · (Rt ? rt) + ?0
Avec pour hypothèse rt et (Rt ? rt) indépendants. En identifiant on obtient alors :
½ ?c ? ?l = ? d’ou` ?l = ?
donc :
LivA(t) = (? + ?) · rt + ? · (Rt ? rt) + ?
Dans le cas des ressources et emplois non échéancées, le taux client est déterminé comme suit :
½
L? si le repricing a lieu après la date T
L(T) =
LTrep = nouveau taux client, sinon Mathématiquement on a donc :
L(T) = L? · 1Trep>T + LTrep · 1Trep?T
Cependant il faut noter que les modifications du taux du Livret A, longtemps décidées de fa¸con discrétionnaire par les autorités administratives sont à présent fixées de manière contractuelle. Le gouvernement souhaite en effet un refixing semestriel. En prenant l’espérance de l’expression ci-dessus :
E(L(T)) = L? · P(Trep > T) + LTrep · P(Trep ? T)
On obtient alors
d’ou`
NC1(t) = 1 ? ?c · P(Trep ? T)
NC2(t) = ?l · P(Trep ? T)
La MNI s’écrit donc :
MNI(t) = ?Bt · [? · rt + ? · Rt + ?] + Bt · rt
+ (ws1(t0) ? rt0) · B(t0) · S\stock(t0,t) ? (ws2(t0) ? Rt0) · B(t0) · S\stock(t0,t)
Z t
+ PN[1(s) · S1(t,T) · NC1(t,T) · (ws1 ? rt) ds
t0
Z t
? PN[2(s) · Si(t,T) · NCi(t,T) · (ws2 ? Rt) ds
t0
Nous venons de formaliser l’implémentation de la couverture de la MNI pour un produit comme le Livret A. Nous avons tout d’abord mis en œuvre la couverture d’un facteur de risque puis nous en avons introduit un second. Nous allons à présent caractériser la définition du taux de valorisation interne introduite en 2.4.2 en se couvrant contre deux facteurs de risque.
L’objectif de cette partie est de donner une formule du TVI lorsque l’on se couvre contre deux facteurs de risque. Nous allons utiliser comme méthodologie, une approche projetée comme l’on a pu introduire dans la section 2.1.1.
Nous reprenons la modélisation précédente du taux de rémunération du Livret A :
LivA(t) = ? · r(t) + ? · Swap10Y (t) + ? avec refixing annuel ou` rt est l’Euribor 3 mois et Rt est le taux du Swap 10 ans, nous sommes dans le cas de l’exemple 4.
CHAPITRE 3. TECHNIQUE DE COUVERTURE APPLIQUEE AU LIVRET A
En posant L(T), le taux du Livret A futur, on a le modèle suivant :
½
L? si le repricing a lieu après la date T
L(T) =
ZTrep = nouveau taux client, sinon Mathématiquement on a donc :
L(T) = L? · 1Trep>T + ZTrep · 1Trep?T
= (?.rT? + ?.RT? + ?) · 1Trep>T + (?.rTrep + ?.RTrep + ?) · 1Trep?T
ou` rT? est le repricing précédent Trep i.e tel que T?< t < Trep.
La définition de la MNI nous donne :
Couvertures du taux court terme Couvertures du taux long terme
{z
e Bb(t,T)
Les programmes de couvertures visent à insensibiliser la MNI. Regardons l’impact d’un choc de taux (translation de la courbe des taux) en t :
Il faut noter que puisqu’un choc de taux en t n’impacte pas les résultats passés.
Les deux impasses sont donc :
Quand t ?? T, la probabilité que Trep se trouve entre t et T est nulle, d’ou` :
(
BbT1 = BT
BbT2 = 0
3.4. CONCLUSION
A une date donnée, l’expression de la marge d’intérêt s’obtient à partir des formulations précédentes. Il suffit de faire tendre t vers T dans la dernière expression de la marge projetée MNI(t,T), on obtient l’expression de la marge ”instantanée” en T :
MNIT = BT · [rT ? LT] + weT1 ? BbT1 · rT + weT2 ? BbT2 · RT
= [BT ? BbT1 ] · rT ? BbT2 · RT + weT1 + weT2 ? BT · LT
Dans notre cas, on a, La MNI est donc de la forme :
MNIT = weT1 + weT2 ? BT · LT
Le TVI est défini à une date donnée comme la marge fermée à cette date moins le taux client. En effet, on à l’égalité : MNIT = BT ·[TV IT ?LT]. Par identification avec l’expression précédente de la marge, il vient :
BT · TV IT = weT1 + weT2
d’ou`
Nous avons décrit l’implémentation de la marge nette d’intérêt dans le cas d’une couverture contre un ou deux facteurs de risque : le taux court terme uniquement puis le taux court terme et le taux long terme. De plus, il nous a semblé intéressant de proposer une définition du taux de valorisation interne lors d’une couverture contre deux facteurs de risque. Le TVI est une notion importante de la tarification bancaire, c’est la moyenne pondérée des taux de cession interne passés. Les TCI sont un indicateur de gestion stratégique pour les unités commerciales puisqu’ils rendent possible la centralisation du risque au niveau de la direction financière.
44 CHAPITRE 3. TECHNIQUE DE COUVERTURE APPLIQUEE AU LIVRET A
Au cœur du métier bancaire, la gestion actif-passif permet donc aux établissements financiers de préserver la marge dégagée par leurs réseaux bancaires et de lisser leurs résultats, quelles que soient les variations des taux d’intérêts. Les objectifs de la gestion actif passif peuvent être résumés en trois types de missions : Il s’agit de l’analyse des risques économiques (principalement les risques de marché), de choix de stratégies (couverture ou non du risque par exemple) et enfin du suivi de la mise en place de ces stratégies.
Nous avons présenté une méthode permettant de gérer à la fois le risque de taux et le risque de liquidité en ALM. Cette méthode a pour ambition de mettre en place des conventions en liquidité et en taux. Les conventions en liquidité sont choisies de telle fa¸con qu’elles permettent à la banque de minimiser le risque de liquidité auquel elle s’expose. Les conventions en taux permettent quant à elles, combinées aux conventions en liquidité, de déterminer l’impasse de taux sur l’ensemble du bilan. Cette impasse se définissant comme un agrégat de l’ensemble des actifs et des passifs à taux fixe. La plupart des banques choisissent ensuite de neutraliser leur risque net au moyen d’instruments dits de cash (comme les obligations) ou de dérivés (comme les swaps), dits de macro-couverture. Les établissements mettent en place des swaps receveur taux fixe payeur taux variable qui leur permet de recevoir un taux long. Pour simplifier le principe de couverture, nous nous sommes focalisés sur la sensibilité de la marge à un seul taux d’intérêt, le taux court terme. Cette stratégie nous permet de couvrir le risque de translation de la courbe de taux. Cette stratégie ne considèrant qu’un seul paramètre, est-elle assez robuste, n’induit-elle pas une erreur de modèle. Aussi, nous avons proposé une modélisation permettant de raffiner la couverture mise en place afin de tenir compte d’autres paramètres, comme le taux long terme par exemple. Cette nouvelle modélisation complexifie les traitements des calculs puisque nous sommes amenés à calculer autant d’impasses qu’il y a de facteurs de risque. Néanmoins, elle présente l’avantage pour une banque de pouvoir insensibiliser sa marge contre tous types de risques.
Toutefois, la macro-couverture est l’un des points techniques actuellement au centre des débats des nouvelles normes comptables (IFRS). En effet, pour les banques, la valorisation des instruments financiers décrite par l’IAS 39 reste problématique et les discussions se poursuivent avec l’IASB (International Accounting Standards Board) pour parvenir à un compromis acceptable pour toutes les parties. Le comité de mise en place de la norme a reconnu que l’objectif de la macro-couverture n’est pas de couvrir les éléments de bilan contre des variations de valeurs liées au risque de taux, mais de réduire la variabilité des résultats futurs de l’établissement, liée aux mouvements de taux d’intérêt.
La mise en cause des principes de la macro-couverture nous oblige donc à rester prudent quant aux traitements de la méthodologie mise en place tout au long de ce mémoire. Nous nous sommes efforcés d’insensibiliser le bilan d’une banque contre plusieurs facteurs de risque alors que dans le même temps, les normalisateurs comptables vont modifier la pratique habituelle des gestionnaires actif-passif.
46 CHAPITRE 3. TECHNIQUE DE COUVERTURE APPLIQUEE AU LIVRET A
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Annexe A
Fig. A.1 –
La figure A.1 représente la décomposition du placement du stock à un instant donné. Pour simplifier, on choisit une fonction d’écoulement en taux linéairement décroissante sur 5 ans. Pour lire la figure, on se place en une date t0 et l’on regarde les placements que l’on effectue.
La figure A.2 est un calcul simplifié des nominaux des swaps de couvertures ayant pour
échéance t5. Contrairement à la figure précédente, on se place en une date et l’on observe les actions passées.
Pour cela, on considère :
– un encours constant
– une fonction d’écoulement linéairement décroissante sur 5 ans (dstock=5ans) et fonction uniquement du temps écoulé entre la date d’apparition de la production nouvelle dans le bilan et la date courante Sb(t,T) = Sb(T ? t).
Cela engendre que les productions nouvelles passées s’écoulent de la même fa¸con et que leur date d’entrée dans le bilan importe peu.
On se retrouve dans les mêmes conditions que lors de la remarque 2 et le nominal des swaps ?(t,T) à mettre en place au titre de la couverture correspond exactement à l’écoulement en taux de la production nouvelle (en taux), c’est-à-dire :
?(t,T) = PNd(t).Sb(t,T)
Fig. A.2 –
Exemple de calcul : Plac¸ons-nous en t5, les couvertures passées génèrent autant de flux que d’année d’écoulement (de la production nouvelle), ici 5.
Les strates de couleurs représentent les montants des productions nouvelles passées qui seront encore refinancées en t5. En terme de couvertures, ce sont donc les nominaux des swaps amortissables ayant pour échéance t5.
En t5, la somme des flux et donc :
Xi=5
PNd(ti) · Sb(ti,t5) = Bb(t0) · Sbstock(t0,t5) + PNd · Sb(t1,t5) + PNd · Sb(t2,t5) i=0
+ PNd · Sb(t3,t5) + PNd · Sb(t4,t5) + PNd
Annexe B
Les instruments de couverture couramment utilisés dans le cadre de la couverture du bilan de la banque face au risque sont des contrats à terme tels que les swaps de taux d’intérêt ou les forwards rates agreement FRA. Ces instruments permettent aux responsables de la gestion de bilan des banques de gérer le risque de taux sur des actifs à taux variable ou à taux fixe.
Le but de cet annexe est de revenir sur la notion élémentaire de swap et de FRA puis de détailler un cas particulier que nous avons utitisé au paragraphe 2.3.1 : le constant maturity swap dit CMS.
Le marché des swaps a connu un essor considérable, ce sont les banques qui occupent un rôle déterminant sur ce marché. Plus généralement, un trésorier d’entreprise apprécie la souplesse du swap qui lui permet de choisir la durée, le taux variable de référence et le notionnel. Les swaps sont donc principalement utilisés pour transformer une position à taux fixe en position à taux variable et vice versa.
Le principe d’un swap de taux d’intérêt est de comparer un taux variable et un taux garanti et de se verser mutuellement les différentiels de taux d’intérêt sans échange en capital. Le montant notionnel ne constitue qu’une référence nécessaire au calcul des intérêts.
Le swap est donc un contrat financier dans lequel deux parties s’échangent des flux, on distingue deux ”jambes” :
- une jambe variable constituée de flux à taux variable (par exemple, l’Euribor 3 mois); - une jambe fixe constituée de flux proportionnels à un taux fixe, le taux du swap.
A la création du swap, la jambe fixe et la jambe variable ont la même valeur (au sens de l’absence d’opportunité d’arbitrage). On peut donc déterminer le taux fixe du swap. Une vision financière du calcul d’un swap receveur (sous-entendu ”de taux fixe”) est :
? Jambe fixe
T0 T1 Tn
Fig. B.1 – Echéancier de la jambe fixe.
ou` :
– N le nominal du swap,
– ?T le taux de swap à la date T,
– les ti sont les différentes dates d’échange de flux,
– tn = T est la maturité du swap;
– DF(t,T) le facteur d’actualisation entre les dates t et T.
? Jambe variable
Fig. B.2 – Echéancier de la jambe variable.
JV (0) = [1 ? DF(0,tn)] · N
En effet :
– En t0 : on prête N à une contrepartie au taux variable E0 sur la période [t0,t1],
– En t1
– on touche
– on récupère le capital
– on replace N au taux 6 mois, E1 sur la durée [t1,t2]
– on paie du taux variable (puisque que nous sommes dans le cas d’un swap receveur)
– Au final en agrégeant les flux, on obtient alors l’échéancier :
0
Le taux de swap étant le taux qui égalise la jambe fixe et la jambe variable à la date t = 0, on a donc :
Le FRA ou Forward Rate Agreement est, quant à lui, une opération d’engagement de horsbilan permettant de se prémunir pour une période future contre une variation défavorable des taux d’intérêt. Cette opération ne nécessite pas la réalisation d’une opération de prêt ou d’emprunt avec la seconde partie mais uniquement le règlement du différentiel d’intérêts résultant de l’écart entre le taux garanti de prêt ou d’emprunt et la taux de marché constaté.
L’acheteur du FRA s’engage à payer un taux fixe déterminé aujourd’hui (taux forward) en échange d’un taux connu à l’échéance du contrat.
L’absence d’opportunité d’arbitrage permet ici aussi de déterminer le taux forward du FRA d’échéance t pour une maturité T :
Revenons sur le calcul du taux de swap CMS dont il a été question dans l’étude théorique de la couverture d’un facteur de risque (cf 2.3.1).
Pour J. Hull [18],
”A constant maturity swap (CMS) is an interest rate swap where the floating rate equals the swap rate for a swap with a certain life. For example, the floating payments on a CMS swap mignt be made every six month at a rate equal to the five-year swap rate. Usually there is a lag so that the payment on a particular payment date is equal to the swap rate observed on the previous payment date.” wt est alors obtenu en égalisant la valeur de marché des jambes fixes et variables du swap
dont l’amortissement du nominal est donné par ?(t,T) :
ou` :
– Q 1est la probabilité risque neutre (c’est-à-dire la mesure de probabilité sous laquelle les prix actualisés sont des martingales), – rs le taux d’intérêt instantané, – Xs un facteur de risque.
En définissant comme la quantité :
On obtient alors la formule d’actualisation classique des cash-flows certains généralisée au cas incertains en exprimant la valeur espérée des cash-flows sous une certaine probabilité dite ”forward neutre”. Puisque d’après la formule d’évaluation sous probabilité risque-neutre, on a :
1En l’absence d’opportunité d’arbitrage, il existe une mesure de probabilité Q équivalente à la probabilité incertain FT , per¸cu en T, est donnée par l’espérance sous Q de sa valeur actualisée, conditionnellement àf historique P, sous laquelle les prix actualisés sont des martingales. La valeur Vt(FT) à la date t d’un flux l’information connue à la date t, [22].
T
V T
Rappel :
– Si FT est déterministe : Vt(FT) = T t
– Si FT est aléatoire est indépendant des taux d’intérêts : t( T) = ( ) · ( T)
et donc la quantité DF(T,TR) désigne bien la nouvelle probabilité, puisque :
d’ou`
Dans le cas ou` Xs est le taux à terme instantané, noté f(s,s), on obtient donc :
avec
Annexe C
L’impasse en taux pour l’encours d’un poste i correspond à cet encours pondéré pour tenir compte des dates de repricing et du degré d’indexation du taux de rémunération au taux de marché. Le calcul de l’impasse en taux suppose d’évaluer la sensibilité des taux clients futurs à un choc de taux d’intérêt.
Nous considérons ici un choc en translation sur les taux à la date initiale. Nous nous pla¸cons à une date future, éloignée d’une durée t de la date initiale.
Notations et conventions :
– l’encours d’un poste client étant à l’actif de la banque, nous considérons qu’ils sont comptabilisés négativement, afin qu’un choc de taux positif ait un impact positif sur la marge d’intérêt;
– R?i est le taux initial du poste i;
– est le nouveau du poste i à la date tj, cette date étant la j-ième date de repricing;
– avec plusieurs paramètres d’indexation du taux Ri ;
– Rti est le taux du poste i observé au bout d’une durée t;
Pour mesurer l’impact d’une variation d’un des paramètres du taux Ri, il suffit alors de dériver partiellement la marge d’intérêt par rapport à ce taux. Grâce à loi de non-corrélation on peut exprimer l’impasse en taux, dans le cas de l’impasse en taux court, on obtient :
ou` NCr est la fonction de non-corrélation au taux court associé au taux Ri(t).
Cela nous permet d’établir quelle est la proportion de l’encours dont il faut tenir compte dans l’impasse en taux. En effet, l’impasse en taux se définit comme l’impact d’un choc de taux sur la marge, donc, en notant M(t) la marge en t et B(t) l’encours, on a :
En particulier, lorsque le taux client est le taux de rémunération du Livret A, en prenant la modélisation suivante :
On obtient :
ou` D est la périodicité de l’indexation, i.e. D = 6mois (décidé par le Gouvernement pour sa formule d’indexation automatique).
On en déduit donc la loi de non corrélation :
Annexe D
Si on prend un écoulement in-fine sur la production, la fonction d’écoulement s’écrit alors :
S(t,T) = 1(t ? T < t + H)
ou` H est l’horizon d’écoulement et 1(.) la fonction indicatrice. Cela signifie qu’un euro entré dans le bilan à la date t reste exactement H mois et disparaˆ?t en une seule fois ensuite, d’ou` le qualificatif de“in fine”. Ceci implique une fonction d’écoulement du stock Sstock(t,T) telle que :
et 0 si T > t + H. On voit alors que si la production est constante au cours du temps, PN(s) = cste, alors :
d’ou` un écoulement linéaire du stock :
L’encours inscrit au bilan s’écoule donc linéairement en H mois, sous l’hypothèse que les strates de productions nouvelles passées ont été constantes et que chaque strate s’écoule sur un mode in-fine.
Un écoulement linéaire sur la production s’écrit :
Fig. D.1 – Ecoulement in fine de la production nouvelle - Ecoulement linéaire du stock.
ou` H est l’horizon d’écoulement. La formule (??) implique une fonction d’écoulement du
stock Sstock(t,T) telle que :
et 0 si T > t + H. On voit alors que si la production est constante au cours du temps, PN(s) = cste, alors :
d’ou` un écoulement parabolique du stock.
Dans le cas particulier d’une fonction d’écoulement sur la production égale à :
il est facile de voir que l’écoulement du stock vaut :
Sstock(t,T) = S(t,T)
Il y a alors identité entre écoulement du stock et écoulement de la production. En outre, cette propriété est vraie quelque soit le profil de la production. On voit que cela correspond
au cas ou` le taux d’écoulement ne dépend pas de la génération. En revanche, dès que la vitesse d’écoulement ?(.) dépend aussi de la date de génération de la production nouvelle(i.e.
), alors on ne peut plus considérer que les fonctions d’écoulement
sur le stock et sur la production sont identiques.
Fig. D.2 – Ecoulement exponentiel du stock et de la production.
La réciproque est vraie, à savoir : l’écoulement du type :
ou` ?(.) ne dépend pas de la date de génération est le seul qui conduise à l’égalité entre fonction d’écoulement du stock et fonction d’écoulement de la production. D’ou` :
?? le taux d’écoulement dépend de la date courante mais pas de la date de génération
[2] Cette définition est acceptée par la plupart des acteurs du secteur bancaire. Par exemple, dans son rapport annuel, la banque UBS (2002) en donne la définition suivante : “UBS’s approach to liquidity management is to ensure, as far as possible, that the Group will always have sufficient liquidity to meet its liabilities when due, without compromising [our] ability to respond quickly to strategic market opportunities.”
Voir les travaux de Vasicek ou de Cox, Ingersoll et Ross.
La Valeur Actuelle d’un actif financier est, par définiton, la somme actualisée de tous les flux futurs qu’il engendre. Si les taux d’actualisation sont les taux de marché, on obtient une valeur de marché. La valeur
[5] On appelle fonction exponentielle toute fonction f du typeest indépendante de T.